À 48 ans, Amy Coney Barrett est très appréciée par les conservateurs en raison de ses valeurs religieuses traditionalistes qui, selon ses détracteurs, orientent sa lecture du droit. Religieuse, contre l'avortement et favorable au port d'arme, elle a été nommée à la Cour suprême samedi par le président Donald Trump. Un moyen de galvaniser ses troupes ? "C'était exactement son intention quand il l'a présenté hier", répond Nicole Bacharan. "Donald Trump a directement fait appel à ses électeurs en disant que la juge Amy Coney Barrett aurait à cœur de protéger le droit de porter des armes, la loi et l'ordre et la liberté religieuse", explique la politologue spécialiste des Etats-Unis, invitée du journal de la mi-journée sur Europe 1.
"Donald Trump envoie un message à ses électeurs et leur dit : 'venez voter la possible interdiction de l'avortement'"
"Sachant que la liberté religieuse, c'est le nom de code pour dire 'anti-avortement et anti-mariage gay, il envoie un message à ses électeurs et leur dit : 'venez voter la possible interdiction de l'avortement ou sa très grande restriction : c'est à portée de main'", précise-t-elle. Mais cette séduction du camp conservateur et des fanatiques du Parti républicain pourrait à contrario galvaniser le camp démocrate.
"On voit que les fonds de campagne affluent chez les démocrates parce que beaucoup de femmes, qui ne sont pas forcément des démocrates passionnées, ont très peur de voir une juge comme Amy Coney Barrett décider de leur santé et de leurs décisions les plus intimes", explique Nicole Bacharan.
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Les démocrates se sont mis en ordre de bataille
Depuis samedi, l'opposition à la nomination d'Amy Coney Barrett se mobilise. Joe Biden, candidat démocrate à la présidentielle, a immédiatement appelé le Sénat à ne pas confirmer cette nomination avant le scrutin du 3 novembre. Mais la haute chambre américaine est à sa majorité acquise au locataire de la maison blanche, ce qui ne laisse planer aucun doute sur la confirmation à son poste d'Amy Coney Barrett dans les prochaines semaines. Surtout que tout est légal : Donald Trump a le droit de nommer avant l'élection une juge à une place vacante de la Cour suprême.
In the middle of a pandemic, Donald Trump is trying to force through the confirmation of a Justice who will help him destroy Obamacare.
— Joe Biden (@JoeBiden) September 26, 2020
Health care is at stake. Protections for pre-existing conditions are at stake.
We can't let them win. pic.twitter.com/zIdPmxzYtQ
"Toute la procédure, en temps normal, prend environ deux à trois mois. Là, ça va être bouclé en moins de trois semaines !"
"J'ai envie de dire qu'on est à la limite de l'illégal", répond Nicole Bacharan. "Certes, la procédure va être suivie, mais avec un tel forcing dans le temps que ça en devient franchement malhonnête", déplore la politologue. "Normalement, une procédure de confirmation est très longue : on laisse le temps aux sénateurs d'étudier toutes les décisions, tous les écrits de la candidate, du temps pour l'interroger en commission. On laisse aussi du temps pour faire venir des témoins. Ce n'est qu'après qu'il y a un vote en commission puis un vote ensuite du Sénat tout entier. Toute la procédure, en temps normal, prend environ deux à trois mois. Là, ça va être bouclé en moins de trois semaines !"
Car Donald Trump veut absolument qu'Amy Coney Barrett soit intronisée avant le 3 novembre. Pourquoi ? "Il l'a dit clairement : pour qu'il y ait à la Cour suprême une majorité en sa faveur afin de lui donner l'élection si le résultat lui était défavorable et que des recours arrivaient devant la plus haute juridiction du pays", soutient Nicole Bacharan.