Ils veulent oublier un temps la pression russe, retrouver un semblant de vie normale, près d'un an après le début de la guerre. À 40 kilomètres du front de Bakhmout, à l'est de l'Ukraine, Kramatorsk se transforme progressivement en ville de garnison et abrite une sorte de lieu de refuge pour les militaires en repos ou en permission. L'endroit, également fréquenté par quelques civils, doit être tenu secret pour des raisons de sécurité. Le temps d'un repas ou d'un café, les soldats y retrouvent une atmosphère apaisante. Europe 1 s'est rendue sur place.
De la normalité dans un quotidien de guerre
Les vastes banquettes noires ceinturent les tables de bois clair, au fond de l'établissement, une cheminée offre sa chaleur. Des vapeurs de chicha s'élèvent, troublant de leur nuage l'éclairage tamisé. De son côté, le pizzaiolo s'affaire. De la normalité, décrit l'envoyé spécial d'Europe 1 sur place, mais les clients sont en treillis, parfois armés d'une kalachnikov, d'un fusil de précision ou d'un revolver à la ceinture.
Une brutalité avec laquelle contraste des instants de douceur : des mains qui se serrent, des corps qui se rapprochent, des baisers échangés avec les femmes ou les petites amies. Parfois, ce sont des tablées plus graves, des visages fermés qui entament une discussion sur la dernière bataille vécue. Les serveuses s'affairent en apportant eau, café, thé ou un jus de fruit macéré local alors que l'alcool est banni. Les bouteilles de mousseux ne servent qu'à la décoration. Les bons moments sont courts comme une illusion. Le service s'arrête à partir de 19h30 et le lieu ferme un peu avant 20 heures. Dehors, il fait nuit noire, la ville est morte. C'est bien la guerre qui dirige la vie à Kramatorsk.