La défaite de Theresa May, mardi soir à la Chambre des communes, est aussi cuisante qu'historique. Les députés britanniques ont rejeté massivement son accord sur le Brexit longuement négocié.
Un vote massif "contre". Quelques secondes avant le résultat du vote, l'aile gauche de la Chambre est pleine à craquer. Selon la tradition, c'est à cette place que se tiennent les députés qui se sont prononcés contre le gouvernement. Si la défaite est déjà certaine, c'est son ampleur qui provoque la stupéfaction : 432 députés ont voté contre, et seulement 202 pour. Theresa May vient de vivre une défaite historique, la pire jamais subie par un Premier ministre britannique.
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Elle encaisse le coup, puis promet d'ouvrir des discussions avec les partis d'opposition. "Le gouvernement abordera ces discussions dans un esprit constructif. Mais vu l'urgence d'avancer, nous devons nous concentrer sur les idées susceptibles d'être renégociées et recueillant un soutien suffisant au Parlement", déclare-t-elle. Mais la Première ministre britannique devra d'abord survivre au vote de défiance déclenché par Jeremy Corbyn, le leader des travaillistes, qui a lieu mercredi soir.
Organiser un nouveau référendum ? À 73 jours du Brexit, deux camps opposés se réjouissent de cette défaite : les partisans d'un second référendum et ceux d'une sortie de l'Union européenne sans accord. Pour les anti-Brexit réunis devant la Chambre des communes, la victoire est encore plus belle qu'espérée. Cette fois, selon eux, il n'y a plus d'autres solutions que d'organiser un nouveau référendum. Theresa May, copieusement huée, écarte déjà ce nouveau scénario, mais Scott est persuadé que cela finira par arriver. "Des gens de ma famille me disent qu'ils n'avaient pas réalisé le mal que ferait le Brexit. Maintenant, ils voient ce que ça implique, alors j'espère que l'on peut encore tout arrêter", explique ce Londonien au micro d'Europe 1.
#brexitvote: La défaite historique de theresa May réjouit deux camps diamétralement opposés : les partisans d’un second référendum et ceux d’une sortie de l’UE sans accord ... seul l’avenir dira lequel de ces camps se trompe...
— Anais Cordoba (@anais_cordoba) 16 janvier 2019
"Un accord pitoyable". Un peu plus loin, le ton monte avec d'autres manifestants qui défendent le Brexit. "Nous avons gagné, vous avez perdu !", hurle un ouvrier. Lui aussi est venu faire la fête, mais pas pour les mêmes raisons. "Theresa May est finie. Maintenant, il est temps de quitter l'Europe, et sans accord !" "De toutes façons, cet accord était pitoyable", abonde Johnny. Pendant que dans la foule beaucoup chantent déjà à gorge déployée "Bye Bye Europe".
Le vote vu de Bruxelles
Les Européens ont suivi le vote minute par minute. Jean-Claude Juncker était même rentré d'urgence de Strasbourg pour être opérationnel depuis son bureau à la Commission européenne. Les premières réactions sont tombées très vite. Officiellement, les Européens veulent maintenant des clarifications des Britanniques, et attendent des demandes précises pour savoir comment avancer. "L'Union reste unie et déterminée à trouver un accord", affirme le négociateur Michel Barnier. "Mais le temps est presque révolu", s'inquiète Jean-Claude Juncker.
Reaction très rapide de la @EU_Commission au vote du Parlement britannique contre l'accord #brexit. "Le temps est presque écoulé". https://t.co/cKx6U1fxzo
— isabelle ory (@isabelleory) 15 janvier 2019
Ces mots des communiqués officiels masquent mal l'inquiétude aiguë sur le continent. Les 27 ne s'attendaient pas à une défaite d'une telle ampleur. L'accord qu'ils ont laborieusement négocié pendant un an et demi avec Teresa May est très vraisemblablement mort-né. "On entre dans une nouvelle séquence, une plongée dans l'inconnu", reconnaissent les diplomates.
Une prolongation des délais ? Elle est probable, mais pour parvenir à quel résultat ? Le président du Conseil européen lui met les pieds dans le plat. "Qui aura le courage de nommer la seule solution positive ?", demande Donald Tusk. À ses yeux, la seule solution positive est que les Britanniques restent dans l'Union.