Le tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre rend jeudi après-midi une première décision très attendue sur la responsabilité civile des laboratoires Servier quant à la "défectuosité" du Mediator, médicament coupe-faim au coeur de l'un des plus grands scandales sanitaires français.
Le Mediator responsable de 2.100 décès ? Le tribunal a examiné le 10 septembre les demandes d'indemnisation de deux malades de 72 et 67 ans, qui réclament à Servier 900.000 et 125.000 euros en réparation des séquelles de leur valvulopathie. Utilisé par cinq millions de personnes en France, le Mediator, retiré du marché en 2009, est à l'origine de graves lésions des valves cardiaques et pourrait être responsable à long terme de 2.100 décès, selon une expertise judiciaire.
La nocivité du Mediator connue dès les années 90 pour les avocats. Le Mediator présentait-il un défaut de sécurité lorsqu'il été prescrit aux demandeurs entre 2003 et 2009? Pour Martine Verdier et Charles Joseph-Oudin, avocats de nombreuses victimes présumées du Mediator, sa nocivité était connue dès les années 90. "Les laboratoires ne pouvaient plus ignorer qu'il y avait une balance bénéfices-risques défavorable à laisser le médicament sur le marché", avait soutenu Me Verdier à l'audience. Ces avocats s'appuient notamment sur une décision de la cour administrative d'appel de Paris qui a confirmé en août dernier la responsabilité de l'Etat envers une victime, en jugeant qu'une décision de retrait aurait dû intervenir "au plus tard" le 7 juillet 1999, date d'une réunion de la "commission nationale de pharmacovigilance où a été évoquée la situation du benfluorex".
La défense de Servier. En face, Servier fait valoir son exonération de responsabilité. "Jusqu'en 2009, les autorités de santé considèrent qu'il n'y a pas d'alerte de valvulopathie en pharmacovigilance, la communauté scientifique dit qu'il y a peu de troubles cardiaques constatés", s'était défendu l'avocate de Servier, Me Nathalie Carrère.