Une messagerie aussi mystérieuse que sulfureuse sur laquelle communiquent tous les dictateurs et toutes les crapules du monde entier. C'est ce qu'incarne Telegram, dont le jeune fondateur Pavel Dourov a été arrêté en France et placé en garde à vue depuis dimanche soir. Que lui reprochent les autorités françaises ? Que son application soit devenue un supermarché du crime et des fake news.
Par communiqué, l’entreprise dément et affirme que l’application respecte les lois européennes auxquelles elle est soumise… Mais Telegram, à l’heure actuelle, reste l’objet numérique voulu par son créateur : un objet hors contrôle.
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Une galaxie d'utilisateurs criminels
Depuis sa création en 2013, Telegram fonctionne selon les principes de Pavel Dourov : n’obéir à rien et refuser les contraintes. Résultat : Telegram attire toutes les galaxies criminelles, selon Fabrice Epelboin, professeur à Sciences Po et entrepreneur spécialiste du numérique : "On trouve du trafic de drogues à foison, de la prostitution de mineurs à foison, de la vente d’armes, évidemment illégale", affirme-t-il ; et ceux qui vont avec, comme les terroristes islamistes.
L’entreprise Telegram serait également en elle-même un trou noir, mais financier. Officiellement, l’application n’exploite pas les données, n’a donc pas de revenus, ce qui peut expliquer le laisser-aller juridique. "La modération a un coût assez élevé. Cela fait des années que Telegram fonctionne sans faire le moindre profit, donc pour l’instant Telegram fonctionne avec les deniers personnels de son président", avance Fabrice Epelboin.
"Si l’entreprise était forcée de faire de la modération, il est fort probable qu’elle se retire de certains marchés, notamment le marché européen, parce qu’elle n’a pas les moyens financiers de faire la modération qu’on lui demande", conclut-il. Le modèle Telegram n’est donc pas conçu pour s’assagir, et c’est ce que voulait son créateur, quitte à ce que lui ou son entreprise en paie le prix à un moment ou à un autre.