Donald Trump n’a toujours pas reconnu sa défaite à l’élection présidentielle américaine. Alors que la période qui précède l’investiture du président élu – prévue le 20 janvier 2021 – est traditionnellement consacrée au passage de flambeau d’une administration à l’autre, l’entourage du milliardaire refuse pour l’heure de collaborer avec celui de son successeur, le démocrate Joe Biden, continuant d’évoquer, sans preuves, des fraudes massives lors du scrutin du 3 novembre dernier.
"Je ne connais pas d’autre pays avec une transition aussi longue et un changement de personnel aussi important", explique au micro d’Europe 1 Robert Malley, président de l’ONG International Crisis Group et ancien membre du Conseil national américain de sécurité sous Barack Obama. En effet, ce sont quelque 4.000 personnes qui doivent changer de poste en janvier, donc d’ici là s’enquérir des arcanes du système exécutif américain, et surtout prendre connaissance des chantiers en cours, dont certains confidentiels. "Là, tout est bloqué puisque le président ne reconnait pas son successeur". Une situation "sans précédent", selon ce spécialiste de la vie politique américaine.
Un président occupé à "savonner la planche" de son successeur
Par ailleurs, Donald Trump continue d’agir comme si son mandat n’était pas sur le point d’expirer, multipliant les décisions sans considération pour l’équipe suivante. "Il est vrai que les présidents sortants peuvent prendre durant cette période des décisions contraires à l’administration qui va suivre, mais pas à ce point-là", relève Robert Malley. "Le président Trump a utilisé ses pleins pouvoirs d’une manière [légale] mais pour savonner la planche de son successeur, par exemple en imposant des sanctions hebdomadaires contre l’Iran, ce qui devrait compliquer la tâche de Joe Biden pour renouer des liens diplomatiques avec Téhéran", pointe notre spécialiste.
Pour Robert Malley, le Républicain ne cherche pas seulement à consolider son héritage, mais à rester coûte que coûte au centre du jeu politique, en donnant l’impression à son électorat que son mandat n’est pas terminé, ou du moins que celui de Joe Biden a été usurpé. "Il veut faire croire, au moins à ceux qui l’ont soutenu, qu’il n’a jamais perdu, que Joe Biden n’a pas été élu légitimement, et que durant les quatre années à venir il faudra se battre pour reprendre la présidence légitime qui lui aurait été arrachée", analyse le président d’International Crisis Group.