Au Vietnam, on n’avait pas vu cela depuis des décennies. Le pays est secoué depuis mardi par une brusque poussée de fièvre anti-chinoise, qui a déjà causé la mort d’un ouvrier chinois et fait une centaine de blessés. Pékin a réagi jeudi en accusant le gouvernement vietnamien de "connivences" avec les manifestants hostiles aux Chinois. Europe1.fr vous explique pourquoi.
Ce qui a tout déclenché. Ce n’est pas un secret : entre Pékin et Hanoï, cela n’a jamais été l’amour fou. Depuis longtemps, le différend couve entre les deux voisins à propos des archipels des Paracels et des Spratleys, dont les fonds sont supposés riches en pétrole et qui constituent d’importantes voies maritimes. Quand la Chine a annoncé, début mai, le déploiement d’une plateforme pétrolière dans des eaux disputées par le Vietnam, l’hostilité a carrément monté d’un cran. L’acte est jugé "provocateur" par les Etats-Unis, et "illégal" par le Vietnam, qui exige le retrait de la plateforme. Des navires ont été déployés dans les eaux disputées par les deux pays et se sont affrontés, à coups de… canons à eau.
Des images de la "bataille navale" :
Des émeutes dans 22 provinces sur 63. Le différend maritime s’est rapidement propagé à la terre ferme. Au Vietnam, des manifestations anti-chinoises ont lieu régulièrement, mais sans jamais atteindre cette ampleur. Dès dimanche, un millier de personnes ont manifesté à Hanoï devant l’ambassade de Chine. Deux jours plus tard, ils étaient plusieurs milliers de travailleurs des zones industrielles à protester dans les rues, mettant le feu à des usines chinoises. Et jeudi, les violences se sont déjà étendues à 22 des 63 provinces du pays. Certains manifestants ne sont pas regardants : des entreprises taïwanaises, sud-coréennes et japonaises ont aussi été visées car estampillées comme "chinoises". Sous pression, plus de 600 Chinois ont en outre quitté le Vietnam pour se réfugier au Cambodge. Sur son site de conseils aux voyageurs, le ministère français des Affaires étrangères français ne déconseille cependant pas de se rendre dans le pays.
La promesse de "mesures sévères". D’habitude, le régime vietnamien, autoritaire et à parti unique, ne tolère aucune contestation. Mais cette fois, pour marquer son mécontentement envers Pékin, il a autorisé les premières manifestations anti-chinoises, qui ont été couvertes avec enthousiasme dans les médias d’Etat, note le Washington Post. Mais la situation semble avoir échappé aux dirigeants du pays, qui ont fini par promettre mercredi des "mesures sévères" pour rétablir l’ordre, afin de ne pas effrayer les investisseurs étrangers. Ironie du sort, le scénario rappelle celui des émeutes de 2012 en Chine, relève The Guardian : à l’époque, un différend territorial entre Pékin et Tokyo sur les îles Senkaku avait provoqué une flambée de violences anti-japonaises en Chine, sous l’œil presque bienveillant des autorités de... Pékin.
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