La campagne du second tour s'achève samedi au Brésil par plusieurs rassemblements de soutien aux deux finalistes : le président sortant d'extrême droite Jair Bolsonaro et le candidat de la gauche Luiz Inacio Lula da Silva, en tête des sondages avant le vote dimanche. Jair Bolsonaro, 67 ans, prend une nouvelle fois la tête d'un cortège de motards à Belo Horizonte, capitale du Minas Gerais (sud-est), la deuxième plus grande circonscription électorale du pays après Sao Paulo.
"Je suis sûre qu'il va gagner", a déclaré à l'AFP Fabricia Alves, 36 ans, micro-entrepreneur qui attendait l'arrivée du président avec d'autres supporters habillés en vert et jaune, aux couleurs du drapeau du Brésil. Elle dit soutenir le président sortant pour sa politique économique et "pour les valeurs" de la famille qu'elle considère comme non négociables : "je ne suis pas favorable à l'avortement ou à l'idéologie du genre, qui est ce que l'autre parti veut imposer à notre pays", a-t-elle déclaré.
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Dans un pays où l'interruption volontaire de grossesse n'est autorisée que dans de rares cas extrêmes, Lula a pourtant répété, et encore récemment devant des responsables d'églises évangéliques, qu'il était "personnellement contre l'avortement". Mais les fausses informations sur les réseaux sociaux ont émaillé toute la campagne souvent ordurière, pleine de coup bas.
Un dernier débat virulent
Vendredi lors du denier débat télévisé à couteaux tirés où ont fusé les invectives ("bandit", "déséquilibré"), les deux protagonistes se sont accusés mutuellement de "mentir" au détriment des expositions de projets concrets pour les quatre années de mandat en jeu au scrutin de dimanche. "Un anti-débat, sans la moindre nouveauté qui puisse changer la donne", a estimé le chroniqueur politique Otavio Guedes sur la chaîne Globonews.
Selon le sondage de l'institut de référence Datafolha publié jeudi, Lula est en tête de quatre à six points (53%-47%). Une ultime enquête samedi donnera la tendance la veille du vote. Mais les enquêtes d'opinion avaient été pointés du doigt à l'issue du premier tour le 2 octobre pour ne pas avoir anticipé l'écart resserré entre les deux candidats qui se honnissent : 48% pour Lula contre 43% pour Bolsonaro.
Reste à savoir comment réagiront les électeurs de Bolsonaro en cas de défaite de leur candidat. Flavio, électeur de Lula, s'attend à une réaction hostile. "Je suis presque sûr que ça va arriver, mais ça ne me décourage pas et ça ne va pas m'empêcher de sortir dans la rue pour fêter et célébrer la victoire."
Une présidentielle décisive pour le Brésil
Lula, qui, à tout juste 77 ans, cherche à revenir au pouvoir après avoir dirigé la première économie d'Amérique latine entre 2003 et 2010, avant d'être emprisonné pendant 18 mois pour corruption, va effectuer à Sao Paulo une "marche de la victoire". "Le Brésil a besoin d'un gouvernement qui s'occupe à nouveau de notre peuple, en particulier de ceux qui en ont le plus besoin. Il a besoin de paix, de démocratie et de dialogue", a écrit Lula dans une lettre aux électeurs, dans laquelle il s'en prend au pays de "la haine, du mensonge, de l'intolérance" qu'incarne, selon lui, Bolsonaro.
Dans la dernière ligne droite, Jair Bolsonaro s'est félicité de la lente reprise de l'activité, avec la récente baisse de l'inflation et la diminution du chômage qui s'élevait à 8,7% en septembre. Et "ceci avec une pandémie et une guerre qui affecte toute l'économie mondiale (...) Il y a encore beaucoup à faire", a-t-il écrit sur son compte Twitter. Dimanche, quelque 156 millions de Brésiliens sont appelés à voter dans les 26 États du pays et le district fédéral. Au premier tour, environ 32 millions (21%) ne se sont cependant pas déplacés. Ces abstentionnistes sont un des enjeux de ce second tour car seulement 6 millions de voix séparaient les deux finalistes au soir du 1er tour.
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Le vote est obligatoire au Brésil mais l'amende de 3,5 réais, environ 0,50 euro, est peu dissuasive. Le décompte final des voix pourrait être serré et accroître la tension et la polarisation dans le pays. En cas de défaite dans les urnes, les partisans de Jair Bolsonaro pourraient, selon les experts, manifester des réactions violentes, à l'image de l'invasion du Capitole à Washington après la défaite de Donald Trump à la présidentielle américaine, en janvier 2021.
L'ex-président américain a d'ailleurs apporté son soutien au candidat Bolsonaro qu'il surnomme le "Trump des tropiques", "un grand et respecté dirigeant" qui "se trouve aussi être un type super avec un très grand cœur". Sur son propre réseau Truth social, il a fustigé son adversaire qu'il surnomme 'Lulu', un "cinglé de la gauche radicale qui va rapidement détruire votre pays et les immenses progrès réalisés sous le président Bolsonaro".
Vendredi à l'issue du débat interrogé s'il accepterait une éventuelle défaite, Jair Bolsonaro a cependant déclaré que "celui qui a le plus de voix gagne". "C'est la démocratie".