L'affaire des documents confidentiels emportés par Joe Biden prenait de l'ampleur jeudi, avec la nomination d'un procureur spécial, tandis que le président américain assure avoir agi "par inadvertance". Le ministre américain de la Justice Merrick Garland a nommé Robert Hur au poste de procureur spécial pour enquêter sur des dossiers découverts dans un bureau et une résidence de Joe Biden, une annonce destinée à étouffer tout soupçon de favoritisme.
Merrick Garland, qui avait déjà délégué les investigations concernant Donald Trump à un procureur indépendant, a choisi pour cette nouvelle mission un ancien procureur fédéral ayant traité jusqu'ici aussi bien de grande criminalité que d'affaires de corruption ou fraudes. "Sa nomination rappelle au public l'attachement du ministère à l'indépendance de la justice dans les affaires particulièrement sensibles, et son engagement à rendre des décisions uniquement guidées par les faits et la loi", a déclaré le ministre lors d'une brève allocution.
Des documents dans le garage de sa résidence
Quelques heures plus tôt, la Maison Blanche avait fait savoir qu'un "petit nombre de documents confidentiels" portant sur le travail de vice-président de Joe Biden (2009-2017) avait été retrouvé dans sa résidence privée de Wilmington, dans le Delaware. Ils étaient stockés dans le garage et dans une pièce adjacente. L'avocat de la présidence, Richard Sauber, a assuré dans un communiqué que le président entendait "coopérer" avec le procureur spécial.
"Nous sommes certains qu'une enquête minutieuse montrera que ces documents ont été déplacés par inadvertance et que le président et ses avocats ont agi promptement lorsqu'ils ont découvert cette erreur", a-t-il déclaré. Lundi, la Maison Blanche avait déjà reconnu qu'une dizaine de documents de ce type avaient été découverts au Penn Biden Center, un cercle de réflexion de Washington où Joe Biden avait autrefois un bureau. Le prédécesseur de Joe Biden, et son potentiel rival à l'élection de 2024, Donald Trump, est depuis des mois dans le viseur de la justice pour sa gestion de ses archives présidentielles.
Un écho à Donald Trump
Une loi de 1978 oblige les présidents et vice-présidents américains à transmettre l'ensemble de leurs emails, lettres et autres documents de travail aux Archives nationales. En quittant la Maison Blanche en janvier 2021, Donald Trump avait emporté des boîtes entières de documents. Après avoir été prié de les restituer, il avait rendu une quinzaine de cartons en janvier 2022. Après examen, la police fédérale avait estimé que l'ex-président républicain en conservait probablement d'autres dans sa luxueuse résidence de Mar-a-Lago en Floride.
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Des agents du FBI y ont mené le 8 août une perquisition spectaculaire sur la base d'un mandat pour "rétention de documents classifiés" et "entrave à une enquête fédérale", et ont saisi une trentaine d'autres boîtes. Une intense bataille judiciaire s'est alors ouverte pour déterminer la nature des documents saisis (classifiés? personnels? déclassifiés?) ce qui a ralenti la procédure. Mais Donald Trump reste sous la menace d'une inculpation fédérale. Après sa déclaration de candidature à la présidentielle de 2024, Merrick Garland avait confié à un procureur spécial, Jack Smith le soin de superviser cette enquête, ainsi que les investigations concernant le rôle de Donald Trump dans l'assaut contre le Capitole, le 6 janvier 2021.
L'embarras de l'administration Biden
Le ministre a agi vite pour tuer dans l'œuf les accusations de justice à deux vitesses proférées par l'opposition. L'administration Biden "traite le président Trump d'une façon et le président Biden d'une autre", avait ainsi lancé jeudi midi le président républicain de la Chambre des représentants Kevin McCarthy, en demandant une "enquête du Congrès" sur le président. Sur la chaîne Fox, le sénateur Josh Hawley avait lui réclamé un procureur spécial. "S'il y en a un pour Trump, il doit y en avoir un pour Biden".
La réaction de Merrick Garland prive les républicains de cette ligne d'attaque. Mais l'affaire est incontestablement embarrassante, en dépit des nombreuses différences avec le cas de Donald Trump, au moment où Joe Biden envisage de se lancer dans une nouvelle course à la présidentielle.