Bernard Tapie n’a pas été victime d’un litige. C’est ce qu’a estimé jeudi la cour d'appel de Paris. L’homme d’affaires va devoir rembourser l'intégralité de ce qu'il a touché en 2008 pour solder son contentieux avec le Crédit Lyonnais, sur la revente d’Adidas, dans les années 90. La cour d'appel de Paris l’a condamné à rembourser plus de 404 millions d’euros.
Le récap’ de l’affaire. En 2008, un tribunal arbitral privé avait octroyé plus de 404 millions d'euros à Bernard Tapie. A l’époque, trois juges arbitres du tribunal arbitral chargé par l’Etat de régler le contentieux avaient estimé que Bernard Tapie était victime d’un litige dans la revente d’Adidas au Crédit Lyonnais, en 1994. Une sentence, entachée du soupçon de fraude, annulée en février dernier par la justice.
Le feuilleton, vieux de plus de 20 ans, avait donc redémarré à zéro ou presque. Bernard Tapie en avait alors "profité" pour réclamer entre 516 millions et 1,174 milliard d'euros en réparation du préjudice économique et moral qu'il estime avoir subi lors de la revente de l'équipementier en 1994 à l'homme d'affaires Robert Louis-Dreyfus.
Pourquoi Tapie a finalement été condamné à rembourser ? Le fond du dossier a donc été réexaminé par la cour d’appel de Paris le 29 septembre. Et la cour d’appel a tranché : Bernard Tapie n’a subi aucun préjudice. Selon les juges, le prix de vente, d'environ 2 milliards d'euros, correspondait à la valeur réelle d'Adidas au moment de la transaction.
La cour d'appel considère également qu’il n’y aurait pas dû avoir de recours à un arbitrage dans cette affaire, notamment parce que la cour de cassation avait déjà tranché en 2006, estimant que les époux Tapie n'avaient subi aucun préjudice. Et ne pouvaient donc demander aucune réparation. A ce titre, l'homme d'affaires doit rembourser plus de 404 millions d'euros obtenus en 2008.
Quelle somme Tapie va devoir rembourser ? Les époux Tapie et les liquidateurs judiciaires des sociétés du groupe Tapie devront payer solidairement "la somme de 404.623.082,54 euros", a annoncé la cour d'appel de Paris. Cette somme devra être augmentée des intérêts qui courent depuis 2008, a précisé une source judiciaire. Les époux Tapie et les liquidateurs devront en outre rembourser "les coûts de la procédure d'arbitrage", soit 300.000 euros, a décidé la cour d'appel.
Quand va-t-il rembourser ? Une somme d’argent que Bernard Tapie va devoir rembourser dans l’immédiat. Les avocats du Consortium de réalisation (CDR), l'organisme chargé de gérer les actifs du Crédit Lyonnais attendent de Bernard Tapie un remboursement rapide. Dans le cas contraire, ils comptent mettre tout en œuvre pour obtenir le recouvrement forcé de cette somme. "Ce que va faire l'Etat, c'est envoyer un commandement de payer sur la somme que Bernard Tapie est condamné à restituer dans la sentence arbitrale", indique Thomas Clay, professeur de droit et spécialiste de l'arbitrage, interrogé par Europe 1.
Comment va-t-il rembourser ?Une partie de l’argent touché par Bernard Tapie lors de l'arbitrage a servi à payer ses dettes et ses impôts. L'homme d'affaires et sa femme ont ensuite investi dans l'immobilier, avec une villa à plus de 45 millions d'euros à Saint-Tropez, des appartements à Neuilly. Il s'est offert un yacht, un jet privé, un journal - le quotidien La Provence - et a fait des placements à Singapour notamment. Aujourd'hui, seul un quart de la somme, 100 millions d'euros, a été bloqué par la justice. "Si son patrimoine n’est pas suffisant, il y aura des mesures classiques à l’égard des débiteurs insolvables, c’est-à-dire des saisies de patrimoine jusqu’au paiement complet de la dette", rapporte Thomas Clay.
A-t-il des recours possibles ? "Cette décision constitue un déni de justice pur et simple" a commenté auprès l'avocat de Bernard Tapie, Me Emmanuel Gaillard. "Nous étudions en conséquence toutes les voies de droit disponibles afin que la justice dans cette affaire, enfin, prévale". L'homme d'affaires peut se pourvoir en cassation. Mais, selon une source judiciaire, l'arrêt rendu jeudi par la cour d'appel est exécutoire, sans attendre l'arrêt éventuel de la Cour de cassation.