Cela faisait sept ans qu'il était réfugié dans l'ambassade d'Équateur, à Londres. Le fondateur de WikiLeaks Julian Assange y a été arrêté jeudi par la police britannique, dans le cadre
Les informations à retenir :
- Julian Assange a été arrêté jeudi matin et inculpé aux États-Unis dans la foulée
- Il comparaît devant un tribunal londonien jeudi après-midi
- Moscou et Snowden le défendent, l'ONU déterminée mais inquiète
Il comparaît devant la justice jeudi après-midi
"Julian Assange, 47 ans, a été arrêté aujourd'hui, jeudi 11 avril, par des agents du service de la police métropolitaine (MPS) à l'ambassade d'Équateur", a annoncé Scotland Yard, expliquant qu'il a été procédé à cette interpellation en vertu d'un mandat de juin 2012 délivré par le tribunal londonien de Westminster, pour non présentation au tribunal, ainsi que d'une "demande d'extradition américaine".
L'Australien a été placé en garde à vue dans un commissariat londonien et sera "présenté au tribunal de Westminster dès que possible". Il comparaît devant la justice britannique jeudi après-midi. Par la voix de sa ministre des Affaires étrangères Marise Payne, l'Australie s'est à cet égard dite "convaincue" qu'il bénéficierait d'un traitement judiciaire équitable au Royaume-Uni. Peu après son arrestation, la justice américaine l'a inculpé* pour "piratage informatique".
Cheveux blancs et barbe hirsute
Apparu vieilli et affaibli, cheveux blancs et barbe hirsute, Julian Assange a été porté hors de la représentation diplomatique équatorienne vers 10h30 heure londonienne (11h30 à Paris) par six policiers habillés en civil jusqu'à un fourgon de police, selon une vidéo de son arrestation filmé par l'agence Ruptly TV. "Le Royaume-Uni doit résister !", s'est-il alors écrié, a raconté l'auteur de cette vidéo.
BREAKING: #Assange removed from embassy - video pic.twitter.com/qsHy7ZVPg5
— Ruptly (@Ruptly) 11 avril 2019
L'arrestation a été confirmée par le ministre britannique de l'Intérieur, Sajid Javid, qui a déclaré sur Twitter que "personne n'est au-dessus des lois", son collègue aux Affaires étrangères Jeremy Hunt estimant quant à lui dans un communiqué que "Julian Assange n'est pas un héros".
Moscou et Snowden dénoncent une atteinte à la liberté, l'ONU inquiète
Cette décision a provoqué un branle-bas de combat chez les soutiens de Julian Assange qui le voient en héraut de la transparence et se sont immédiatement mobilisés, dénonçant la décision de l'Équateur et les conditions de cette arrestation, survenue au sein d'une ambassade. Sur Twitter, WikiLeaks a reproché à ce pays sud-américain d'avoir "illégalement mis fin à l'asile politique d'Assange, en violation du droit international" et d'avoir "invité" la police britannique dans l'enceinte de l'ambassade.
De son côté, Moscou, qui a exprimé à plusieurs reprises sa sympathie pour le fondateur de Wikileaks, a accusé Londres d'"étrangler la liberté", tandis que l'ex-président équatorien Rafael Correa a qualifié son successeur Lenin Moreno de "traître". "C'est un jour sombre pour la liberté de la presse", a aussi commenté Edward Snowden, un ancien consultant de l'Agence nationale de sécurité (NSA) américaine, accusé de haute trahison par les États-Unis et qui vit depuis en exil en Russie.
L'Équateur fait courir à Julian Assange "un risque réel de graves violations de ses droits fondamentaux", a déclaré jeudi la rapporteur de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Agnès Callamard. Le rapporteur spécial des Nations unies pour le droit au respect de la vie privée, Joe Cannataci, qui devait rencontrer Julian Assange le 25 avril à l'ambassade d'Equateur à Londres, a de son côté indiqué aux médias qu'il n'entendait pas annuler son voyage et prévoyait de "lui rendre visite et (de) lui parler dans un poste de police ou partout ailleurs au Royaume-Uni où il pourrait être détenu".
L'Équateur et le Royaume-Uni sur la même longueur d'ondes
Lenin Moreno a défendu sur Twitter le retrait de l'asile accordé à Julian Assange, une décision présentée comme "souveraine" et prise "après ses violations répétées des conventions internationales et des protocoles de la vie quotidienne". Son gouvernement a récemment dénoncé des atteintes répétées de la part de Julian Assange aux règles régissant ses conditions d'asile dans l'ambassade équatorienne. Depuis octobre, Quito appliquait au fondateur australien de WikiLeaks un protocole qui régulait notamment ses visites et ses communications à l'intérieur de la légation et prévoyait aussi que son non-respect impliquerait un retrait du droit d'asile. Lenin Moreno a dit avoir demandé à Londres la garantie que Julian Assange ne serait pas extradé vers un pays où il risque la peine de mort, ce que le gouvernement britannique lui a "confirmé par écrit". Par ailleurs, la nationalité équatorienne lui a été retirée.
Pour la Première ministre Theresa May, "personne n'est au-dessus des lois". Le secrétaire d'État britannique pour l'Europe et les Amériques, Alan Duncan, s'est dit dans un communiqué "très reconnaissant envers le gouvernement équatorien pour l'action qu'il a entreprise" et précisé que l'arrestation faisait "suite à un dialogue approfondi entre nos deux pays". Il a ajouté qu'il appartenait "aux tribunaux de décider de la suite". Les soutiens de l'Australien de 47 ans, naturalisé équatorien en 2017, redoutent qu'il soit extradé vers les États-Unis pour la publication en 2010 sur son site internet de milliers de documents confidentiels du département d'État et du Pentagone.
Réouverture de l'enquête pour viol ?
Julian Assange s'est réfugié dans l'ambassade équatorienne en 2012 pour éviter d'être extradé vers la Suède, où il était accusé de viol, un dossier depuis classé. Mais l'accusatrice de Julian Assange compte demander la réouverture de l'enquête, a déclaré jeudi son avocate à l'AFP. "Nous allons tout faire pour que les procureurs rouvrent l'enquête suédoise et qu'Assange soit remis à la Suède et traduit en justice pour viol", a dit Me Elisabeth Massi Fritz à l'AFP.
Julian Assange a fondé en 2006 WikiLeaks, qui s'est fait connaître du grand public trois ans plus tard avec la diffusion de centaines de milliers de messages de bipeurs envoyés aux États-Unis le 11 septembre 2001. Le site revendique avoir publié "plus de 10 millions de documents" concernant la finance, le divertissement ou la politique.
*Le terme 'inculpé' n'existe plus dans la procédure judiciaire française mais est toujours employé en aux États-Unis. Europe1.fr a choisi de conserver le terme employé par les autorités judiciaires locales.