Frites et joints : la nuit de Salah Abdeslam après les attentats du 13 novembre

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L'air de rien, le terroriste a passé la nuit du 13 novembre à discuter et fumer quelques joints avec des jeunes de Châtillon. Avant d'être exfiltré vers la Belgique. 

Nous sommes la nuit du 13 novembre. Salah Abdeslam déboule, un McDo à la main, dans le hall d'une tour de cité où le deal prospère. L'image, surréaliste, est dépeinte par L'Obs, qui a recueilli le témoignage d'un jeune lycéen présent ce soir-là. Quelques heures avant d'être exfiltré jusqu'en Belgique par deux complices, le seul membre survivant des commandos des attentats de Paris a donc passé la nuit à partager quelques joints avec des jeunes de la cité Vauban, à Châtillon, avant de s'endormir dans un coin.  

"Un mec normal", "sympa". L'un de ces lycéens, longuement interrogé par L'Obs, raconte : "On mangeait notre McDo avec deux copains quand on l’a vu arriver vers 1 heure du matin. Il avait l’air d’un mec normal, qui n’a rien à faire. On a commencé à discuter, il était sympa, alors il est resté avec nous." Salah Abdeslam, qui ne s'est pas fait exploser, à la différence de son frère Brahim et de ses camarades, cherche un endroit où se reposer un peu.

Bobards. Evidemment, les jeunes gens ne se doutent pas un instant de son rôle ce soir-là dans les attaques endeuillant Paris. Salah Abdeslam partage ses frites avec eux, tout comme les joints. Au fil de la discussion, il leur explique que la police a immobilisé sa voiture alors qu'il était allé rendre visite à ses cousins, à Barbès. En réalité, avoir déposé trois kamikazes au Stade de France, Salah Abdeslam, dixième homme du commando des attentats de Paris, a abandonné sa voiture dans le 18e arrondissement, où sa ceinture explosive a été retrouvée dix jours plus tard.

Ce n'est pas le seul mensonge que leur raconte le terroriste. Du haut de ses 17 ans, cet élève de première se souvient : "Il nous a raconté qu'il travaillait dans la maintenance des trams en Belgique. Il nous a parlé de sa fiancée, qu'il allait bientôt se marier." En réalité, Salah Abdeslam n'y travaille plus depuis quatre ans déjà, et il a avait dit au revoir à sa petite amie trois jours plus tôt.

Impassible. Avec le recul, le jeune homme est convaincu que Salah Abdeslam portait encore sur lui son gilet d'explosif, que les enquêteurs retrouveront dix jours plus tard dans cette banlieue sud de Paris. "Sa doudoune était gonflée, il avait un air bizarre", dit-il. Mais Salah Abdeslam ne laisse rien transparaître. Alors que les jeunes ont les yeux rivés sur leurs téléphones, qui ne cessent de sonner avec les attaques, le jeune homme de 26 ans demeure impassible. 

Tout au plus se montre-t-il "curieux", jetant un regard par dessus l'épaule de l'un des jeunes, visionnant sur son téléphone une vidéo des terroristes du Bataclan tirant sur les forces de l'ordre. "Il n'avait pas d'émotion particulière. Il regardait ça, il disait que c'était triste. Il avait l'air de se rendre compte de ce qu'il se passait", se souvient l'un des adolescents, interrogé par BFM TV. Deux jours plus tard, ils préviendront la police après avoir découvert, à leur grande surprise, le visage de Salah Abdeslam.