Cinq géants américains du numérique - Alphabet, Amazon, Apple, Meta et Microsoft - ainsi que le chinois ByteDance, propriétaire de TikTok, seront soumis à de nouvelles règles de l'UE plus strictes pour endiguer les pratiques anticoncurrentielles, selon une liste dévoilée mercredi.
Apple "très préoccupé" par les nouvelles règles
Le règlement sur les marchés numériques (DMA) doit modifier profondément les modèles économiques de ces mastodontes, accusés d'évincer la concurrence en abusant de leur position dominante.
Cette législation ouvre un nouveau front entre l'UE et la big tech, avec de nouvelles batailles judiciaires en perspective. TikTok a immédiatement contesté son inclusion dans la liste, se disant "fondamentalement en désaccord" avec la Commission européenne. Apple s'est dit "très préoccupé" par les nouvelles règles, affirmant qu'elles posent des problèmes pour la vie privée et la sécurité des données de ses clients.
Le DMA contraindra par exemple Apple à autoriser d'autres boutiques d'applications que l'Apple Store sur ses célèbres iPhone ou iPad. La Commission a désigné au total 22 plateformes clé appartenant à ces six groupes: quatre réseaux sociaux (TikTok, Instagram, Facebook, LinkedIn), deux messageries instantanées (WhatsApp et Messenger), trois systèmes d'exploitation (Android, iOS, Windows), un moteur de recherche (Google), deux navigateurs (Chrome, Safari). La liste comprend également six services d'intermédiation (Google Maps, Google Play, Google Shopping, Amazon Marketplace, App Store et Meta Marketplace), le site de partage de vidéos Youtube ainsi que les services publicitaires de Google, Amazon et Meta.
Bruxelles veut agir plus vite et plus fort
A l'initiative du texte, les commissaires Margrethe Vestager et Thierry Breton espèrent favoriser l'émergence de start-ups européennes et améliorer les services offerts aux consommateurs.
Après des années à courir après les infractions dans des procédures judiciaires interminables, Bruxelles veut agir plus vite et plus fort. Le DMA impose aux acteurs les plus puissants un carcan d'obligations et d'interdictions à respecter sous peine d'amendes qui pourront atteindre 20% de leur chiffre d'affaires mondial en cas de récidives.
"Les règles du jeu ont changé"
"Nous avons déjà commencé à discuter avec les entreprises qui ont compris que les règles du jeu ont changé", explique Thierry Breton. Il affirme que la Commission européenne, dotée du pouvoir de contrôle et de sanctions, "n'hésitera pas à prendre des mesures fortes".
L'objectif est d'agir avant que les comportements abusifs n'aient déjà détruit la concurrence et engendré un quasi-monopole comme celui de Google dans les moteurs de recherche. Parmi les nouvelles règles, l'UE va imposer l'interopérabilité des services de messagerie visés. Ainsi WhatsApp et Messenger, toutes deux propriété de Meta, devront permettre à leurs utilisateurs de communiquer avec les produits concurrents comme Signal.
Google se verra interdire tout favoritisme
Le règlement s'appliquera à partir du 6 mars à ces firmes désignées mercredi comme des "contrôleurs d'accès" ("gatekeepers"), en raison de leur taille qui les rend incontournables. D'ici là, les groupes concernés devront soumettre un rapport détaillant la manière dont ils se sont mis en conformité.
Quelques règles entrent en vigueur immédiatement. C'est le cas de la nouvelle obligation pour ces plateformes d'informer la Commission de toute opération de rachat, quelle que soit la taille de la cible.
Par ailleurs, Google se verra interdire tout favoritisme envers ses propres services dans les résultats de son moteur de recherche, comme il a été accusé de le faire avec son site de vente en ligne Google Shopping. La nouvelle loi empêchera le géant du e-commerce Amazon d'utiliser les données générées sur ses sites par des entreprises clientes.