L'affaire Khashoggi met visiblement la France dans l'embarras. Dans un contexte d'opacité de Ryad après le meurtre du journaliste saoudien, le ministre allemand de l'Économie a appelé lundi tous ses voisins européens à suspendre leurs ventes d'armes à l'Arabie saoudite. Lorsqu'il lui a été demandé s'il comptait respecter cette consigne, Emmanuel Macron a botté en touche. "Mon agenda n'est pas dicté par les médias", a-t-il lâché lors de sa visite au salon Euronaval du Bourget mardi, afin de justifier sa volonté de ne pas répondre.
"Un choix que l'on peut penser délibéré". Pour Philippe Moreau-Chevrolet, président de MCBG Conseil et professeur de communication politique à Sciences-Po Paris, "il y avait plusieurs manières de répondre à cette question". "Il aurait pu s'en tirer par l'usage de la langue de bois", analyse-t-il au micro d'Elisabeth Assayag et Pierre de Vilno sur Europe 1. Emmanuel Macron aurait ainsi "pu gagner du temps" en expliquant qu'il se laissait le temps de la réflexion et qu'il répondrait plus tard. Au lieu de cela, il a répondu "par l'agression" et "c'est un choix que l'on peut penser délibéré". "C'est une communication à la Trump", observe l'expert.
Emmanuel Macron : "Mon agenda n'est pas dicté par les médias"
— CNEWS (@CNEWS) 23 octobre 2018
Suspendre les ventes d'armes à Ryad ? Macron refuse de répondre https://t.co/bIhEiApBFgpic.twitter.com/CXHjb6fBIe
"Cette agressivité finit par devenir le message". En répondant de la sorte, le chef de l'Etat a voulu "paraître à la fois authentique et en même temps, ne pas répondre", ce qui est un exercice "compliqué". "Cette manière de concilier deux choses qui paraissent totalement inconciliables, c'est de faire du Trump", explique encore Philippe Moreau-Chevrolet. Et dans cette stratégie de communication, "cette agressivité finit par devenir le message" : au-delà des médias, "les auditeurs, les spectateurs, les Français qui sont derrière leur écran, eux aussi vont se sentir agressés".
"Dans l'affaire Benalla, cette attitude l'a clairement desservi." Philippe Moreau-Chevrolet rappelle que "dans l'affaire Benalla, cette attitude l'a clairement desservi". Si les Français "ne s'intéressent pas" à la question de la vente d'armes à l'Arabie saoudite, la stratégie d'Emmanuel Macron peut au contraire s'avérer payante.