La Russie a suspendu samedi l'accord sur les exportations de céréales des ports ukrainiens, vitales pour l'approvisionnement alimentaire mondial, après une attaque de drones ayant visé ses navires en Crimée annexée, que Moscou a imputé à l'Ukraine et à la Grande-Bretagne. L'accord céréalier, conclu en juillet sous égide de l'ONU et de la Turquie, avait permis l'exportation de plusieurs millions de tonnes de céréales coincées dans les ports ukrainiens depuis le début du conflit en février. Ce blocage avait provoqué une flambée des prix alimentaires, faisant craindre des famines.
"La Turquie n'a pas été officiellement notifiée" par la Russie de son retrait de l'accord international sur les exportations de céréales, dont elle est un des garants avec les Nations unies, a indiqué samedi à l'AFP une source sécuritaire. L'accord signé le 22 juillet à Istanbul, avec la Russie et l'Ukraine et qui a permis d'exporter plus de neuf millions de tonnes de céréales et produits agricoles est supervisé depuis un centre de coordination conjointe (JCC) installé également dans la mégapole turque.
>> LIRE AUSSI - L'armée russe accuse l'Ukraine et la Grande-Bretagne de l'attaque de drones sur sa flotte en Crimée
Des sanctions lourdes de conséquences
Le président russe Vladimir Poutine a multiplié les critiques envers cet accord ces dernières semaines, soulignant que les exportations de la Russie, autre producteur céréalier majeur, souffraient à cause des sanctions. Moscou a justifié cette suspension par une attaque de drones massive qui a visé samedi matin des navires militaires et civils de la flotte russe de la mer Noire stationnés dans la baie de Sébastopol, en Crimée annexée.
"Compte tenu de l'acte terroriste réalisé par le régime de Kiev avec la participation d'experts britanniques contre des navires de la flotte de la mer Noire et des navires civils impliqués dans la sécurité des couloirs céréaliers, la Russie suspend sa participation à la mise en œuvre de l'accord sur les exportations des produits agricoles des ports ukrainiens", a annoncé le ministère russe de la Défense sur Telegram.
Face à ces accusations, la Défense britannique a réagi en dénonçant de "fausses informations" destinées à "détourner l'attention", tandis qu'un responsable ukrainien a suggéré qu'une "manipulation négligente d'explosifs" par les forces russes était à l'origine de l'incident.
Un "faux prétexte" pour l'Ukraine
L'Ukraine a dénoncé le "faux prétexte" de l'attaque en Crimée utilisé par la Russie pour justifier la suspension de l'accord sur les exportations de céréales, appelant à faire pression pour que Moscou "respecte ses obligations". "Moscou utilise un faux prétexte pour bloquer le couloir céréalier qui assure la sécurité alimentaire de millions de personnes. J'appelle tous les Etats à exiger de la Russie qu'elle mette fin à ses jeux de la faim et qu'elle s'engage à nouveau à respecter ses obligations", a indiqué sur Twitter le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba.
Des réactions internationales
L'ONU a quant à elle appeler à préserver l'accord sur les exportations de céréales après l'annonce russe d'une suspension. "Il est vital que toutes les parties s'abstiennent de toute action qui mettrait en péril l'accord céréalier de la mer Noire", a déclaré dans un communiqué le porte-parole du secrétaire général de l'ONU, Stéphane Dujarric, soulignant que cet accord avait un "impact positif" pour l'accès à l'alimentation de millions de personnes à travers le monde.
Du côté des États-Unis, la porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche Adrienne Watson estime que la Russie se sert de "l'alimentation comme d'une arme, ce qui affecte directement des pays dans le besoin et les prix des denrées alimentaires à travers le monde, et exacerbe des crises humanitaires déjà graves et l'insécurité alimentaire".