Elle reconnaissait pratiquer un islam rigoureux mais niait toute accusation de velléité djihadiste. Le tribunal administratif de Paris a annulé mardi l'interdiction de sortie de territoire faite en mai dernier à Emelyne, une jeune convertie de 23 ans. Cette décision est une première depuis l'entrée en vigueur de la loi de novembre 2014 destinée à entraver les départs des candidats au djihad.
"Une erreur d'appréciation" du ministère de l'Intérieur. "La pratique religieuse rigoureuse (...) et la circonstance, au demeurant non établie, qu'elle ferait preuve de prosélytisme, ne suffisent pas, par elles-mêmes, à justifier de sa proximité avec le terrorisme islamiste", écrit le tribunal dans son jugement, à propos de la jeune femme qui avait demandé la levée de son interdiction.
La justice, qui considère que le ministère de l'Intérieur a commis "une erreur d'appréciation", a ordonné à l'administration de renouveler la carte d'identité de la jeune femme et son passeport. Le tribunal estime que si cette dernière a "un projet de voyage à l'étranger imprécis et incertain, l'administration n'apporte aucun élément de nature à justifier qu'elle projetterait de partir à destination d'un théâtre d'opérations de groupements terroristes".
A l'origine, un signalement de sa mère. Convertie depuis l'âge de 16 ans, Emelyne s'était vu opposer une interdiction de quitter le territoire français à la suite d'une demande de passeport pour suivre des cours de théologie dans une faculté d'Arabie saoudite. Bénévole dans une association de soutien scolaire de Mulhouse proche des mouvements salafistes, la jeune femme qui porte aujourd'hui le tchador, un voile laissant l'ensemble du visage découvert, avait été signalée aux autorités par sa mère à la suite d'un changement de comportement. Les services de renseignement qui l'avaient entendue avaient établi une "note blanche" à son encontre.
La loi permet d'imposer une interdiction de sortie de territoire pour six mois renouvelables jusqu'à deux ans en cas de "raisons sérieuses de croire" que la personne "projette des déplacements à l'étranger ayant pour objet la participation à des activités terroristes ou sur un théâtre d'opérations de groupements terroristes".
Le tribunal doit également se prononcer dans la journée sur deux autres dossiers similaires.