Charlie Hebdo : année zéro. "Habemus la Une !", s'est réjoui Gérard Biard, le rédacteur en chef de Charlie Hebdo, au micro d'Europe 1 lundi soir, juste après 21 heures, sous les applaudissements. Le journal des survivants, annoncé sur le site de l’hebdomadaire, est presque prêt. Après l’attentat terroriste du mercredi 7 janvier qui a décimé la rédaction de l'hebdomadaire satirique, le magazine sortira bien en kiosque mercredi, après le bouclage de lundi soir. Si l’hebdo ne manquera pas de ressources financières, à quoi ressemblera ce journal privé de ses dessinateurs les plus remarquables ?
"On a entendu des engueulades, puis des éclats rires". Comment faire un journal satirique et humoristique quand plusieurs de vos collègues ont été abattus sous vos yeux ? "Ils sont courageux. Parfois c’est difficile, mais ils prennent sur eux. On les laisse tranquille, mais il y en a qui sont très affectés, qui s’effondrent en larmes. Mais sinon ils travaillent", a confié au micro d'Europe 1 Laurent Joffrin, le patron de Libération, qui accueille Charlie Hebdo dans ses locaux depuis l'attentat. "Ils sont venus il y a deux jours, au bout d’une heure on a entendu des engueulades, puis des éclats rires, donc on s’est dit que ça allait", poursuit Joffrin.
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"On continue comme avant". Et que lira-t-on mercredi dans les pages du numéro 1178 de Charlie Hebdo ? "On s’est posé la question principale : 'qu’est-ce qu’on veut dire , qu’est-ce qu’on doit dire, et de quelle façon on doit le dire ?'. C’est ce qu’on fait tous les lundis. La seule chose qui changeait, c’est que là, on n’avait aucun doute sur le sujet d’actualité qui allait faire la Une. Malheureusement, on n’avait aucun doute", explique Gérard Biard.
"Ne vous inquiétez pas : il y a tout ce qu’on veut en matière de musulmans, de Mahomet etc.", décrivait Laurent Joffrin un peu plus tôt. "C’est un numéro dans le même esprit qu’avant. Leur idée, c’est de dire on continue comme avant. Le message c’est : on ne se laissera pas intimider", conclut le patron de Libé.
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Des dessins de Charb, Tignous, Honoré, Cabu et Wolinski. Pas de numéro hommage, ni nécrologique, avait effectivement annoncé Gérard Biard, le rédacteur en chef de Charlie, dès le 9 janvier, lors de la première réunion de la rédaction au siège de Libé. “Il y aura les rubriques habituelles, il y aura évidemment des pages qui seront consacrées à ce massacre”, avait-il expliqué.
“Dans ce numéro, ils (les terroristes) n’ont tué personne”, avait-il poursuivi, très ému. Les lecteurs pourront donc retrouver les rubriques habituelles de leur journal. Comment ? Des dessins inédits de Charb, Tignous, Honoré, Cabu et Wolinski seront sortis des tiroirs. Même Mustapha, le correcteur, lui-aussi tué par les frères Kouachi, aura sa place. Aucun dessinateur extérieur ne participera donc à ce numéro.
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Des caricatures de Mahomet. Si peu de choses ont filtré sur le contenu du journal, Richard Malka, l’avocat du journal, a néanmoins confié que le numéro de mercredi comportera “évidemment” des dessins sur Mahomet. “L’état d’esprit ‘Je suis Charlie’, cela veut dire aussi le “droit au blasphème”, a-t-il expliqué. Les politiques et toutes les religions ne devraient pas non plus échapper à la caricature.
...Un numéro malgré tout exceptionnel. Malgré cette apparente normalité, le numéro 1178 de mercredi sera bien exceptionnel par ses chiffres. Trois millions d’exemplaires seront imprimés, c’est soixante fois plus que d’habitude. Autre chiffre impressionnant : l’hebdomadaire sera traduit dans 16 langues.