Donald Trump a imposé jeudi des taxes sur les importations d'acier et d'aluminium aux Etats-Unis, ignorant les mises en gardes répétées de nombre de ses alliés, l'Union européenne en tête, sur les risques d'une guerre commerciale aux conséquences imprévisibles. Après plusieurs jours d'intenses spéculations, le président américain a signé, depuis la Maison-Blanche, les documents controversés qui marquent un net virage protectionniste, 13 mois après son arrivée au pouvoir. Ces taxes, de 25% sur les importations d'acier et de 10% sur celles d'aluminium, entreront en vigueur dans 15 jours.
La question du Canada et du Mexique en suspens. Le Canada, premier partenaire commercial et premier fournisseur d'acier des Etats-Unis, en sera cependant exempté "pour le moment", de même que le Mexique. Le sort qui sera réservé à ces deux pays frontaliers des Etats-Unis sur le moyen terme dépendra en particulier de l'issue des négociations en cours sur l'Accord de libre-échange nord-américain (Aléna). Selon un responsable de l'exécutif américain, tous les pays concernés pourront entamer des discussions avec les Etats-Unis pour négocier, eux aussi, une éventuelle exemption.
Un principe de défense nationale. L'annonce de la mise en place de droits de douane a suscité une véritable fronde au sein même du camp républicain où nombre d'élus ne partagent pas l'avis du magnat de l'immobilier selon lequel les guerres commerciales sont "bonnes et faciles à gagner". Son principal conseiller économique, Gary Cohn, a démissionné mardi en raison de son opposition à de telles mesures. Le locataire de la Maison-Blanche s'est appuyé sur une procédure rarement invoquée de la législation commerciale américaine : l'article 232 qui s'appuie sur des arguments liés à la défense nationale pour limiter l'importation de produits et de biens aux Etats-Unis. "L'industrie américaine de l'acier et de l'aluminium a été dévastée par des pratiques commerciales étrangères agressives", a fait valoir Donald Trump jeudi, en les qualifiant "d'agressions" contre les Etats-Unis.
L'UE dans le collimateur ? "Nous allons être très équitables, nous allons être très flexibles", avait promis le président américain quelques heures avant la signature, promettant de trouver un terrain d'entente avec les "vrais amis" des Etats-Unis. Évoquant à la fois les questions commerciales et de défense, il avait pointé du doigt l'Allemagne : "Nous avons des amis et aussi des ennemis qui ont énormément profité de nous depuis des années sur le commerce et la défense (...) Si on regarde l'Otan, l'Allemagne paie 1% et nous payons 4,2% d'un PIB beaucoup plus important. Ce n'est pas juste."
L'UE "devrait être exemptée" des taxes américaines. En réaction, la commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malström, a estimé jeudi soir "que l'UE devrait être exemptée" des taxes douanières sur l'acier et l'aluminium imposées par Donald Trump. "L'UE est un allié proche des Etats-Unis et nous continuons de penser que l'UE devrait être exemptée de ces mesures", a-t-elle tweeté. "Je vais demander plus de clarté sur cette question dans les jours à venir", a-t-elle ajouté, alors qu'une rencontre est prévue samedi à Bruxelles avec le représentant au Commerce des Etats-Unis.
L'UE prépare déjà des mesures de rétorsion à ces droits de douanes, comme la taxation de produits américains emblématiques ou encore un dépôt de plainte devant l'Organisation mondiale du commerce. Les Européens exportent environ 5 milliards d'euros d'acier et 1 milliard d'euros d'aluminium chaque année vers les Etats-Unis.