Les raisons de cette annonce, ainsi que le moment choisi, restent encore inexpliquées. Le chef de l'Etat tunisien Béji Caïd Essebsi a décrété samedi en début d'après-midi l'état d'urgence. "Le président décrète l'état d'urgence en Tunisie et s'adressera à la nation à 17 heures", a indiqué la cellule de communication de la présidence. Une décision probablement prise en réaction à l'attentat de Sousse, qui a fait 38 victimes il y a une semaine.
Quelques heures plus tard, le président tunisien a martelé : ""la situation exceptionnelle que traverse le pays après le dernier attentat terroriste et la persistance de menaces font que le pays est en guerre d'un genre spécial". Puis les premières annonces sont tombées : outre l'instauration de l'état d'urgence, plusieurs responsables ont été limogés, dont le gouverneur de Sousse. Tout "comme il y a eu des défaillances sécuritaires, il y a eu des défaillances politiques", a déclaré Dhafer Néji, conseiller en communication auprès du chef du gouvernement, en ajoutant que le gouverneur de Sousse, région où a été perpétré l'attentat, avait été démis de ses fonctions, ainsi que des responsables policiers.
Le contexte : un pays sous la pression du terrorisme. En l'espace de trois mois, deux attentats sanglants revendiqués par le groupe Etat islamique (EI) ont tué 59 touristes étrangers: 21 au musée du Bardo, à Tunis, en mars, et 38 dans un hôtel en bord de mer à Port El Kantaoui la semaine dernière. En plus de l'émotion provoquée par ces violences, c'est un coup dur pour l'économie : le secteur représente 400.000 emplois directs et indirects et une source importante de devises pour la Tunisie, dont le dinar n'est pas convertible. L'impact économique de l'attaque de Port El Kantaoui pourrait atteindre au moins un milliard de dinars (plus de 450 millions d'euros) en 2015, selon la ministre du Tourisme Selma Elloumi Rekik. "C'est un minimum je pense", a-t-elle ajouté, alors que le budget de l'Etat tunisien pour 2015 approche les 29 milliards de dinars (13,3 milliards d'euros).
L'appareil sécuritaire reconnait des erreurs et cherche une réponse. Pour préserver cet atout touristique, la Tunisie se doit d'adapter son dispositif de sécurité. Le Premier ministre tunisien Habib Essid l'a d'ailleurs reconnu, vendredi sur la BBC : "le temps de la réaction - là est le problème", a-t-il reconnu, ajoutant que la police avait été "bloquée partout", sans plus de précisions.
Les forces de l'ordre ont donc lancé une vaste réflexion pour adapter leur dispositif et leurs méthodes. Dans un premier temps, les autorités ont annoncé le déploiement d'agents armés dans les zones touristiques. L'annonce de l'état d'urgence pourrait s'inscrire dans ce contexte : il renforce à titre temporaire les pouvoirs de l'armée et des forces de sécurité tout en restreignant certains droits, comme celui de rassemblement sur la voie publique.
Jeudi, le gouvernement a par ailleurs annoncé l'arrestation de 12 personnes soupçonnées d'être liées à l'attaque à Sousse, précisant que deux autres suspects étaient encore recherchés.