Etats-Unis : les body cameras, ça donne quoi ?

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ANTI-BAVURE - Plusieurs municipalités américaines ont déjà adopté les body cameras, destinées à filmer les policiers en service pour éviter les bavures.

Le spectre de Michael Brown. Quatre mois après sa mort, les spectres de Michael Brown et des autres Noirs Américains tués ces derniers mois hantent encore et toujours l'Amérique. Ils hantent les grandes villes du pays, où les manifestations en l'honneur du jeune homme de Ferguson se sont multipliées ces dernières semaines, mais aussi les commissariats, les hôtels de ville et les centre d'études de criminologie. 

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Et pour cause, le débat sur les body cameras est relancé. Les body cameras, ce sont tout simplement des caméras portatives, greffées sur l'uniforme des agents de police en service, qui auraient deux avantages selon ses défenseurs. Or, après l'annonce de la non-poursuite de Darren Wilson, le policier qui a abattu leur fils, les parents de Michael Brown s'étaient exprimés en faveur de la généralisation de ce système. 

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Ce que ces caméras peuvent apporter. Diminuer les risques d'agression encourus par les policiers d'abord, puisqu'ils pourraient plus facilement identifier leur assaillant. Limiter aussi les risques de dérapages et autres bavures ensuite, puisqu'en cas de témoignages contradictoires, la parole des forces de l'ordre pourrait être plus facilement remise en cause et démentie.

Ce dispositif est déjà mis en place à titre expérimental dans plusieurs villes américaines, avec l'appui de Barack Obama qui avait annoncé le déblocage de 75 millions de dollars pour installer 50.000 body cameras. Dernière municipalité en date à s'être lancée dans les caméras portatives, Ferguson, là où Michael Brown a été tué cet été.

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Dès 2012 à Rialto mais aussi à La Mesa, deux communes de Californie, la police s'est dotée de ces petites caméras. Et à regarder les chiffres, l'efficacité du dispositif ne fait guère de doute. Tant et si bien que Daytona et Sanford, en Floride,  Albuquerque, au Nouveau-Mexique et à Celina, au Texas, et enfin la célèbre NYPD, à New York, les body cameras ont été adoptées à petite échelle. L'idée vient de notre côté de l'Atlantique, de Grande-Bretagne, où les forces de l'ordre des comtés du Devon et des Cornouailles ont expérimenté le dispositif dès 2006.

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Les résultats des premières études. A Rialto et à La Mesa, les deux pionniers américains dans le domaine, 60 policiers environ ont porté ces caméras miniatures. Dans la première municipalité, les plaintes des citoyens contre les agents ont chuté de 88% par rapport au chiffre de 2011, et l'usage de la force policière a chuté de 60%. Des résultats similaires sont observés à La Mesa, rien d'étonnant pour le chef de la police de Rialto Tony Farra, interviewé par le Guardian (en anglais)  : " Quand vous savez que vous êtes observés, vous vous comportez un petit peu mieux. C'est la nature humaine".  Même l'association américaine de défense des libertés civiles, pourtant opposée à la prolifération des caméras de vidéo-surveillance, s'est dite satisfaite des body cameras.

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Des critiques naissantes. Mais pour Michael D. White, criminologue à l'université d'Etat de l'Arizona interviewé par CBC (en anglais), si les chiffres semblent pour l'instant affirmer le contraire, les caméras portatives pourraient devenir un argument de plus pour justifier la course aux chiffres : "Plutôt que de discuter et de raisonner les citoyens pour certaines infractions légères, les policiers pourraient procéder plus souvent à des arrestations parce qu'ils savent qu'ils portent une caméra sur eux. Et pour cause, ils pourraient se dire 'si mon supérieur revoit ces images et voit que j'aurais pu faire une arrestation et que je ne l'ai pas fait, je vais me faire sonner les cloches' ".

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Autre critique apportée par Justin Ready and T.N Young sur Slate (en anglais), deux autres criminologues de l'université de l'Arizona, "les images, les actions, tout est sujet à interprétation". Les deux chercheurs ont montré une scène de contrôle automobile de routine à un panel de personnes qui avaient été arrêtées pour des infractions routières et leur ont demandé s'ils avaient vu l'officier porter la main à la gaine de son arme de service. 50.9% des automobilistes afro-américains ont répondu "oui", contre 11.9% des Blancs. "Deux personnes qui observent la même chose peuvent y voir deux interprétations différentes car elles concentrent leur regard sur les détails qui sont les plus notables pour elles", concluent les deux criminologues.

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La question de la confidentialité des images. Dernière question que soulève l'utilisation des body cameras, développée sur le blog de Corine Lesnes, correspondante pour Le Monde à San Francisco, les problèmes de confidentialité. A Rialto, une fois de retour de patrouille, les policiers déposent leurs caméras sur une station de stockage qui télécharge automatiquement les images sur Evidence.com, propriété de Taser. Corine Lesnes précise que les images ne sont stockées que pour un mois, sauf en cas de litige où elles sont conservées un an. Taser conserve la trace des personnes qui ont consulté les vidéos. Les images de l'action des forces de l'ordre, force publique par excellence, sont donc détenues par une entreprise privée.