Chirac condamné : pourquoi c'est une surprise ?

Chirac, premier chef d'Etat condamné de la République
Chirac, premier chef d'Etat condamné de la République © MAXPPP
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Hélène Favier , modifié à
DECRYPTAGE - La ville de Paris, le parquet, et la classe politique avaient joué l’apaisement dans cette affaire.

Président de la Ve République, monument de la droite, Jacques Chirac a écopé jeudi de deux ans de prison avec sursis dans l’affaire des emplois fictifs de la Ville de Paris. Affaibli et encore incroyablement populaire, cette peine est d'une sévérité inattendue pour l’ancien chef de l’Etat. Pourquoi cette condamnation constitue-t-elle une surprise ? Europe1.fr fait le point en 3 minutes chrono’.

>> Tout semblait aller dans le sens de la défense

Si la condamnation de l’ancien chef de l’Etat était plus qu’incertaine, c’est avant tout parce que la Ville de Paris, la principale "victime" dans cette affaire, avait renoncé à être partie civile. L'actuel maire socialiste de Paris Bertrand Delanoë s’était retiré de l’affaire en 2010, en échange d'un remboursement de 2,2 millions d'euros, dont 500.000 euros acquittés par Jacques Chirac et le reste par l'UMP. Il estimait alors avoir "obtenu la réparation à laquelle aspiraient légitimement les Parisiens". Bref, pour la Ville, l’affaire était close.

Durant le procès, seule une voix discordante s’était donc fait entendre, celle de l'association anti-corruption Anticor, qui avait dénoncé "le système" mis en place par Jacques Chirac pendant ses trois mandats comme maire de Paris (1977-1995).

>> Le parquet avait demandé la relaxe

Qui a dit "dans cette affaire, il n’y a pas de système frauduleux, encore moins mafieux" ? Réponse : le parquet, le 20 septembre dernier lors de son réquisitoire. Tout au long du procès, les avocats de la défense du procès Chirac avaient reçu une aide attendue mais néanmoins précieuse du ministère public. Quasi-absent lors des débats, le parquet avait requis "la relaxe de l’ensemble des prévenus" dans l’affaire des emplois fictifs de la Ville de Paris

Chose rare, la cour n’a donc pas suivi ce réquisitoire et a infligé à l’ancien chef de l’Etat une peine de 24 mois avec sursis. En comparaison, pour l’affaire des emplois fictifs du RPR, Alain Juppé avait écopé de moitié moins : 12 mois avec sursis.

>> Un contexte d'apaisement politique

Cette décision intervient enfin, alors que droite et gauche appellent, depuis le début du procès, à l’apaisement dans cette affaire. L'opposition socialiste s'est ainsi montrée peu virulente contre son ex-adversaire, que les sondages créditent aujourd'hui d'une forte popularité dans l'opinion et dont l'âge incite la classe politique à faire preuve de retenue. "Ce n’est pas bon pour l’image de la France", avait, par exemple, soutenu en 2009 Ségolène Royal sur Europe 1. "Ce sont des affaires très anciennes. Jacques Chirac sans doute a beaucoup de choses à se reprocher si la justice le poursuit. Mais en même temps, il a aussi donné beaucoup au pays. Aujourd’hui, c’est un homme qui mérite d’être tranquille. Et en même temps, il faut que la justice soit la même pour tous", avait-elle argumenté.

La droite appelait, de son côté, a laissé tranquille un homme désormais "affaibli", "fatigué". Il "n'a plus l'énergie que je lui ai connue, il y a 20 ans", avait ainsi insisté le président du Conseil constitutionnel Jean-Louis Debré. Il "est incontestablement affaibli", avait également renchéri avait renchéri un autre de ses amis le député UMP François Goulard. Au final, c’est un jugement qui "arrive vraiment trop tard", a commenté, lundi, le Premier ministre François Fillon.

Le tribunal a, lui, jugé que "Jacques Chirac avait manqué à l'obligation de probité qui pèse sur les personnes publiques chargées de la gestion des fonds ou des biens qui leur sont confiés, cela au mépris de l'intérêt général des Parisiens". Cliquez ici pour découvrir "les motivations" de cette décision.