Deux personnes ont été blessées dans un attentat à l'explosif mercredi au cimetière non musulman de Jeddah, ville de l'ouest de l'Arabie saoudite, lors d'une cérémonie commémorant l'armistice du 11 novembre 1918. Ces deux personnes sont de nationalités grecque et saoudienne. L'explosion a eu lieu au moment où le consul de France était en train d'achever son discours. Il s'agit de la deuxième attaque visant des intérêts français à Djeddah, après celle du 29 octobre contre un vigile du consulat de France, sur fond d'une série d'attentats djihadistes en France mais aussi à Vienne le 2 novembre, liés en partie aux caricatures du prophète Mahomet.
"Pour moi, la France est visée"
A priori, l'engin explosif a été posé à l'extérieur, contre le mur d'enceinte du cimetière qui a en partie lâché. "La cérémonie annuelle commémorant la fin de la Première guerre mondiale au cimetière non musulman de Jeddah, associant plusieurs consulats généraux (d'autres pays, ndlr) dont le consulat de France, a été la cible d'une attaque à l'engin explosif ce matin, qui a causé plusieurs blessés", a indiqué le Quai d'Orsay. "La France condamne fermement ce lâche attentat que rien ne saurait justifier", a ajouté la diplomatie française, en appelant les autorités saoudiennes "à faire toute la lumière" sur cet acte et en "identifier et poursuivre les auteurs".
Selon nos informations, l'attaque s'est passée seulement 20 minutes après le début de la cérémonie, devant une quarantaine de personnes. Grecs, Américains, Saoudiens, tous étaient venus commémorer l'armistice de la Première Guerre mondiale. Sabrina est présidente de la Maison des Français de Djeddah. Elle était présente avec une vingtaine de compatriotes.
"On a entendu une énorme déflagration. On a commencé à courir. Tout le monde s'est précipité vers la sortie du cimetière", raconte-t-elle sur Europe 1. "On n'a pas eu le temps de déposer les gerbes. Après, je me suis précipitée dans la première voiture venue et je suis montée dans la voiture. La déflagration venait de derrière le mur. Ça n'était pas à l'intérieur du cimetière."
Sabrina se dit certaine qu'à travers cette attaque, c'est la France qui est visée. Elle raconte aussi avoir pris conscience de la menace. "Le déclencheur, ça a été aujourd'hui. On a l'habitude de vivre sereinement en Arabie-Saoudite. Les Français n'avaient pas pour habitude d'être visés", explique-t-elle. "Tout a commencé avec les caricatures. Je crois que le risque a encore plus augmenté depuis le décès du professeur Samuel Paty. Mais franchement, à partir d'aujourd'hui, je ne me sentirai plus en sécurité. C'est la seconde fois en dix jours. Ça fait quand même beaucoup."
Un contexte tendu
Plusieurs pays, dont la France et la Belgique, célèbrent mercredi le 102 anniversaire de l'armistice conclu entre l'Allemagne et les Alliés, qui marqua la fin de la Première guerre mondiale. Des propos du président français Emmanuel Macron sur le droit à la caricature au nom de la liberté d'expression ont déclenché la colère au Moyen-Orient et plus largement dans le monde musulman. Emmanuel Macron avait promis ne pas "renoncer aux caricatures" lors d'un hommage national au professeur Samuel Paty, décapité par un islamiste le 16 octobre, pour avoir montré des caricatures du prophète Mahomet dans un cours sur la liberté d'expression.
Lors de la précédente attaque d'octobre, le ministère français des Affaires étrangères avait envoyé un message à tous ses ressortissants appelant à la prudence, en pleine polémique avec la Turquie autour de la liberté d'expression. Paris estime que la menace contre les intérêts français est désormais partout.
Dans certains pays à majorité musulmane, des fidèles avaient réagi avec colère aux propos de Emmanuel Macron dont des portraits ont été brûlés lors de manifestations et une campagne a été lancée pour boycotter les produits français. Le président français a tenté d'apaiser la colère qui monte dans le monde musulman en assurant comprendre, dans un entretien à la chaîne Al-Jazeera, que des musulmans puissent être "choqués" par les caricatures de Mahomet, tout en dénonçant les "manipulations" et "la violence". La France, l'Autriche, l'Allemagne et l'Union européenne (UE) ont tenu un mini-sommet par visioconférence mardi pour tenter de muscler la réponse européenne au terrorisme, après les derniers attentats en France et à Vienne.