Les deux derniers Français jugés en Irak pour "appartenance au groupe État islamique" viennent d'être condamnés à mort, lundi, portant à onze le nombre de Français à qui la justice irakienne a infligé la peine capitale. Dans une tribune parue sur franceinfo, lundi, 45 avocats voient dans cette condamnation un "immense déshonneur" pour la France, qui a décidé de ne pas intervenir pour empêcher ces condamnations.
Une "obligation" pas honorée de la France
Parmi les signataires de cette tribune figure l'avocat Henri Leclerc. Le pénaliste, invité d'Europe 1 lundi soir, dénonce "le fait qu'on puisse condamner quelqu'un à mort, car c'est une atteinte aux Droits de l'Homme". "Qu'ils soient jugés là-bas, c'est un fait. C'est le principe-même de la peine de mort" qui pose problème selon l'ancien président de la Ligue des droits de l'Homme. "La France a une obligation de s'occuper de gens qui sont encore Français, elle doit intervenir dans cette affaire pour tout faire pour qu'ils ne soient pas exécutés et ne pas se contenter de souhaiter qu'ils ne le soient pas."
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Se pose donc, selon Me Henri Leclerc, la question de la responsabilité de l'État : "L'Etat peut avoir une action diplomatique forte pour qu'on n'exécute pas un Français. Il est intervenu auprès de l'Indonésie pour sauver des trafiquants de stupéfiants, et au Mexique aussi. Ce que nous voulons, ce n'est pas que le gouvernement français se contente de dire, comme l'a dit Monsieur Le Drian, que 'nous ne souhaitons pas qu'ils soient exécutés', mais 'nous ne voulons pas qu'ils soient exécutés'. C'est à notre diplomatie de s'en occuper."
Sur ces condamnations, "l'opinion peut se tromper"
Pour les signataires de cette tribune, cet épisode laissera une "tache indélébile" sur le mandat d'Emmanuel Macron. L'avocat Henri Leclerc va plus loin en parlant d'"une forme de délocalisation de la peine de mort" : "Je ne sais pas si l'Etat français savait à l'avance que ça serait ça [des condamnations à mort par pendaison, NDLR]. Si on accepte ça, nous acceptons que ces criminels soient exécutés, et ça, ça n'est pas possible. On accepte qu'ils soient exécutés parce qu'ils sont à l'étranger ? Si nous les avions, nous ne les exécuterions pas."
La démarche de ces avocats peut enfin paraître impopulaire, concède l'avocat pénaliste. "Nous en sommes au stade où il ne faut pas que ces hommes soient exécutés. Je sais bien que ce n'est pas l'avis de l'opinion, mais l'opinion peut se tromper : en 1981, quand la peine de mort a été abrogée, 63% de l'opinion était favorable à son maintien. Aujourd'hui, plus personne ou très peu de gens ne souhaitent qu'elle soit rétablie en France."