"L’argent sale, c'est souvent de l'argent qui est passé de la main à la main, donc qui peut être un peu gras, gris, toxique. Mais surtout, il est sale parce qu'on a menti à son sujet…", insiste la journaliste d’investigation Marie Maurisse. Avec François Pilet au sein du collectif Gotham City, ils ont travaillé pendant plusieurs mois pour creuser six dossiers de criminalité en col blanc. Six "histoires" d’escrocs, de narcotrafiquants, de criminels, de terroristes, qui a priori n’ont rien en commun. A un détail près : tous sont passés par des banques suisses pour blanchir leur argent sale.
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De ce travail d’investigation, ils tirent un podcast inédit, coproduit par SWI swissinfo.ch et Europe 1 Studio, qui raconte comment la Suisse est devenue, au fil des décennies, la "lessiveuse" des escrocs du monde entier, bien loin de l’image qu’on peut en avoir, verrouillée par le "secret bancaire".
Dans le premier épisode, direction New York au début du 20e siècle, où grandit un certain Meyer Lansky, l’homme qui quelques années plus tard mettra au point un système financier novateur pour blanchir l’argent sale de la Mafia, de Cosa Nostra. Son lien avec la Suisse : des porteurs de valises, baptisés "pèlerins" qui lui donnent accès à l’arrière-cour d’une banque helvète et à ses comptes bancaires qui portent des numéros, pour plus de discrétion.
Plusieurs témoins ont accepté de raconter de l’intérieur ces affaires, souvent méconnues alors qu’on parle bien de millions et de millions qui se sont évaporés dans la nature. L’ancienne magistrate Carla Del Ponte témoigne par exemple de son expérience en Russie, sur les traces d’une société de BTP très proche du pouvoir. Xavier Justo, lui, raconte ses 547 jours en détention dans une prison en Asie, pour avoir été mêlé à une gigantesque affaire de détournement de fonds publics.
"Dangereux millions" est un podcast co-produit par SWI swissinfo.ch, le service d’information en ligne de la Société suisse de radiodiffusion (un média public) et Europe 1 Studio, avec les journalistes de Gotham City.
"La difficulté principale dans notre travail, ce sont les personnes sur lesquelles on enquête et leurs avocats, qui ont des moyens énormes pour nous faire plier", explique encore Marie Maurisse. "Je ne me vois pas comme un chevalier blanc ou comme une journaliste sans peur et sans reproche, qui fonce pour dénoncer les méchants. Le plus important pour moi, c’est la transparence et l'intérêt public. Qui sont aussi importants sur une affaire de droit commun que sur une affaire de crimes financiers".