Procès des primes en liquide : pour Guéant, les indemnités étaient trop "étriquées"

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C.P.-R. avec agences , modifié à
Michel Gaudin a affirmé devant le tribunal correctionnel, jeudi, qu'il n’avait fait qu’obéir aux ordres de l'ex-collaborateur de Nicolas Sarkozy, qui jugeait les primes trop "étriquées".

L'ancien bras droit de Nicolas Sarkozy, Claude Guéant, et l'ancien directeur de la police nationale, Michel Gaudin, ont précisé jeudi leurs axes de défense au procès des primes en liquide du ministère de l'Intérieur, perçues de 2002 à 2004. Tous deux sont jugés depuis lundi devant la 32e chambre du tribunal correctionnel de Paris, depuis lundi, avec trois autres prévenus : Daniel Canepa, Michel Camux et Gérard Moisselin. La procédure vise un montant de 210.000 euros remis par le patron de la police nationale à Claude Guéant, qui en a reversé une partie à ces trois collaborateurs.

Des indemnités trop étriquées ? Devant le tribunal, Claude Guéant s'est justifié d'avoir puisé dans les frais d'enquête de la police pour lui-même et des membres de son cabinet au ministère de l'Intérieur, l'expliquant par l'insuffisance de la dotation qui a suivi la réforme de 2001. Jusqu'à 2001, ces primes en liquide provenaient pour moitié des fonds spéciaux de Matignon et, pour l'autre, des frais d'enquête et de surveillance (FES) de la police, a affirmé Claude Guéant à la barre. La réforme voulue par l'ex-Premier ministre socialiste Lionel Jospin en 2001 a régularisé le paiement des primes des membres des cabinets ministériels en créant une indemnité de sujétion particulière (ISP) tout à fait transparente.

"Mr. Gaudin assure n'avoir fait qu'obéir à son supérieur hiérarchique et n'avoir rien su de l'utilisation des fonds, et Mr. Guéant explique avoir demandé cette somme à Michel Gaudin pour conforter des indemnités qu'il jugeait étriquées", a résumé la présidente, Bénédicte de Perthuis.

210.000 euros remis par Gaudin à Guéant. Claude Guéant, 70 ans, jugé pour complicité et recel de détournement de fonds publics, est soupçonné d'avoir "ordonné" à Michel Gaudin, alors directeur général de la police nationale, de lui remettre 210.000 euros provenant des FES "à des seules fins d'enrichissement personnel". L'ex-ministre de l'Intérieur et ancien secrétaire général de l'Elysée reconnaît avoir reçu ces sommes, mais en conteste l'illégalité présumée.

Selon lui, les primes mensuelles pour son cabinet avaient été divisées par trois après la réforme de 2001, parce que Matignon pensait que la place Beauvau continuerait à avoir recours à des enveloppes provenant des FES. Le gouvernement "n'a pas traité le ministère de l'Intérieur à égalité avec les autres, car il savait que, de toute façon, il se débrouillerait", a-t-il avancé à la barre.

Gaudin prend ses distances avec Guéant. Michel Gaudin, poursuivi pour détournement de fonds publics, a nettement pris ses distances, expliquant avoir mis fin, dès son arrivée à la direction générale de la police nationale (DGPN) aux primes "en enveloppes" et avoir lancé des mises en garde. "J'ai dit que moi, je supprimerais ça. Je disais bien que tout cela pouvait nous amener un jour au tribunal ou en prison", a déclaré devant le tribunal ce proche collaborateur de Nicolas Sarkozy. Michel Gaudin a justifié le fait d'avoir néanmoins remis une enveloppe mensuelle à Claude Guéant par le fait qu'il ignorait la destination des fonds. "Je ne pouvais pas refuser un ordre qui n'était pas manifestement illégal", a-t-il déclaré.

La défense de Guéant plaide la nullité de procédure. Outre Claude Guéant et Michel Gaudin, trois hauts fonctionnaires - dont deux préfets à la retraite - sont également poursuivis pour recel de détournement de fonds publics. Le tribunal a décidé jeudi de se prononcer dans son jugement final sur les nullités de procédure soulevées lundi par la défense.

Jean-Yves Dupeux, conseil de Claude Guéant, avait notamment estimé que l'enquête, diligentée par le seul Parquet national financier (PNF), n'avait pas offert aux mis en cause la possibilité de se défendre. Un autre avocat de Claude Guéant, Philippe Bouchez el Ghozi, avait quant à lui plaidé la prescription des faits, soulignant que dès 2006 - soit plus de trois ans avant l'ouverture de l'enquête - un livre, dans lequel Claude Guéant témoigne, faisait état de l'utilisation des frais d'enquête et de surveillance au ministère de l'Intérieur.

Les prévenus Guéant et Gaudin encourent jusqu'à dix ans de prison et 150.000 euros d'amende, les autres, cinq ans de prison et 375.000 euros d'amende. Le jugement devrait être mis en délibéré.