"La presse écrite ne va certainement pas disparaître." C'est la conviction d'Étienne Gernelle, directeur de l’hebdomadaire Le Point, invité mercredi de Philippe Vandel, dans Culture Médias, sur Europe 1. "La presse écrite, c'est aussi du numérique : on n'a jamais autant lu de l'histoire de l'humanité. La question, c'est de savoir comment monétiser", théorise le patron de presse. Et c'est là que, potentiellement, les choses se gâtent. Car pour monétiser en ligne, sauf à proposer tous ses articles en payant (quitter à perdre des lecteurs), il faut pouvoir vendre des espaces publicités. Or, sur la toile, le roi incontesté en la matière s'appelle Google. Dans un édito au vitriol publié cette semaine dans Le Point, Étienne Gernelle tire à boulets rouges sur la firme américaine et son monopole dans la recherche sur Internet.
"Faut-il démanteler Google ?", se demande le patron du Point. "Le moteur de recherche profite de son monopole pour piller les journaux. Il piétine la liberté de la presse et, au passage, la France et l'Europe", poursuit-il. Sur Europe 1, il persiste, signe, et retire une salve contre l'entreprise américaine qu'il accuse de "se comporter comme un prédateur". "Les monopoles détruisent de la valeur. Ils usent de la force et à la fin, il ne reste plus rien. Ils se repaissent de la chair de leur victime. Ils captent l'essentiel de la croissance de la publicité numérique", dénonce Étienne Gernelle.
"Le démantèlement, c'est la seule chose qui arrête les monopoles"
La publicité en ligne est bien le nerf de la guerre selon lui. Aujourd'hui, pour trouver un média en ligne, la plupart des internautes passent par Google. Et c'est lui qui perçoit donc une grande partie des revenus publicitaires. "Il se place en situation d'être notre fenêtre sur le monde", déplore le journaliste, qui n'hésite pas à ajouter : "Le démantèlement, c'est la seule chose qui arrête les monopoles".
"L'abus de position dominante figure dans les traités européens. La concurrence, c'est absolument fondamental. Je ne suis pas un altermondialiste, je ne suis pas Olivier Besancenot, je ne suis pas opposé au capitalisme international par principe. Le problème, c'est que le monopole opprime et détruit de la valeur", martèle le journaliste.
Étienne Gernelle est également revenu sur le cas de Mondadori France (Grazia, Closer, Télé Star, Auto Plus, etc.), au sein duquel 220 journalistes (sur 300) ont décidé de quitter le groupe. La raison de ces départs en masse ? Le rachat de tous ces journaux par le groupe français Reworld, parfois accusé de faire des contenus uniquement pour attirer des annonceurs. "C'est tragique, c'est surtout le signe de la paupérisation d'une partie de la presse", estime Étienne Gernelle. Et de marteler : "Il faut défendre notre valeur, et notamment face Google. Tout ça, c'est en partie le résultat de la prédation de Google."