La situation en Libye a occupé une part importante du déplacement d'Alain Juppé au Caire. Le ministre français des Affaires étrangères a affirmé dimanche que l'Europe et la France ne pouvaient "tolérer la folie criminelle" du régime du colonel Mouammar Kadhafi face à l'insurrection libyenne.
Au micro d'Europe 1, Alain Juppé a évoqué la question d'une intervention militaire de l'Otan pour mettre fin au chaos en Libye. "Il faut y réfléchir", a dit le ministre des affaires étrangères sur Europe 1. "Attention de ne pas provoquer une réaction de rejet de l'ensemble des peuples arabes" a-t-il mis en garde. Lors d'une conférence de presse au Caire dimanche, il a précisé son propos. "La France, mais aussi plusieurs de ses partenaires, ne sont pas favorables à une intervention militaire occidentale en Libye qui aurait des effets tout à fait négatifs", a-t-il indiqué.
Empêcher le "bombardement de populations innocentes"
"Si Kadhafi, dans son délire actuel d'utilisation de la violence, franchissait une étape supplémentaire, nous envisageons très sérieusement les modalités d'arrêter ce dérapage de la violence", a cependant indiqué le ministre des affaires étrangères. "Nous allons donner notre accord pour que l'Otan planifie une zone de non-survol de la Libye", afin d'empêcher "le bombardement de populations innocentes", a ajouté Alain Juppé.
"Ne pas provoquer une réaction de rejet", a dit Alain Juppé :
Le ministre français a souligné que son déplacement au Caire, son premier voyage depuis sa prise de fonctions, "marque l'engagement de la France face aux bouleversements extraordinaires" dans le monde arabe. Il a récusé les critiques contre le manque d'anticipation et de réactivité de Paris face à ces événements, assurant que "ces révolutions nous ont tous pris de court". "Il n'est pas exact de dire que nous avons pris trop de temps à réagir" car "très vite nous nous sommes déclarés disponibles pour accompagner la marche vers la liberté" de ces pays, a-t-il ajouté.
L'Egypte, "pays clé pour l'avenir du monde arabe"
Alain Juppé a encore estimé que l'Egypte, pays le plus peuplé de la région, était "un pays clé pour l'avenir de tout le monde arabe" et qu'elle "donnait l'exemple, sans être exagérément optimiste, de ce que peut être un processus de libération maîtrisé". Il a toutefois déclaré que "rien n'est gagné. Nous avons bien sûr confiance, mais le pire n'est pas exclu". "Lorsque l'on voit ce qui se passe aujourd'hui même en Libye, on voit bien que cette transition peut être douloureuse", a-t-il dit.
Le chef de la diplomatie française a également remis une lettre du président Nicolas Sarkozy au maréchal Hussein Tantaoui, chef du conseil suprême des forces armées (CSFA), l'institution égyptienne à qui le président Hosni Moubarak a remis le pouvoir le 11 février en démissionnant. Il a aussi rencontré en fin de matinée, près de la place Tahrir, haut lieu de la révolte, une dizaine de membres de la "coalition des jeunes de la révolution", parmi lesquels des membres des Frères musulmans. "Le dialogue que j'ai eu avec l'ensemble de cette délégation, et en particulier avec les membres des Frères musulmans, a été intéressant", a estimé Alain Juppé.