Une portion d'un viaduc de l'autoroute A10, sur laquelle circulaient une trentaine de voitures et des camions, s'est écroulée mardi à Gênes, dans le nord de l'Italie. Selon un bilan toujours provisoire, communiqué par le ministère de l'Intérieur italien, l'accident a fait au moins 30 morts, et "beaucoup de blessés graves".
Les informations à retenir :
- L'accident a fait au moins 30 morts, selon un bilan toujours provisoire
- Des recherches mobilisant 1.000 pompiers et policiers sont en cours
- Des questions se posent sur la structure, la construction et la maintenance du viaduc
Au moins 30 morts et de nombreux blessés
Un pont partiellement effondré. Les images impressionnantes diffusées par les pompiers et les médias italiens montraient le viaduc en partie effondré, sous une pluie battante, dans une zone industrielle de Gênes. Selon les pompiers, le pont dit Morandi, long de 1.182 mètres, s'est effondré vers 12h. Son effondrement a précipité dans le vide des dizaines de personnes, d'une hauteur de 45 mètres, alors qu'une trentaine de voitures et des poids-lourds circulaient dessus. Plusieurs reconstitutions réalisées à partir de Google Earth 3D donnent un ordre d'idée de la longueur du segment effondré, de quelque 200 mètres :
#pontemorandi#genova#A10
— Mechmaniac (@Mechmaniac77) 14 août 2018
In rosso la parte crollata
Immagini da Google Earth 3D pic.twitter.com/cfiKar078S
Au moins une trentaine de morts. Un bilan provisoire donné en milieu d'après-midi par le ministre de l'Intérieur fait état d'au moins "une trentaine de morts". "Je remercie les pompiers, les secouristes professionnels et bénévoles qui sont intervenus dès la première minute et sont encore en train de creuser et de sauver des vies. Malheureusement, il y a une trentaine de morts confirmés et beaucoup de blessés graves", a déclaré Matteo Salvini, promettant que les responsables allaient "payer, payer tout et payer cher". Arrivé sur place en début de soirée, le chef du gouvernement, Giuseppe Conte, a lui parlé d'un bilan très provisoire de 25 morts et 16 blessés, dont neuf graves. La région de Ligurie a aussi annoncé qu'un blessé était décédé en salle d'opération. Parmi les morts figure un enfant.
Les secours à pied d'oeuvre. A la tombée de la nuit, dans un amas impressionnant de tôles et de blocs de béton de plusieurs tonnes, des centaines de secouristes fouillaient encore les décombres du viaduc, avec l'aide de chiens, à la recherche de survivants. "L'espoir ne cesse jamais, nous avons déjà sauvé une dizaine de personnes sous les décombres, on va travailler 24 heures sur 24", a assuré un responsable des pompiers, Emanuele Giffi. "Les premières victimes de surface ont été évacuées, maintenant il faut rechercher sous les décombres des bâtiments, mais il y a des milliers de tonnes de béton", a rapporté un pompier français venu en renfort, Patrick Villardry. Près de 1.000 pompiers et policiers sont mobilisés.
©VALERY HACHE / AFP
D'après la direction régionale des pompiers de Gênes, l'infrastructure s'est en grande partie écroulée sur des voies ferrées qu'elle croise. L'effondrement du viaduc a effleuré les locaux d'une usine produisant de l'énergie, mais seul le parking semble avoir été touché. L'entreprise était vide à l'approche du 15 août, un jour férié, à l'exception de la présence d'une équipe de maintenance. Un quartier d'habitations voisin a par ailleurs été évacué, par crainte d'une fuite de gaz ou d'un mouvement de terrain.
"Tout le monde paniquait". Dans l'une des voitures tombées dans le vide, Davide Capello, 36 ans, s'en est sorti sans une égratignure. "D'abord j'ai entendu un bruit, puis tout s'est écroulé", a-t-il raconté, encore sous le choc. "J'ai vu la route disparaître, ça a été une énorme frayeur. Je ne sais pas comment ma voiture n'a pas été écrasée." De nombreux automobilistes engagés sur l'A10 ont été coincés aux abords du viaduc, en début d'après-midi, après l’effondrement. "Les gens commençaient à paniquer, tout le monde klaxonnait dans le tunnel", a témoigné sur Europe 1 Mathieu, arrêté à une centaine de mètres de l'accident. "On a eu de la chance."
TÉMOIGNAGE - Gênes : "le pont s'est écroulé juste devant nous"
Structure, construction et maintenance en question
Un pont en consolidation. Selon des experts, le pont Morandi est un ouvrage en béton de la fin des années 1960 qui a connu des problèmes structurels dès sa construction et faisait l'objet d'un coûteux entretien lié en particulier aux fissures et à la dégradation du béton. Selon la société italienne des autoroutes, "des travaux de consolidation étaient en cours sur la base du viaduc", qui faisait l'objet "d'activités constantes d'observation et de vigilance". "Les premières indications sembleraient indiquer que la maintenance avait été faite", a déclaré le ministre des Transports et des Infrastructures, Danilo Toninelli. Le président Sergio Mattarella a lui appelé mardi à "un examen sérieux et sévère des causes" du drame.
Un pont régulièrement critiqué. En 2016, pour le site Ingenieri, le professeur agrégé en structures de béton à la faculté ingénierie de Gênes, Antonio Brencich, expliquait que "le viaduc Morandi a immédiatement présenté plusieurs défaillances de structure, en plus de surcoûts importants de construction". Il évoquait "une erreur d’ingénierie (…) ayant produit un plan de route non horizontal". L'agence italienne Ansa rappelle de son côté qu'un rapport de la société Autostrade rédigé en 2011 faisait état de la "dégradation" du viaduc Morandi, causée par "les bouchons et le volume de trafic" quotidien.
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"S'ils sont bien conçus, ces ouvrages ne sont pas dangereux". Invité d'Europe 1 mardi, l'ingénieur des ponts et chaussées Michel Virlogeux, à qui l'on doit le pont de Normandie et le viaduc de Millau, a tenu à rappeler que, "s'ils sont bien conçus, ces ouvrages ne sont pas dangereux". Et alors que certains avancent l'hypothèse de la foudre, qui serait tombée sur le viaduc avant qu'il s'effondre, Michel Virlogeux pense à une autre raison : "Tous les grands ponts internationaux sont surveillés de très près, on met en place un monitoring qui ne permet malheureusement pas de tout voir, comme la corrosion."
La France propose son aide
Macron offre le "soutien" de la France. "La France est aux côtés de l'Italie" et "se tient prête à apporter tout le soutien nécessaire", a assuré Emmanuel Macron sur Twitter. "Nos pensées vont aux victimes, à leurs proches et à tout le peuple italien", a écrit le président de la République, qui a posté ce même message traduit en italien.
I nostri pensieri vanno alle vittime, ai loro familiari e a tutto il popolo italiano. La Francia è vicina all’Italia in questa tragedia e rimane pronta ad apportare tutto il sostegno necessario. #Genova#Gêneshttps://t.co/A7YAfnK3AY
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 14 août 2018
Le maire de Nice Christian Estrosi a annoncé mardi que des renforts matériels, comme des engins de déblaiement, étaient prêts à être mis à disposition des sauveteurs italiens, et que les hôpitaux niçois sont prêts à accueillir et à prendre en charge les blessés. De même, la mairie de Cannes a indiqué être "à la disposition des autorités transalpines si des moyens de secours sont nécessaires". "En signe de solidarité", les drapeaux de l'Hôtel de ville de Cannes et du château de la Castre où sera hissé celui de l'Italie, seront en berne toute la journée de mercredi.