La Russie, accusée de "crimes de guerre" en Ukraine, a subi jeudi un revers à l'ONU où elle a été exclue de la Commission des droits de l'homme, tandis que Kiev exhortait les civils à fuir les régions de l'est, menacées par une offensive russe. L'assemblée générale des Nations unies, qui rassemble tous les pays membres et au sein de laquelle il n'y a pas de droit de veto, a adopté à une assez large majorité la suspension de la Russie du Conseil des droits de l'homme, la deuxième dans l'histoire de l'ONU après l'éviction de la Libye en 2011. Le vote, avec 93 voix pour, a toutefois été moins massif qu'au moment de la condamnation par 141 pays début mars de l'invasion déclenchée par Moscou.
En fin de journée, l'Union européenne a approuvé un embargo sur le charbon russe, et a décidé de fermer l'accès des ports européens aux navires russes. Voici ce qu'il faut retenir de l'invasion russe au 43e jour.
Les principales informations :
- l'UE décide un embargo sur le charbon russe et ferme l'accès à ses ports aux navires russes
- Les forces russes ont bombardé mercredi plusieurs localités dans l'Est de l'Ukraine, dont Severodonetsk ou Rubizhne, faisant au moins un mort, selon le gouverneur de Lougansk (est), encore sous contrôle ukrainien, Serguiï Gaïdaï.
- Le gouvernement ukrainien demande à sa population civile de fuir les combats qui s'annoncent à l'est.
- Les Etats-Unis ont annoncé une nouvelle volée de sanctions économiques et financières contre la Russie, qu'ils qualifient de "dévastatrices" et qui visent notamment les grandes banques et les filles du président russe Vladimir Poutine.
Une situation "bien plus horrible" à Borodianka qu'à Boutcha
La situation à Borodianka, une localité au nord-ouest de Kiev récemment reprise par les Ukrainiens aux Russes, est "bien plus horrible" qu'à Boutcha, où des massacres de civils ont été commis, a déclaré jeudi soir le président ukrainien Volodymyr Zelensky. "Il y a plus de victimes" dans cette petite ville que dans celle de Boutcha, également au nord-ouest de la capitale, a ajouté Volodymyr Zelensky dans un message vidéo.
500 millions d'euros d'armes supplémentaire pour l'Ukraine, propose l'UE
Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a proposé d'augmenter de 500 millions d'euros le financement pour fournir des armes à l'Ukraine, a annoncé jeudi le président du Conseil européen Charles Michel, exprimant son "soutien" à cette initiative. "Une fois rapidement approuvée, cette proposition portera à 1,5 milliard d'euros l'aide de l'UE fournie à l'Ukraine pour du matériel militaire", a tweeté le responsable qui représente les 27 de l'UE.
Thanks and support to @JosepBorrellF for your proposal to top up the #EuropeanPeaceFacility with a further €500M. Once swiftly approved this will bring to 1.5 billion the EU support already provided for military equipment for #Ukraine. @ZelenskyyUa
— Charles Michel (@eucopresident) April 7, 2022
L'UE décide un embargo sur le charbon russe
Les représentants des Vingt-Sept ont décidé jeudi un embargo sur le charbon russe et la fermeture des ports européens aux navires russes, dans le cadre d'une cinquième salve de sanctions contre Moscou, a annoncé la présidence française du Conseil de l'UE.
Ce paquet "très substantiel" prévoit également l'interdiction d'exportations vers la Russie, notamment de biens de haute technologie, à hauteur de 10 milliards d'euros, et de nouvelles sanctions contre des banques russes, selon la même source. Il avait été proposé par la Commission après la découverte de dizaines de cadavres de civils le weekend dernier à Boutcha, près de Kiev.
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26 corps découverts près de Kiev
Vingt-six corps ont été extraits par les secouristes ukrainiens des décombres de deux immeubles d'habitation bombardés à Borodianka, au nord-ouest de Kiev, a annoncé jeudi la procureure générale d'Ukraine Iryna Venediktova. C'est "la ville la plus détruite de la région" de la capitale, a-t-elle souligné sur Facebook, ajoutant qu'"il est difficile de prévoir combien il va y avoir de morts" au total à Borodianka, où "seule la population civile a été visée".
Marioupol : environ 5.000 civils tués, entre 60 et 70% d'habitations détruites
Le "nouveau maire" proclamé par les forces pro-russes à Marioupol a annoncé jeudi qu'"environ 5.000 personnes" étaient mortes parmi la population civile de cette ville ukrainienne, assiégée depuis des semaines par l'armée russe et ses alliés séparatistes. "Environ 60 à 70% du parc de logements a été détruit ou partiellement détruit", a ajouté Konstantin Ivachtchenko, nommé à la tête de la ville mercredi par Denis Pouchiline, dirigeant des séparatistes de Donetsk. Les autorités ukrainiennes ont avancé des bilans beaucoup plus lourds.
Une enquête sur Boutcha à l'ONU
Une enquête sur les circonstances de la mort de personnes habillées en vêtements civils, retrouvées mortes à Boutcha par les autorités ukrainiennes après le retrait de l'armée russe, est "la prochaine étape", a déclaré jeudi un haut responsable de l'ONU.
L'Ukraine réclame des armes
Le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba a demandé jeudi aux membres de l'Otan de lui fournir rapidement toutes les armes dont a besoin son pays pour combattre les forces russes. "Je viens demander trois choses: des armes, des armes et des armes. Plus rapidement elles seront livrées, plus de vies seront sauvées et de destructions évitées", a-t-il plaidé.
La Russie exclue du Conseil des droits de l'Homme l'ONU
L'Assemblée générale de l'ONU, composée des 193 pays membres, a suspendu jeudi la Russie de son siège au Conseil des droits de l'homme des Nations unies, lors d'un vote qui a recueilli 93 voix favorables. Vingt-quatre pays ont voté contre cette suspension - la deuxième de l'histoire de l'ONU après l'éviction de la Libye en 2011 -, initiée par les Etats-Unis. Et 58 pays se sont abstenus.
Les Etats-Unis estiment que la Russie continue à commettre des "atrocités" en Ukraine "en ce moment même", a déclaré jeudi le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken à l'issue d'une réunion de l'Otan.
"Dernières chances" pour évacuer l'Est
Les jours à venir seront pour les civils de l'Est de l'Ukraine "la dernière chance" d'évacuer la région, ont averti jeudi les autorités locales. "Toutes les villes libres de la région de Lougansk sont sous le feu ennemi", a averti son gouverneur, Serguiï Gaïdaï, indiquant que les Russes "étaient en train de couper toutes les voies possibles de sortie". Le nouvel appel à évacuer concerne toute la zone du Donbass, ainsi que la région voisine de Kharkiv, et notamment la ville de Severodonetsk, la plus à l'est tenue par les forces ukrainiennes, régulièrement pilonnée par les forces russes.
Sanctions américaines, du G7et de l'UE
Par un vote au Congrès, les Etats-Unis ont officiellement révoqué jeudi le statut commercial de la Russie et du Bélarus, ouvrant la voie à des droits de douane punitifs. Le projet de loi du Congrès exige aussi des Etats-Unis qu'ils appellent à la suspension de la Russie de l'Organisation mondiale du commerce.
Les pays du G7 ont également annoncé jeudi de nouvelles sanctions économiques contre la Russie, dont une interdiction de tout nouvel investissement dans des secteurs clés. L'Union européenne a quant à elle approuvé un embargo sur le charbon russe.
Kiev accuse la Hongrie "d'aider Poutine"
Kiev a accusé jeudi la Hongrie d'"aider Poutine" dans la guerre contre l'Ukraine, au lendemain de déclarations du président Viktor Orban se disant prêt à acheter du gaz russe en roubles, à rebours des autres pays de l'Union européenne. "Si la Hongrie veut vraiment mettre un terme à la guerre, voilà ce qu'elle doit faire: arrêter de détruire l'unité de l'UE, soutenir de nouvelles sanctions contre la Russie, aider militairement l'Ukraine", a fustigé le porte-parole du ministère ukrainien des Affaires étrangères, Oleg Nikolenko. "Et non pas créer des sources supplémentaires de financement pour la machine militaire russe".
La France convoque l'ambassadeur russe
Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a de nouveau convoqué jeudi l'ambassadeur de Russie à Paris, après un tweet jugé "indécent" de l'ambassade sur les exactions commises dans la localité ukrainienne de Boutcha. L'ambassade a diffusé un tweet, depuis retiré, intitulé "plateau de tournage" et accompagné d'une photo montrant un attroupement de journalistes dans ce qui semble être une rue de Boutcha, suggérant que les massacres de civils étaient une mise en scène.
Un enfer
Au moins deux cars affrétés par les autorités ont évacué mercredi quelques dizaines de personnes, pour l'essentiel âgées. Pavlo Kirilenko, gouverneur de la région de Donetsk encore sous contrôle ukrainien, a assuré mercredi que la population commençait à répondre aux appels d'évacuation. "Ils écoutent. La route (pour l'évacuation) est plus empruntée", a-t-il affirmé dans une vidéo postée sur sa page Facebook.
Les autorités ukrainiennes redoutent dans l'est du pays une situation analogue à celle de Marioupol dans le sud, où des milliers de personnes encore bloquées dans cette ville assiégée et bombardée depuis des semaines, vivent un enfer.
Un convoi de sept autobus et d'environ 40 véhicules privés sous protection du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) est arrivé mercredi du sud-est de l'Ukraine à Zaporojie (sud), a constaté une journaliste de l'AFP. "Ceux qui faisaient partie du convoi avaient réussi à fuir Marioupol", a expliqué la Croix-Rouge, dont l'une des équipes chargées d'aider à évacuer les civils avait été "retenue" lundi par la police dans une localité sous contrôle russe, contrainte ensuite de rebrousser chemin.
"Pas d'eau, pas d'électricité"
"Ces gens ont vraiment vécu le pire", a déclaré à l'AFP Lucile Marbeau, porte-parole du CICR. "Nous entendons des gens dire qu'ils ont dû quitter Marioupol à pied. Là-bas, à Marioupol, il n'y a toujours pas de nourriture, pas d'eau, pas d'électricité". "Il y a eu de très gros bombardements. C'est pourquoi nous avons été retardés", a raconté l'une des personnes évacuées, Iryna Nikolaïenko, qui a pu se frayer un chemin hors de cette cité portuaire pendant une pause dans les combats.
"Il y a une semaine, des estimations prudentes faisaient état d'un bilan de 5.000 morts", a écrit mercredi sur la messagerie Telegram le conseil municipal de Marioupol. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a accusé mercredi la Russie de bloquer l'accès humanitaire à Marioupol pour dissimuler les "milliers" de victimes dans cette ville.
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"Je pense que l'une des principales raisons pour lesquelles nous ne pouvons pas faire entrer d'aide humanitaire dans Marioupol est que, tant que tout n'a pas été "nettoyé" par les soldats russes, ils ont peur que le monde voie ce qu'il s'y passe", a déclaré Volodymyr Zelensky dans un entretien avec la chaîne de télévision turque Habertürk.
La Russie a été accusée de "crimes de guerre" après la découverte de dizaines de cadavres dans plusieurs localités près de Kiev, dont Boutcha, après le retrait des forces russes. "Ce qui se passe, ce n'est rien de moins que des crimes de guerre majeurs. Les nations responsables doivent s'unir pour que les responsables rendent des comptes", a dit mercredi le président américain Joe Biden à Washington, en promettant "d'étouffer pour des années" le développement économique de la Russie.
"Dévastatrices"
Les Etats-Unis ont annoncé mercredi une nouvelle volée de sanctions économiques et financières contre la Russie, qu'ils qualifient de "dévastatrices" et qui visent notamment les grandes banques et les filles du président russe Vladimir Poutine. En plus d'interdire tous les nouveaux investissements en Russie, une mesure connue depuis mardi, l'exécutif américain va imposer les contraintes les plus sévères qui soient à l'incontournable banque publique Sberbank et à la plus grande banque privée du pays, Alfa Bank.
Et en Europe, le président du Conseil européen Charles Michel a estimé mercredi que l'UE devrait "tôt ou tard" prendre des sanctions sur le pétrole et le gaz russes. Plusieurs pays européens très dépendants du gaz russe, Allemagne en tête, sont toutefois très réticents à une telle mesure qui pénaliserait lourdement leurs économies.
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Risque de défaut, effondrement du secteur automobile, inflation... Après des semaines de sanctions de plus en plus dures, l'économie russe commence à se fissurer, selon des données publiées mercredi.Pour Timothy Ash, analyste de Blue Bay Asset, "Poutine appauvrit la Russie pour des années". Le conflit ne donne aucun signe d'affaiblissement. L'Otan a discuté du sujet à l'occasion d'une réunion qui s'est ouverte mercredi à Bruxelles des ministres des Affaires étrangères des Etats membres de l'Alliance.
"La guerre peut durer longtemps, plusieurs mois, voire des années. Et c'est la raison pour laquelle nous devons être préparés à un long parcours en ce qui concerne le soutien à l'Ukraine, le maintien des sanctions et le renforcement de nos défenses", a déclaré en ouverture son secrétaire général Jens Stoltenberg.