Le texte a été adopté par 10 voix sur 15. Une résolution franco-britannico-libanaise qui prévoit l'instauration d'une zone d'exclusion dans le ciel libyen a été votée jeudi soir à New York. "Toutes les mesures nécessaires" sont désormais autorisées pour protéger les civils et imposer un cessez-le-feu à l'armée libyenne. Ce qui revient, en langage diplomatique, à avoir recours à des actions militaires.
La Chine et la Russie se sont abstenues mais n'ont pas utilisé leur veto pour bloquer le texte. Et la mise en oeuvre pourrait être rapide : les frappes devraient intervenir "dans quelques heures", a indiqué vendredi matin le porte-parole du gouvernement français François Baroin.
"Prenons garde d'arriver trop tard"
Avant le vote, Alain Juppé, venu défendre le texte au nom de la France, a prononcé un plaidoyer dans lequel il a exhorté les pays membres à voter cette résolution. "C'est une question de jours, c'est peut-être une question d'heures", a-t-il lancé. "Chaque jour, chaque heure qui passe alourdit le poids de la responsabilité qui pèse sur nos épaules. Prenons garde d'arriver trop tard, ce sera l'honneur du Conseil de sécurité d'avoir fait prévaloir en Libye la loi sur la force, la démocratie sur la dictature, la liberté sur l'oppression", a encore fait valoir le locataire du Quai d'Orsay.
Les atermoiements du régime Kadhafi
La Libye a affiché un éventail de réactions, allant de l'indignation et l'appel à la concertation. Le régime a dans un premier temps estimé que la résolution de l'ONU menaçait son unité et constituait un "appel aux Libyens à s'entretuer", a déclaré le vice-ministre des Affaires étrangères Khaled Kaaim. Quelques heures avant le vote, Mouammar Kadhafi avait averti que ses forces entreraient dans la soirée dans Benghazi, ajoutant qu'elles feraient preuve d'aucune miséricorde pour quiconque leur résisterait. "C'est fini (...) Nous arrivons ce soir !", avait-il lancé. "Préparez-vous à sortir de chez vous dès ce soir. Nous vous trouverons jusque dans vos placards".
Puis le vice-ministre des Affaires étrangères libyen a indiqué que son pays était prêt à un cessez-le-feu sous condition tout en estimant que la décision de l'ONU menaçait son unité.
Une foule en liesse
A Benghazi, fief des insurgés, la résolution a été accueillie par des tirs de joie. Une foule en liesse agitant des drapeaux tricolores datant de la monarchie s'est rassemblée mercredi soir dans le centre de la ville pour saluer bruyamment le vote de l'ONU. Selon des images en direct de la chaîne de télévision qatarie Al Djazira, des coups de feu ont été tirés en l'air en guise de célébration. La foule brandissait des pancartes à l'adresse de Kadhafi sur lesquelles on pouvait lire "Benghazi ne t'aime pas".
"Nous n'avons plus peur, nous avons eu assez peur pendant 42 ans. (...) Je n'ai plus peur de l'aviation et de l'artillerie de Kadhafi qui a tué tellement de bons Libyens", a réagi Saad, un ingénieur de 47 ans, dans le vacarme de tirs de joie, de feux d'artifices et de coups de klaxons.