La confrontation entre la jeunesse et les autorités tunisiennes se poursuit lundi dans le centre-ouest du pays tandis que des manifestations sont prévues dans la capitale. Le bilan officiel des émeutes qui ont éclaté depuis samedi soir à Thala, Kasserine et Regueb, est d'au moins 14 morts, et plus de 20 selon des sources de l'opposition. En outre, à Kasserine, un homme atteint de plusieurs balles et admis à l'hôpital dimanche, Abdelbasset Kasmi, a succombé à ses blessures lundi matin, selon le syndicat UGTT.
Les trois localités -Kasserine, Thala et Regueb- étaient toujours en proie à des violences lundi, signe de la poursuite des émeutes contre le chômage qui secouent la Tunisie depuis la mi-décembre. Et à Tunis, des unités de la police anti-émeute se sont déployées dans le centre de Tunis pour renforcer la sécurité dans la capitale, où sont prévues des manifestations de jeunes.
Le président Ben Ali, qui jusque là s'est montré intransigeant avec ce mouvement social, -pointant les manifestations comme inacceptables- devait s'exprimer en début d'après-midi à la télévision. Les autorités tunisiennes assurent que la police n'utilise la force qu'en cas de nécessité pour empêcher les protestataires de mettre des vies en danger ou de saccager des bâtiments gouvernementaux.
La France a réagi lundi et appelé à l'apaisement. "Nous déplorons les violences, qui ont fait des victimes, et appelons à l'apaisement", a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bernard Valero. Interrogé sur les détentions de blogueurs tunisiens, le porte-parole du Quai d'orsay a dit ne pas avoir "d'information précise à ce stade sur les blogueurs tunisiens arrêtés". De son côté, l'Union européenne a souhaité lundi la libération immédiate des personnes qui manifestaient pacifiquement en Tunisie, conditionnant un renforcement des relations avec l'UE aux droits de l'Homme.
La Tunisie connait un mouvement social sans précédent depuis l'immolation d'un jeune Tunisien le 17 décembre dernier. Le jeune homme, qui voulait protester contre la saisie musclée par la police de son étal de fruits et légumes qu'il vendait sans permis pour faire vivre les siens, est décédé le 4 janvier. Malgré la chape de plomb des médias locaux, le mouvement prend de l'ampleur et l'essentiel de l'information circule sur le net avec des témoignages qui se multiplient sur la répression. Des internautes de la région de Kasserine dénoncent ainsi les tirs à balles réelles sur les manifestants. "Ben Ali prend la porte" peut-on lire sur certains blogs.
Tous les jeunes dénoncent la pénurie d'emploi et l'absence de perspective. L'Algérie connait un mouvement de protestation similaire depuis six jours, déclenché par l'augmentation du prix des denrées, mais aussi, sur le fond, par le manque d'avenir pour la jeunesse.