Salah Abdeslam, suspect clé des attentats de Paris, était entre les mains des enquêteurs belges samedi. Et il a commencé à parler. Selon le procureur de la République de Paris François Molins, Salah Abdeslam a confié samedi aux enquêteurs qu'il "voulait se faire exploser le 13 novembre au stade de France" mais qu'il a fait "machine arrière". Des déclarations toutefois à prendre "avec précautions", selon François Molins.
Abdeslam et l'un de ses complices ont quitté samedi matin l'hôpital Saint-Pierre de Bruxelles, où ils étaient soignés. Abdeslam, légèrement blessé à la jambe par un tir pendant son arrestation vendredi à Molenbeek, a été entendu par la police judiciaire jusqu'à 17h, avant d'être conduit à la prison de Bruges. Selon son avocat, Abdeslam "collabore avec la justice belge", il est "respectueux". Il refusera toutefois son extradition en France, a ajouté son conseiller. Lui et le deuxième homme avec qui il est sorti de l'hôpital ont été inculpés samedi pour "meurtres terroristes et participation aux activités d'un groupe terroriste".
Les trois infos à retenir :
- Abdeslam et un autre homme sont inculpés pour "meurtres terroristes et participation aux activités d'un groupe terroriste"
- Abdeslam a déclaré aux enquêteurs qu'il aurait dû se faire exploser au stade de France
- Sa remise à la France devrait prendre entre deux et trois mois
Abdeslam et un deuxième homme inculpés. Salah Abdeslam a été transféré samedi matin avec Amine Choukri dans les bâtiments de la police judiciaire fédérale belge, situés avenue de la Couronne. Après les questions des enquêteurs, ils comparaîtront devant un juge d'instruction "au plus tard dimanche après-midi", avance La Libre. En attendant, Abdeslam a été conduit vers 17h à la prison de Bruges, où une cellule spécifique lui est réservée.
"L'ennemi public numéro un" de l'Europe a dans l'après-midi été inculpé de "meurtres terroristes et participation aux activités d'un groupe terroriste" dans le cadre de l'enquête sur les attaques du 13 novembre 2015, a par ailleurs annoncé samedi le parquet fédéral belge. Un complice, "le soi-disant Monir Ahmed Alaaj alias Amine Choukri" arrêté en même temps que lui vendredi à Bruxelles, a été inculpé des mêmes chefs d'accusation et a également été placé en détention, a précisé le parquet dans un communiqué. Deux autres personnes, un couple, ont également été inculpés pour complicité.
Le profil le moins radicalisé ? Interrogé samedi, Salah Abdeslam a assuré aux enquêteurs belges qu'il voulait se faire exploser au stade de France. Il aurait dû mourir en martyre mais il a "fait machine arrière" selon des déclarations rapportées samedi par le procureur de la République de Paris. Selon un haut responsable de la Police judiciaire française contacté par Europe 1, Salah Abdeslam est le membre du commando du 13 novembre le moins radicalisé. Il n'a pas le profil d'un amoureux de la mort comme peuvent l'avoir certains terroristes. Reste une question : que faisait-il dans le 18e arrondissement de Paris le 13 novembre ? Abdeslam avait été aperçu dans le quartier après avoir déposé le commando du stade de France. Et un communiqué de revendication publié par Daech au lendemain des attentats évoquait une attaque dans ce quartier de la capitale.
La remise à la France pourrait prendre trois mois. Le président français François Hollande a dit vendredi s'attendre à ce que la Belgique l'extrade "le plus rapidement possible" vers la France. Côté belge, cette extradition ne semble pas faire de doute : "C'est normal (...) que Salah soit extradé et que la justice française traite le cas", a déclaré le ministre belge de l'Intérieur, Jan Jambon. Salah Abdeslam est visé par un mandat d'arrêt des juges français depuis le 24 novembre.
Mais Salah Abdeslam refusera cette extradition vers la France, a annoncé samedi à Bruxelles son avocat Sven Mary, en précisant que son client avait été placé "sous mandat d'arrêt", à savoir inculpé et placé en détention provisoire en droit belge. "Il collabore avec la justice belge [...] et d'ores et déjà je peux vous annoncer qu'on refusera son extradition vers la France", a déclaré l'avocat aux journalistes à l'issue d'une audition au siège de la police fédérale à Bruxelles.
"Extradition" et "remise" passent par des procédures différentes. Si Abedlsam refuse l'extradition, la France peut demander une "remise" pour aller plus vite, une procédure qui facilite les transferts de détenus entre pays européens. Mais même sa "remise" pourrait prendre du temps : cela passe par des étapes judiciaires côté belge, d'autant que la justice belge a également délivré un mandat d'arrêt. "Ça pourrait prendre plusieurs semaines", a confirmé samedi Charles Michel. La décision interviendra "dans un délai de 60 jours à compter de son arrestation", ou de 90 jours en cas de recours, a affirmé samedi le garde des Sceaux français, Jean-Jacques Urvoas.
Un Conseil de défense en France et en Belgique. Un Conseil de défense présidé par François Hollande s'est déroulé samedi matin à l'Elysée. "L'objectif, à la suite de l'arrestation d'Abdeslam et de plusieurs de ses complices, est de faire le point sur les opérations menées et sur la lutte contre les filières terroristes en France et en Europe", avait-t-on expliqué dans l'entourage du chef de l'Etat. A la sortie du Conseil de défense, Bernard Cazeneuve s'est réjoui "d'un coup important porté à l'organisation terroriste Daech en Europe". Le soir sur TF1, le ministre de l'Intérieur a ensuite annoncé l'envoi de "forces complémentaires" aux frontières.
Suite à l'arrestation de Salah Abdeslam, Interpol conseille en effet à ses 190 pays membres une vigilance accrue aux frontières car des complices pourraient être tentés de fuir. "Interpol conseille une vigilance accrue aux contrôles des frontières de ses 190 pays membres" car "la capture" de Salah Abdeslam "pourrait encourager tout complice à tenter de fuir en Europe ou ailleurs", explique Interpol dans un communiqué.
Hollande reçoit lundi les associations de victimes. François Hollande recevra lundi des associations représentant les familles de victimes des attentats du 13 novembre. "Elles ont demandé à être reçues et l'arrestation de Salah Abdeslam rendait d'autant plus opportune cette rencontre", a indiqué l'entourage du Président. La secrétaire d'État chargée de l'Aide aux victimes, Juliette Méadel, participera à cette réunion.