Décrire la surprise d'une révélation familiale sur l'inceste, raconter le traumatisme des victimes, expliquer l'aveuglement de la société à traiter ce phénomène encore tabou : c'est la démarche de Charlotte Pudlowski, auteure de la dernière série de Louie Media, intitulée "Ou peut-être une nuit". Dans cette création, réalisée par Anna Buy et déclinée en six épisodes de 40 minutes, la co-fondatrice du studio de podcasts éclaire une réalité sombre en invitant l'auditeur à écouter la parole des "personnes incestées", comme elle l'explique au micro d'Europe 1, mardi.
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Pour Charlotte Pudlowski, tout démarre lors d'un dîner au restaurant avec ses parents, au début des années 2010. "Il y a huit ans, ma mère m'a dit qu'elle avait été victime d'inceste", raconte la journaliste. "Je ne comprenais pas que, même dans une famille comme ça, aussi propice à laisser émerger les récits, cette parole-là n'a pas pu se faire entendre."
Des victimes, "il y en a partout"
À partir de l'automne 2017, lorsque naît le mouvement #MeToo, Charlotte Pudlowski pousse sa réflexion sur l'inceste encore plus loin. Elle découvre des chiffres effrayants : "Le plus parlant, c'est deux à trois enfants par classe (qui sont victimes d'inceste). C'est 7 à 10% des enfants qui sont victimes d'inceste." Selon une étude Harris Interactive pour l'Association internationale des victimes d'inceste, il y aurait environ 4 millions de personnes qui auraient subi des agressions ou des viols par des personnes de leur famille avant leur majorité. À 98%, ces violences sont le fait d'hommes.
La journaliste retrace auprès de Philippe Vandel un processus "hyper facile" pour mener son travail de recherche de témoignages de victimes : "À partir du moment où j'ai été en alerte, j'en ai vu partout. En fait, il y en a partout", affirme-t-elle, avant d'évoquer les personnes contactées. "C'est une personne qui envoie un mail à Louie et dont on comprend, entre les lignes, que ce qu'elle veut dire par 'histoire traumatique' est une histoire d'inceste. C'est une personne qui m'envoie un message sur Instagram, Julie, pour me dire qu'on n'a jamais parlé d'histoires d'inceste chez Louie. J'avais une amie dont je savais qu'elle avait été victime, que j'avais interviewée pour un autre projet il y a quelques années, donc j'ai décidé de l'interviewer" etc.
"Podcast d'analyse"
"À partir du moment où on chausse les bonnes lunettes" et qu'on se rend compte des chiffres, poursuit Charlotte Pudlowski, "il suffit vraiment d'ouvrir les yeux et les oreilles pour trouver les victimes. Et souvent, elles ont envie de parler." Selon elle, "le podcast était vraiment le meilleur média pour raconter tout ça. À la fois parce que ça permettait de faire entendre cette parole et, pour les auditeurs, parce que ça mime le geste qui, je trouve, devrait être celui de la société d'accepter d'écouter."
Découvrez "Le Son de Vie", le podcast Europe 1 Studio sur la résilience
Comment vit-on après avoir été victime d’un attentat ? Comment se relever après un tel traumatisme ? Comment inventer la vie d’après ? Dans "Le Son de Vie", le nouveau podcast d'Europe 1 Studio, le journaliste Sébastien Guyot a tendu le micro à des hommes et de femmes qui ont avancé pas à pas sur le chemin de la résilience, au rythme de sons, de bruits et de musiques. Découvrez notamment les témoignages de Sigolène Vinson, rescapée de l'attentat de Charlie Hebdo, et de Chloé Verlhac, la veuve du caricaturiste Tignous, assassiné le 7 janvier 2015.
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L'auteure a réalisé plusieurs dizaines d'interviews pour cette série, en donnant également la parole à des experts, comme la psychiatre Muriel Salmona ou l'anthropologue Dorothée Dussy : "Je voulais vraiment qu'on comprenne et que ce soit un podcast d'analyse, sans accumuler les témoignages juste pour pointer la souffrance."