Turquie 1:36
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Rémi Trieau, Caroline Baudry avec AFP / Crédit photo : BURAK KARA / GETTY IMAGES EUROPE / GETTY IMAGES VIA AFP , modifié à
Ce dimanche, en ce jour d'élection présidentielle en Turquie, les bureaux de vote ont fermé leurs portes en fin d'après-midi après avoir vu défiler une foule considérable d'électeurs. En jeu, le choix du treizième président de la République turque, qui fête son premier siècle, et l'avenir du chef de l'Etat qui espère se maintenir au pouvoir face à son adversaire.
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Les bureaux de vote en Turquie ont fermé leurs portes en fin d'après-midi dimanche après avoir vu défiler une foule considérable d'électeurs, venus choisir entre le président sortant Recep Tayyip Erdogan, au pouvoir depuis vingt ans, et son rival social-démocrate, Kemal Kiliçdaroglu. Jusqu'à la dernière minute - 17h00 (14h00 GMT) - les urnes ont continué de se remplir de grosses enveloppes vert moutarde déposées depuis 08h00 par des électeurs qui ont parfois attendu plusieurs heures devant les écoles transformées en bureaux de vote. En jeu : le choix du treizième président de la République turque, qui fête son premier siècle, et l'avenir du chef de l'Etat qui espère se maintenir au pouvoir face à son adversaire.

Le vainqueur doit obtenir une majorité de 50% des voix plus une, sous peine d'un deuxième tour le 28 mai - date anniversaire symbolique du plus grand mouvement de contestations populaire qui a secoué le pouvoir en 2003. Les 64 millions d'électeurs devaient aussi choisir les 600 députés qui siègeront au parlement monocaméral à Ankara. En 2018, lors de la dernière présidentielle, le chef de l'Etat l'avait emporté au premier tour avec plus de 52,5 % des voix. Un ballotage constituerait déjà pour lui un revers.

La Turquie vers un second tour inédit pour la présidentielle

Un second tour inédit semble se profiler dimanche soir en Turquie, suspendue aux résultats du dépouillement de l'élection présidentielle, qui donnent le président Recep Tayyip Erdogan au coude à coude avec son adversaire Kemal Kiliçdaroglu. Le chef de l'Etat de 69 ans, au pouvoir depuis 20 ans, perdait dans la soirée l'avance dont le créditaient les médias officiels sur son rival social-démocrate, passant sous la barre des 50%, selon l'agence étatique Anadolu.

Même si ces chiffres sont encore susceptibles d'évoluer, pour le troisième homme de cette élection, Sinon Ogan, dissident du parti nationaliste MHP crédité d'environ 5% des voix, ces résultats ouvrent la voie à un deuxième tour le 28 mai. Ce qui constituerait une première pour la République turque, centenaire cette année. "Nous allons avoir 15 jours difficiles devant nous en cas de deuxième tour", a-t-il prévenu en refusant de dire quel candidat il soutiendrait.

Erdogan passe sous la barre des 50%, sur près de 90% des bulletins

Le président turc Recep Tayyip Erdogan, donné en tête par les médias officiels dimanche en début de soirée, est passé sous la barre des 50% après dépouillement de la quasi-totalité des bulletins, selon l'agence étatique Anadolu. A 23H00 (20H00 GMT), le chef de l'Etat recueillait 49,94% des voix sur près de 90% des bulletins dépouillés, selon Anadolu, ouvrant la perspective d'un second tour le 28 mai.

Vers 19H30, soit plus de deux heures après la fermeture des bureaux de vote qui ont vu défiler massivement les électeurs turcs, Erdogan était crédité d'une avance confortable par l'agence Anadolu : 54,3% des suffrages contre 39,8% pour son adversaire Kemal Kiliçdaroglu. Mais cette avance a fondu au fil des heures.

Bataille de chiffres entre Erdogan et Kemal Kiliçdaroglu

Une bataille de chiffres s'est engagée dimanche soir en Turquie autour des premiers dépouillements du vote pour l'élection présidentielle. Le président turc Recep Tayyip Erdogan est crédité de plus de 50% des bulletins après le dépouillement de plus de 40% des bulletins, selon l'agence officielle Anadolu. Un résultat aussitôt contesté par son adversaire pour la présidence, Kemal Kiliçdaroglu, patron du CHP. "Nous sommes en tête", a-t-il affirmé sur Twitter. Anadolu a accordé 52,4% des voix au chef de l'Etat après le dépouillement de 43,8% des bulletins. Le troisième candidat Sinan Ogan, un dissident du parti nationaliste MHP, se situerait autour de 5% des voix. 

Le maire CHP d'Istanbul Ekrem Imamoglu, prenant la parole au siège du parti à Ankara et précisant s'exprimer "au nom de Kemal Kiliçdaroglu", a appelé les citoyens "à ne pas tenir compte des chiffres donnés par Anadolu". "Nous ne croyons pas Anadolu", a-t-il dit, agence de presse selon lui "sous respirateur artificiel depuis 2019" et qui "a perdu toute respectabilité". Une allusion à la tutelle du pouvoir sur les principaux grands médias turcs.

La chaine proche du CHP Halk TV a diffusé dimanche soir des chiffres donnant une légère avance à Kemal Kiliçdaroglu, 47,71% contre 46,5% à Erdogan. "Nous ne laisserons pas nos concitoyens se faire avoir", a assuré Ekrem Imamoglu qui avait vu son élection à la mairie d'Istanbul invalidée en 2019, avant d'être confirmé avec éclat dans les urnes trois mois plus tard.

Erdogan en tête du scrutin présidentiel sur 25% de bulletins dépouillés

Le président turc Recep Tayyip Erdogan est donné en tête dimanche soir du scrutin présidentiel après le dépouillement de 25% des bulletins, selon les médias officiels. Erdogan, au pouvoir depuis vingt ans, obtient à ce stade 54,3 % des suffrages contre 39,8 % à son adversaire Kemal Kiliçdaroglu, selon des résultats encore très provisoires rapportés par l'agence étatique Anadolu.

Pas de pronostic

Erdogan a promis de respecter le verdict des urnes, surveillées par des centaines de milliers de scrutateurs des deux camps et dont il a toujours tiré sa légitimité. La commission électorale (YSK), gardée sous haute surveillance de la police qui bloque toute circulation des voitures et des piétons, n'a pas signalé à ce stade d'incident. Arrivé à la mi-journée dans son bureau de vote d'Üsküdar, quartier conservateur sur la rive asiatique d'Istanbul, Erdogan a souhaité "un avenir profitable au pays et à la démocratie turque", soulignant "l'enthousiasme des électeurs" en particulier dans les zones affectées par le séisme du 6 février qui a fait au moins 50.000 morts.

Apparu les traits fatigués, il n'a pas fait le moindre pronostic sur les résultats, prévus dans la soirée, et qu'il attendra depuis Ankara, tout comme Kemal Kiliçdaroglu. Peu auparavant, ce dernier avait été le premier des deux à déposer son bulletin à Ankara : "La démocratie nous a manqué", a déclaré le social-démocrate, tout sourire. "Vous verrez, le printemps va revenir dans ce pays, si Dieu le veut, et il durera pour toujours", a-t-il ajouté en reprenant un de ses slogans de campagne.

"Ne pas diviser la Turquie"

Les électeurs étaient polarisés entre le président islamo-conservateur Erdogan, 69 ans, et Kemal Kiliçdaroglu, 74 ans, à la tête du CHP, le parti laïque de Mustafa Kemal Atatürk, fondateur de la Turquie moderne. "Ce qui compte, c'est de ne pas diviser la Turquie", a commenté Recep Turktan, 67 ans, en patientant devant son bureau à Üsküdar. Un troisième candidat, Sinan Ogan, est lui crédité de quelques points.

"L'économie n'est pas la priorité, nous devons commencer par la base : restaurer les droits humains et la démocratie, regagner notre dignité", juge Hande Tekay, 55 ans, dans le quartier huppé de Sisli, à Istanbul. "Pour le dire simplement, on veut la révolution français: Egalité, liberté, fraternité, parce que ces vingt dernières années, tout ça a disparu", renchérit Ulvi Aminci, 58 ans, jean bleu et tatouage sur la main. "Je dis 'continuez' avec Erdogan", implore au contraire Nurcan Soyer, foulard sur la tête, devant le bureau de vote d'Erdogan.

Dans la ville meurtrie d'Antakya, l'ancienne Antioche (sud) ruinée par le séisme, Mehmet Topaloglu est arrivé parmi les premiers : "Il faut du changement, ça suffit". Les blessures restent vives trois mois après le drame : "Avant même le séisme mon vote était défini, mais avec le séisme ça s'est confirmé", lâche Aylin Karakas, 23 ans.

"Printemps turc"

Kemal Kiliçdaroglu emmène un front uni de six partis de la droite nationaliste au centre-gauche libéral. Il a en outre reçu le soutien du parti prokurde HDP, troisième force politique du pays. Erdogan se présente cette fois devant un pays usé par une crise économique, avec une monnaie dévaluée de moitié en deux ans et une inflation qui a dépassé les 85% à l'automne. Face à lui, Kemal Kiliçdaroglu a joué la carte de l'apaisement, promettant le rétablissement de l'Etat de droit et le respect des institutions, malmenées au cours des dix dernières années par la dérive autocratique de Erdogan.

Pour le politologue Ahmet Insel, en exil à Paris, "la défaite d'Erdogan montrerait qu'on peut sortir d'une autocratie bien installée par la voie des urnes." Une forme de "printemps turc" qui sera scruté de près à l'étranger. Car la Turquie, membre de l'Otan, jouit d'une position unique entre Europe et Moyen-Orient, et est un acteur diplomatique majeur.