L'opposant Juan Guaido, reconnu par une cinquantaine de pays comme président intérimaire du Venezuela, a averti dimanche les militaires qu'empêcher l'entrée de l'aide humanitaire faisait d'eux des "quasi génocidaires". C'est un "crime contre l'humanité", a-t-il affirmé. "Il y a des responsables et que le régime le sache. C'est un crime contre l'humanité, messieurs de l'armée", a déclaré à la presse l'opposant au président Nicolas Maduro, en sortant de la messe à Las Mercedes, quartier de l'est de Caracas, avec son épouse Fabiana Rosales et leur bébé de 20 mois.
Plusieurs tonnes d'aliments et de médicaments bloqués. Juan Guaido, 35 ans, chef du Parlement où l'opposition est majoritaire, a affirmé que les militaires se convertissent en "bourreaux", en "quasi génocidaires" quand "ils empêchent l'aide humanitaire" d'entrer au Venezuela. Il a de nouveau appelé à une marche mardi en mémoire des morts de précédentes mobilisations - une quarantaine depuis le 21 janvier, selon l'ONU - et pour exiger l'entrée de l'aide. Plusieurs tonnes d'aliments et de médicaments, envoyées des États-Unis, sont stockées depuis jeudi dans des entrepôts en Colombie, près du pont international de Tienditas, barré par les militaires.
Nicolas Maduro affirme que l'"urgence humanitaire" est "fabriquée depuis Washington" pour "intervenir" au Venezuela. Il qualifie l'envoi de l'aide de "show politique" et attribue la responsabilité de la pénurie d'aliments et de médicaments aux sanctions des États-Unis. "Je comprends que le régime se refuse à admettre la crise qu'eux-mêmes ont générée. Mais nous, les Vénézuéliens, travaillons très dur pour que cesse l'usurpation (du pouvoir par Nicolas Maduro) et répondre à cette urgence", a déclaré Juan Guaido devant de nombreux journalistes et partisans.
Pénuries et hyperinflation. Le Venezuela, ancienne puissance pétrolière confrontée à la pire crise de son histoire, souffre de pénuries et d'hyperinflation. Environ 2,3 millions de Vénézuéliens ont émigré depuis 2015, selon l'ONU. L'armée, pilier du gouvernement de Nicolas Maduro, a commencé dimanche des exercices militaires, prévus jusqu'au 15 février, afin de "renforcer la capacité défensive du territoire", selon un communiqué.
"Nous sommes un peuple pacifiste, mais que personne ne nous embête (…) Dehors Donald Trump du Venezuela ! Dehors ses menaces ! Il y a ici des forces armées et il y a le peuple pour défendre la patrie", a lancé le président Maduro aux soldats participant à ces manœuvres. "Je déplore ce par quoi on fait passer notre force armée. Cela dépend de vous (…) Nous avons clairement énoncé le dilemme, nous vous donnons un ordre : 'Permettez l'entrée de l'aide humanitaire'", a plaidé de son côté Juan Guaido, à l'adresse des militaires.
"Loyauté absolue". En posant ce "dilemme" et en proposant une amnistie, il tente de briser le principal soutien du président socialiste, auquel l'état-major a réitéré une "loyauté absolue". L'opposant a en outre affirmé que des centaines de bénévoles s'étaient inscrits ce week-end pour aider au processus "complexe" d'entrée de l'aide. "Aujourd'hui, 300.000 Vénézuéliens sont condamnés à mort si l'urgence n'est pas gérée", a-t-il dénoncé.
Une soixantaine de médecins vénézuéliens ont manifesté dimanche à la frontière avec la Colombie pour exiger l'acheminement de médicaments. Pour le Dr. Jose Luis Mateus de la Riva, traumatologue à l'hôpital central de San Cristobal, la situation de la médecine dans son pays est "médiévale", avec des patients amputés faute de médicaments pour traiter une infection. Lors d'un entretien vendredi, le chef du Parlement a averti qu'il ferait "le nécessaire" pour que "cesse l'usurpation" de Nicolas Maduro et pour "sauver des vies", sans écarter l'intervention d'une force étrangère.