Considéré comme un modéré, salué pour son humilité et ses goûts simples, l’Argentin Jorge Bergoglio, élu pape sous le nom de François, a aussi sa part d’ombre. Certains s’interrogent en effet sur son rôle pendant la dictature militaire qui a ensanglanté l'Argentine de 1976 à 1983. A l’époque, Jorge Bergoglio était à la tête des jésuites argentins. Il a été entendu par la justice dans une affaire de kidnapping de deux prêtres, un épisode déjà évoqué lors du précédent conclave en 2005.
> Son portrait... vu de Google
Le rôle trouble de l’Église... De manière générale, l’Église catholique d’Argentine est critiquée pour sa passivité, voire sa complicité, à l’égard de la dictature, note le journaliste du Monde Paulo Paranagua. "La hiérarchie argentine a montré une indifférence coupable face aux horreurs commises", explique-t-il, notant qu’elle refusait toute implication dans des démarches humanitaires et "fermait la porte aux proches des victimes". En 2000, l’Église argentine a d’ailleurs fait son mea culpa pour ne pas s’être opposée à cette dictature qui a fait près de 30.000 disparus, rappelle The Guardian.
… Et de Jorge Bergoglio. L’archevêque de Buenos Aires n’a pas été mis en cause personnellement dans les crimes commis par la dictature. Mais son nom a tout de même été cité dans deux dossiers.
>> Il a été entendu comme témoin par la justice dans l’enquête sur le kidnapping d’Orlando Dorio et Francisco Jalics. Ces deux prêtres jésuites ont été enlevés le 23 mai 1976 par les militaires, en raison de leurs activités de missionnaires dans les bidonvilles. Dans son livre intitulé Le Silence, le journaliste Horacio Verbitsky accuse Jorge Bergoglio de leur avoir retiré la protection de son ordre, donnant un véritable feu vert aux militaires pour les enlever. L'intéressé s’est vigoureusement défendu contre ces accusations, assurant avoir œuvré pour sauver la vie des deux prêtres.
>> Le nom de Bergoglio est aussi cité dans une autre affaire, note l’agence Associated Press. Il est accusé d’avoir tourné le dos à une famille décimée par la dictature, et notamment à une jeune femme enceinte de cinq mois au moment de son enlèvement par les militaires, en 1977, et dont l’enfant, né en captivité, a été adopté. En 2010, Jorge Bergoglio a assuré qu’il ne savait rien des enlèvements d’enfants à cette époque. Mais une note rédigée à l’époque par l’un de ses subordonnés, assurant que le bébé avait été confié à une famille "trop importante" pour annuler l’adoption, prouverait le contraire.
> On a vérifié : a-t-il le bon profil ?
Il se défend. En plus d'affirmer qu'il a tout fait pour sauver la vie des deux prêtres jésuites, Jorge Bergoglio assure avoir agi pour protéger des Argentins de la dictature, en les cachant. Il affirme aussi avoir donné ses papiers d’identité à un dissident qui lui ressemblait pour qu’il puisse s’enfuir d’Argentine. Invité sur Europe 1 jeudi, le père Horacio Brito, recteur des sanctuaires de Notre-Dame de Lourdes, a volé à son secours : "nous remontons à des faits d'il y a quarante ans, à l'époque il n'était pas évêque. Il a pris position il y a déjà quelques années en disant qu'il ne fallait pas condamner en bloc l'Église argentine, mais faire la part des choses".
> François, c’est (aussi) le pape supporter