Près de 100 personnes ont été tuées depuis le début mardi d'un mouvement de contestation en Irak, et 4.000 ont été blessées dans la capitale et le sud du pays, a indiqué samedi la Commission gouvernementale des droits de l'homme irakienne. La plupart des victimes sont des manifestants mais au moins six policiers figurent parmi les morts.
Un leader chiite réclame la démission du gouvernement
Le très influent leader chiite irakien Moqtada Sadr a réclamé vendredi la démission du gouvernement, faisant monter davantage la pression sur le pouvoir. Cet appel d'un poids lourd de la politique irakienne risque de mobiliser ses très nombreux partisans qui pourraient se joindre aux manifestations à Bagdad et dans plusieurs villes chiites du sud du pays, contre la corruption, le chômage et la déliquescence des services publics. "Pour éviter davantage d'effusion de sang irakien, le gouvernement doit démissionner et des élections anticipées doivent se tenir sous supervision de l'ONU", a indiqué dans une lettre diffusée par son bureau Moqtada Sadr, un ex-chef de milice redouté devenu ces dernières années le héraut des manifestations anticorruption.
Sa coalition, qui avait remporté en 2018 les élections législatives, constitue le premier bloc au Parlement et participe avec quatre ministres au gouvernement. Le retrait en 2018 de son soutien au Premier ministre de l'époque, Haider al-Abadi, après un mouvement social, avait empêché ce dernier d'être reconduit à son poste.
Des "snipers non identifiés" accusés d'avoir tiré sur les manifestants
Selon les observateurs, les manifestants descendus dans la rue spontanément mardi et qui se disent sans aucune affiliation politique devraient rejeter toute récupération politique de leur mouvement par des partisans de M. Sadr. Pour le quatrième jour consécutif, les Irakiens ont manifesté à Bagdad et dans plusieurs régions du Sud malgré un couvre-feu décrété jeudi, un blocage d'Internet et un énorme déploiement sécuritaire. De violents affrontements ont opposé à Bagdad des forces anti-émeutes à des manifestants. Des tirs nourris ont résonné toute la journée dans la capitale irakienne et se sont poursuivis dans la nuit mais de manière sporadique, selon des journalistes de l'AFP sur place.
Les députés irakiens ont dit qu'ils consacreraient leurs réunion samedi à "l'étude des demandes des manifestants". Leur président, Mohammed al-Halboussi, a déclaré que si les demandes des manifestants n'étaient pas satisfaites rapidement, il "rejoindrait" le mouvement de contestation. Pour la première fois, les forces de sécurité ont accusé, sans autre précision, des "snipers non identifiés" d'avoir tiré sur les manifestants et sur leurs membres à Bagdad. Les autorités accusent des "saboteurs" d'infiltrer les manifestations. La majorité des manifestants tués ont été touchés par des balles réelles, selon des sources médicales qui ne précisent pas l'origine des tirs.
Le mouvement touche, outre Bagdad, les provinces de Najaf, Missane, Zi Qar, Wassit, Diwaniya, Babylone et Bassora. Pour le moment, les régions principalement sunnites dans le Nord et à l'ouest de Bagdad n'ont pas connu de manifestations. La région autonome du Kurdistan non plus.