Grèce : vers la faillite ?

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CRISE DE LA ZONE EURO - Les membres de la zone euro n’écartent plus le scenario d’un défaut de paiement grec.

Simple moyen de faire pression sur Athènes ou constat d’un dialogue de sourd qui dure depuis cinq mois et n’aboutira à rien ? Pour la première fois depuis 2012, l’idée d’un naufrage grec refait surface. Et ce n’est pas une fuite qui le laisse penser puisque ce sont les négociateurs européens qui l’ont publiquement affirmé vendredi: un défaut de paiement d’Athènes est désormais un scénario sur lequel planchent les membres de la zone euro. En clair, il est désormais envisagé que la Grèce ne rembourse jamais ses dettes.

L’alerte : "un défaut est en discussion". Les pays de la zone euro ne se retrouvent que jeudi prochain à  Bratislava pour évoquer le dossier grec, mais les équipes de chaque Etat se sont déjà réunis vendredi pour préparer cette rencontre. Une réunion a priori technique mais qui a pris une tout autre tournure après les déclarations de plusieurs sources européennes.

"Les créanciers et les Etats membres ont décidé de commencer à envisager les conséquences d'un non-remboursement de (la dette de) la Grèce et au-delà", a prévenu une source européenne, avant d’ajouter : "un défaut (de paiement grec) est en discussion". Un sombre scénario qu’a confirmé une autre source : "c'est pour se préparer au pire des scénarios. Les Etats membres voulaient savoir ce qu'il en était".

Qu’est-ce qu’un défaut de paiement ? Un défaut de paiement de la Grèce signifierait qu’Athènes ne serait plus en mesure de régler ses factures et donc de rembourser tout ou partie de ses dettes. Un scenario pas si irréaliste : Athènes n’a plus d’argent et s’est fait prêté 240 milliards d’euros depuis le début de la crise alors que son PIB annuel n’était que de 182 milliards d’euros en 2013. La Grèce doit donc 1,3 fois plus que ce qu’elle gagne en une année, elle aura donc les plus grandes peines du monde à rembourser, surtout si elle ne réduit pas drastiquement ses dépenses et que son économie reste atone comme c’est le cas actuellement. Attention cependant, un défaut de paiement n’entraînerait pas forcément une sortie de la zone euro : le reste de l’Europe aurait trop à y perdre et pourrait trouver un régime spécial pour permettre à la Grèce de rester dans la zone euro sous un régime spécial et avec certaines limites.

Quelles conséquences ? Pour la Grèce, un défaut provoquerait un saut dans l’inconnu : certes, Athènes serait débarrassée de ses dettes mais plus personne ne lui ferait confiance. Emprunter à nouveau de l’argent sur les marchés sera donc quasi-impossible, où alors à des taux d’intérêt prohibitifs, et il n’est pas sûr que les Etats européens et la BCE soient davantage enclins à lui faire de nouveaux prêts.

Selon l’état des réserves financières grecques, Athènes pourrait même ne plus pouvoir payer les pensions, les fonctionnaires, etc. Un scénario qui provoquerait une ruée vers les banques, les Grecs tentant de retirer leurs économies. Face à ce risque d’une fuite des capitaux, la Grèce pourrait être alors amenée à instaurer un contrôle des capitaux.

Le reste de l’Europe serait, lui aussi, impacté. D’abord par l’argent qu’il a prêté à Athènes et qu’il ne reverrait pas. A titre d’exemple, la France a prêté environ 40 milliards d’euros à la Grèce.  Ensuite, parce que le cours de la monnaie européenne serait, lui aussi, malmené : l’euro serait considéré comme moins sur et perdrait de sa valeur, une évolution qui ne serait pas si mauvaise pour nos exportations mais augmenterait le prix des biens que les Européens importent (pétrole, gaz, électronique, etc.).

Les marchés anticipent déjà le pire. Sans surprise, cette annonce a eu un effet immédiat sur les marchés financiers, où le jeu consiste à anticiper avant les autres ce qu’il risque d’arriver. Résultat, les investisseurs ont massivement vendu leurs actions grecques, provoquant une chute brutale de la Bourse d’Athènes : cette dernière a clôturé vendredi en chute de 5,92%. Pour les banques grecques, la chute est encore plus brusque : - 11% en une seule journée.

La zone euro étant très intégré, ce décrochage a eu des répercussions sur les autres places boursières : Paris (-1,41%), Francfort (-1,2%) ou encore Londres (-1,20%) ont terminé dans le rouge.

Un nouveau round imprévu organisé samedi. Engagée dans une partie de poker menteur avec ses créanciers, Athènes n’a pas tardé à réagir : le gouvernement a annoncé dans la foulée que des "représentants du Premier ministre" avaient rendez-vous samedi à Bruxelles pour renouer le dialogue. Et qu'ils venaient avec des "contre-propositions". Cette visite imprévue ne signifie pas pour autant qu'un accord est proche. Depuis son arrivée au pouvoir, Alexis Tsipras alterne le chaud et le froid pour tenter d'obtenir le meilleur accord possible, quitte à froisser ses partenaires européens. Il n'a ainsi pas hésité pas à demander à ses équipes de quitter précipitamment la table des négociations jeudi pour marquer son désaccord.