Le ministre allemand de la Justice a vu l'un de ses tweets, dans lequel il traitait un essayiste de "crétin", supprimé en vertu d'une nouvelle loi qu'il a lui-même initiée pour purger les réseaux sociaux des messages haineux.
Des plaintes de particuliers. "Heiko Maas victime de sa propre législation", écrit lundi le quotidien Bild, qui révèle l'affaire. Le tweet en question remontait à 2010, à une époque où il n'était pas encore ministre. Heiko Maas s'en était pris à l'époque à un essayiste à succès néo-conservateur en Allemagne, Thilo Sarrazin, en le traitant de "crétin". Le message a été supprimé au cours du week-end, suite à des plaintes envoyées par des particuliers. "Il y a des choses que je ne twitterais plus aujourd'hui", a dit lundi le ministre en faisant amende honorable.
Un auteur polémique mais à succès. Les plateformes d'échange telles que Twitter, Facebook ou Youtube, sont depuis le 1er janvier dans l'obligation en Allemagne de supprimer les messages au contenu incitant à la haine ou passibles de poursuites pour diffamation. Elles doivent le faire dans un délai de 24 heures sous peine de fortes amendes. Ancien membre du parti social-démocrate allemand - comme le ministre de la Justice - l'essayiste Thilo Sarrazin défend depuis plusieurs années des thèses proches de l'extrême droite en estimant que l'immigration musulmane représente un danger pour la survie de l'Occident. Son dernier ouvrage, L'Allemagne disparaît, paru en 2010, fut un succès d'édition et avait provoqué une polémique à sa sortie.
Une loi très critiquée. La nouvelle législation sur les réseaux sociaux en Allemagne, une des plus strictes en Europe, suscite la controverse depuis son entrée en vigueur. Ses détracteurs crient aux restrictions de la liberté d'expression. "La législation est ratée et doit être remplacée par une autre", a critiqué une dirigeante du parti libéral allemand, Nicola Beer. "Cette loi piétine tout les fondements de l'Etat de droit", lui a fait un écho une responsable de la gauche radicale allemande, également dans l'opposition, Sahra Wagenknecht. L'extrême droite allemande mène aussi campagne contre le texte, qui a déjà valu le retrait de plusieurs de ses tweets polémiques, en particulier un dans lequel un responsable de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) qualifiait les demandeurs d'asile musulmans dans le pays de "hordes de violeurs". L'AfD parle depuis de "loi de censure". Le quotidien Bild, le plus lu du pays, demande également lundi au ministre : "Voulez-vous vraiment une police de la pensée M. Maas ?".