Les faits ont lieu il y a un an, jour pour jour. Le 5 mars 2019, à la prison de haute sécurité de Condé-sur-Sarthe, deux surveillants pénitentiaires étaient blessés par un détenu radicalisé et sa compagne, morte dans l’assaut du Raid. Resté mutique pendant de longs mois, Michaël Chiolo, l'auteur de l'attaque, a fini par s'exprimer le 16 janvier lors de sa dernière audition devant le juge d'instruction, dont Europe 1 a pu consulter le procès-verbal en exclusivité. Et le détenu revendique ses actes sans le moindre état d'âme.
Face au juge, Michaël Chiolo, mis en examen pour association de malfaiteurs terroristes criminelle et tentative d’assassinat sur personne dépositaire de l’autorité publique, répond seul aux questions de ses interlocuteurs, ayant renvoyé son avocat. Revenant sur les faits, il assume tout sans détour. "Je ne vais pas dire que je regrette alors que je ne regrette pas", écarte-t-il d'entrée.
"Vous aviez l’intention de tuer ?", lui demandent les juges. "Exactement oui", leur répond-il, affirmant également avoir voulu s'en prendre au directeur de la prison.
Il voulait "venger" Chérif Chekatt, le terroriste de Strasbourg
Michaël Chiolo, qui dit avoir commencé à "s'intéresser à la religion" et être "rigoureux dans la pratique" depuis 2016-2017, explique avoir décidé de passer à l'acte pour "venger" un ancien codétenu, Chérif Chekatt, l'auteur en décembre 2018 de l'attentat de Strasbourg, qu'il décrit comme un "frère". "Quand il a commis son acte, je me suis dit 'désormais, c’est le moment'", raconte-t-il encore.
En revanche, malgré des écoutes du renseignement pénitentiaire qui laissent imaginer le contraire, l'homme de 29 ans réfute toute complicité de ses codétenus, dont quatre sont encore mis en examen actuellement. "Je n'en avais parlé à personne" déclare-t-il clairement.
Michaël Chiolo affirme en fait n'avoir préparé l'attentat qu'avec sa compagne, avec laquelle il s'était même entraîné lors de précédents parloirs. Il y a un an, c’est elle qui avait fait entrer dans la prison quatre couteaux en céramique et de l’acide sulfurique, planqués sous son voile intégral. "L'acide sulfurique était un plus, si les surveillants en renfort étaient arrivés plus vite", ajoute le suspect, qui dit aussi avoir confectionné une fausse ceinture explosive à base de draps et de pâte à modeler.
"Je considère avoir fait une chose juste"
Les deux complices avaient ensuite attiré les deux surveillants dans le petit appartement où ils étaient autorisés à partager un temps familial. "J’ai visé les points vitaux", raconte aujourd'hui le trentenaire initialement condamné pour braquage, qui explique sans ciller : "la seule chose que je n’avais pas prévue, c’est que les couteaux cassent". Aux juges, le détenu radicalisé explique qu'à l'origine, "le but était d’en tuer un et de garder l’autre pour faire l’échange avec le directeur". Et d'assurer : "Si c'était à refaire, je ferais exactement la même chose avec plus de haine, plus de violence, car je considère avoir fait une chose juste en obéissant à la loi d'Allah et non à la loi des hommes".