À trois jours de la fin de la COP28, la Chine affirme samedi que les négociations sur la sortie du pétrole, du gaz et du charbon avancent, alors que l'Opep tente de freiner la dynamique contre les énergies fossiles. "Nous avons déjà fait des progrès sur ce sujet, et je pense que nous en aurons d'autres très bientôt, dans les prochains jours", a déclaré l'émissaire chinois sur le climat, Xie Zhenhua, vétéran de ces négociations qui était à la COP21 lorsque l'accord de Paris a été adopté, en 2015. "Car si nous n'y parvenons pas, si nous ne résolvons pas ce sujet, je vois peu de chance que nous ayons une COP28 réussie", a-t-il ajouté lors d'une rencontre avec des journalistes.
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Le grand puzzle diplomatique en train d'être assemblé à Dubaï sous la présidence des Émirats arabes unis doit à la fois envoyer le signal que le début de la fin des énergies fossiles a commencé, selon le vœu d'une centaine de pays dont ceux de l'Union européenne, et que la transition énergétique ne doit pas être synonyme de sacrifice pour les pays en développement. La Chine, attachée à l'accord de Paris, est vue comme un pont entre pays riches et en développement, et son émissaire est de toutes les réunions.
Samedi, Xie Zhenhua a pris soin de rappeler que Chine et États-Unis avaient signé une déclaration commune en novembre pour dire que les énergies renouvelables (solaire, éolien...) devaient graduellement remplacer les fossiles. Cela sera-t-il la base d'un compromis à la COP28 ? Sultan Al Jaber, le président de la conférence, veut un "deal" d'ici mardi, au 8e anniversaire de l'accord de Paris.
"En colère" contre l'Opep
Le jeu diplomatique des trois prochains jours consistera à trouver le point d'équilibre capable de remporter le consensus de 194 pays et de l'Union européenne. "Tout l'enjeu est de trouver des formulations qui tiennent compte de la très grande diversité des points de départ de chaque pays et de la manière dont ils imaginent aller vers la neutralité carbone, tout en essayant de maintenir un haut niveau d'ambition", explique la ministre française de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher. "Il va falloir être un peu inventif sur le langage".
Si près du but, les grands camps répètent leurs positions, et l'ire des pays anti-fossiles vise l'Opep, le cartel des pays exportateurs de pétrole mené par l'Arabie saoudite. L'Organisation des pays exportateurs de pétrole a défendu samedi à la tribune son opposition à tout ciblage spécifique des énergies fossiles dans un accord final. "Il n'y a pas de solution ou de voie unique pour atteindre un avenir énergétique durable", a déclaré un représentant du secrétaire général de l'organisation.
Celui-ci, Haitham al-Ghais, a écrit cette semaine "en urgence" à ses 23 pays membres ou associés pour les enjoindre de "rejeter proactivement" tout accord ciblant les énergies fossiles. L'intervention a suscité un déluge de réactions à Dubaï, chez les ONG, mais aussi chez les ministres. La ministre espagnole de la Transition écologique Teresa Ribera, dont le pays assure la présidence semestrielle de l'Union européenne, a fait du bruit en dénonçant une position "répugnante". Agnès Pannier-Runacher s'est, elle, dite "stupéfaite" et "en colère".
"Rien ne met plus en danger la prospérité et l'avenir des habitants de la Terre, y compris les citoyens des pays de l'Opep, que les énergies fossiles", a jugé Tina Stege, émissaire pour le climat des îles Marshall, archipel du Pacifique menacé par la montée des eaux. Mais "aucun pays ne veut être le pays désigné comme le fauteur de troubles", nuance un membre de l'équipe de la présidence de la COP28, qui voit surtout dans les manœuvres saoudiennes une technique typique des fins de négociation.
"Montrer l'exemple"
À la tribune, les pays se succèdent samedi sans montrer d'évolution notable dans leurs positions publiques. Le représentant du Qatar a même profité de l'occasion pour vanter le gaz naturel, dont son pays est un grand producteur. "Le Qatar fournit les marchés mondiaux en énergie propre grâce à la production de gaz naturel", a assuré sans sourciller le ministre de l'Environnement du Qatar, Faleh Nasser Al-Thani.
Les pays émergents et en développement, eux, demandent des contreparties aux pays riches pour signer l'abandon des combustibles fossiles. Les termes "équité" et "juste" sont de tous les discours. À la tribune samedi, le ministre indien du climat, Bhupender Yadav, a appelé les pays développés à "montrer l'exemple".