Transparency International, Sherpa et la Commission arabe des droits humains ont annoncé lundi avoir engagé une procédure judiciaire contre le président tunisien Ben Ali. Ces ONG souhaitent obtenir une enquête sur les biens détenus en France par le dirigeant, qui a fui la Tunisie après 23 ans au pouvoir sans partage.
Une plainte a d’ores et déjà été déposée auprès du parquet de Paris, citant des faits de recel d'abus de biens sociaux, blanchiment et recel de détournement de fonds publics, selon la juriste chargée du dossier chez Sherpa, Maud Perdriel-Vaissière. Il s’agit, pour les organisations, "d'obtenir rapidement un gel des avoirs de la famille Ben Ali en France pour éviter qu'ils ne soient transférés vers des destinations lointaines". "Notre plainte doit permettre de faire un état précis de ces avoirs, de décider de leur gel et ultérieurement de leur restitution à la Tunisie, car il s'agit certainement du fruit de détournement de fonds publics", a expliqué de son côté le président de Transparency France, Daniel Lebègue.
Des biens de luxe recensés en France
Selon Transparency France, spécialiste de la lutte contre la corruption, l'ex-président détiendrait un hôtel particulier à Paris d'une valeur estimée à 37 millions d'euros, ainsi que des avoirs dans plusieurs banques.
La famille de sa femme détiendrait par ailleurs plusieurs millions d'euros sur des comptes bancaires français, des appartements et des propriétés situés à Paris et en région parisienne, ainsi qu'un chalet à Courchevel et des propriétés sur la Côte d'Azur.
Pas de gel immédiat, dit Bercy
La ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, a indiqué lundi que les avoirs bancaires et les biens immobiliers de la famille et de l'entourage de l'ancien président tunisien étaient d'ores et déjà sous surveillance en France.
Me William Bourdon, fondateur et avocat de l'ONG française Sherpa, une organisation dont l'objectif est "d'accompagner les populations victimes de crimes économiques dans leur quête de justice", estime toutefois qu'il s'agit d'un effet d'annonce. Les autorités françaises sont "au fait que la France est un territoire d'accueil de ces détournements d'investissements financiers, bancaires, opérés pour le compte et au bénéfice du clan Ben Ali élargi", a-t-il ainsi défendu sur RTL. L'enquête sera complexe, car, selon lui, ces avoirs ont été dissimulés.
"Nicolas Sarkozy, dans un communiqué, a parlé de 'gel' : il n'est pas du tout question de gel, les dispositions légales sur lesquelles s'appuie ce mécanisme de surveillance ne permettent absolument pas le gel des avoirs", a-t-il avancé. "C'est un effet d'annonce pour essayer d'effacer la pression désastreuse provoquée par le cynisme coupable et complaisant de la France vis-à-vis de la Tunisie depuis plusieurs semaines et depuis plusieurs années", a ajouté le fondateur de Sherpa.
>> Retrouvez notre dossier spécial "La Tunisie après Ben Ali" en cliquant ici