Les États-Unis, la France et le Royaume-Uni ont déclenché des frappes dans la nuit de vendredi à samedi contre le régime de Bachar al-Assad, accusé d'attaques chimiques sur des civils. La Russie, alliée de longue date du président syrien, a condamné une "agression" du camp occidental.
Les principales informations à retenir
- La France, le Royaume-Uni et les États-Unis ont mené des frappes en Syrie, en représailles à une attaque chimique attribuée au régime de Bachar al-Assad
- Trois sites ont été ciblés par la coalition, un à Damas et deux près de Homs, parmi lesquels un complexe chimique
- La Russie a échoué à faire condamner les frappes lors d'un vote à l'ONU
Que s'est-il passé cette nuit ?
"J'ai ordonné aux forces armées des États-Unis de lancer des frappes de précision sur des cibles associées aux capacités du dictateur syrien Bachar al-Assad en matière d'armes chimiques", a lancé Donald Trump depuis la Maison-Blanche, dans la nuit. Au moment même où le président américain s'exprimait, des détonations étaient entendues à Damas. Plusieurs explosions successives ont été entendues suivies par des bruits d'avions tandis que des colonnes de fumée s'élevaient du nord-est de la ville.
Décollage, cette nuit, des forces armées françaises qui interviennent contre l’arsenal chimique clandestin du régime syrien. Déclaration du Président de la République @EmmanuelMacron : https://t.co/HNSK0FmZIOpic.twitter.com/DEAW7R50aC
— Élysée (@Elysee) 14 avril 2018
Tir d’un missile de croisière naval depuis une de nos frégates multimissions cette nuit en Méditerranée. Objectif : un site de production d’armes chimiques du régime syrien. pic.twitter.com/A4hO0EtkvQ
— Florence Parly (@florence_parly) 14 avril 2018
Tôt ce matin, l'Elysée a également communiqué sur ces frappes. Depuis Paris, Emmanuel Macron a souligné que les frappes françaises étaient "circonscrites aux capacités du régime syrien permettant la production et l'emploi d'armes chimiques". "Nous ne pouvons pas tolérer la banalisation de l'emploi d'armes chimiques", a-t-il martelé.
Le général Joe Dunford, chef d'état-major américain, a précisé qu'aucune autre opération militaire visant la Syrie n'est prévue à ce stade. Mais le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a prévenu samedi qu'"il y aurait une autre intervention" militaire en cas de nouvelle attaque chimique en Syrie. Les Etats-Unis sont "prêts à dégainer" à nouveau en cas de nouvelle attaque chimique en Syrie, a également assuré samedi au Conseil de sécurité l'ambassadrice américaine à l'ONU, Nikki Haley.
Quels sites ont été visés ?
Selon le général Joe Dunford, les forces occidentales ont visé samedi à 1 heure trois cibles liées au programme d'armement chimique syrien, l'une près de Damas et les deux autres dans la région de Homs, dans le centre de la Syrie. Plus de 100 missiles de croisière, ainsi que des bombes guidées laser, ont été lancés. Selon le général Dunford, les alliés ont pris soin d'éviter de toucher les forces russes. Moscou a confirmé qu'aucune frappe n'avait visé les abords de ses bases aérienne et navale situées dans le nord-ouest du pays.
Les frappes ont visé "le principal centre de recherche" et "deux centres de production" du "programme clandestin chimique" du régime, selon la ministre française des Armées Florence Parly. La France a participé aux tirs contre les deux sites dans la région de Homs, mais pas à ceux près de Damas. Les forces françaises ont frappé seule l'entrepôt de stockage d'armes chimiques, et étaient aux côtés du Royaume-Uni et des Etats-Unis pour attaquer la très grande unité de production d'armes chimiques.
La France a engagé pour ces frappes cinq frégates, un pétrolier ravitailleur, ainsi que quatre Mirage 2000, cinq Rafale, deux avions de détection AWACS, et six avions ravitailleurs. Selon nos informations, le raid aérien français serait parti de la base de Saint-Dizier, en Haute-Marne, et non des bases françaises avancées au Proche-Orient.
Quel bilan pour ces frappes ?
Selon l'armée russe, les frappes n'ont fait "aucune victime" civile ou militaire syrienne. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), les installations visées étaient des antennes du Centre d'études et de recherches scientifiques de Syrie (CERS) rattaché au ministère de la Défense, "complètement vides" et "évacuées" depuis plus de trois jours.
Les États-Unis ont de leur côté affirmé avoir "frappé avec succès" toutes les cibles syriennes prévues par Washington et ses deux alliés. Sur BFMTV, Jean-Yves Le Drian a indiqué qu'"une bonne partie de l'arsenal chimique" du régime "a été détruite".
Comment ont réagi la Syrie et ses alliés ?
Le régime syrien a jugé que cette opération militaire constituait une violation "flagrante" du droit international et était "vouée à l'échec". Le régime syrien a dénoncé samedi une "agression barbare et brutale" des Occidentaux.
La Russie, soutien indéfectible du régime de Damas, a vivement réagi, d'abord par la voix de son ambassadeur aux États-Unis, Anatoli Antonov. "Nos mises en garde n'ont pas été entendues", a-t-il estimé, jugeant que ces frappes étaient une "insulte" au président Vladimir Poutine. La Russie, qui a demandé une réunion du conseil de sécurité de l'ONU, a cependant échoué à faire adopter une résolution condamnant les frappes, ne recueillant pas les 9 voix nécessaires à son approbation.
L'Iran a de son côté violemment dénoncé les frappes et averti des "conséquences régionales". Le guide iranien Khamenei a qualifié de "criminels" Donald Trump, Emmanuel Macron et Theresa May.
Qu'en dit le reste de la communauté internationale ?
Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a soutenu l'opération, tout comme la chancelière allemande Angela Merkel, qui a jugé l'intervention "nécessaire et appropriée". Donald Tusk, président du Conseil européen, a pour sa part déclaré que l'Union européenne "se tiendra aux côtés de ses alliés". Les frappes ont été jugées "appropriées" par la Turquie et "justifiées" par Israël. L'Otan leur a apporté son "soutien", estimant qu'elles vont réduire la capacité du régime à mener d'autres attaques chimiques.
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a lui appelé samedi tous les États membres "à faire preuve de retenue" et à s'abstenir de tout acte qui pourrait "conduire à une escalade" après les frappes occidentales contre la Syrie.