Entre Jean-François Copé et François Fillon, lequel est le plus à droite ? Si un sondage sur la question était publié, il y a fort à parier que la balance pencherait largement du côté du secrétaire général de l’UMP, qui se revendique de la "droite décomplexée", face au Premier ministre, qui soigne son image de gaulliste social. Mais est-ce aussi tranché ? Pas si sûr… Alors que la campagne officielle pour la présidence officielle s'ouvre vendredi, Europe1.fr fait les comptes.
Leurs racines. Si l’on se penche sur leur parcours, les deux hommes ne sont en fait pas si différents. "Jean-François Copé est actuellement sur une ligne sécurité et liberté. Mais il vient en réalité du chiraquisme, donc une droite sociale", rappelle le politologue Olivier Rouquan, joint par Europe1.fr. "Quant à François Fillon, il vient de l’aile sociale du RPR, puisque c’est Philippe Séguin qui l’avait mis sur la rampe de lancement", avance le chercheur au Cersa.
Leurs mots. Le titre du livre-programme de Jean-François Copé, à paraître début octobre, est sans équivoque. "Manifeste pour une droite décomplexée", écrit le candidat à la présidence de l'UMP. Quant à son rival, il s'accommode parfaitement d'une réputation de gaullisme social, expression que lui et ses soutiens utilisent à l'envi.
Leurs propositions. Les deux hommes ont dévoilé leur programme ou une partie de leur projet dans la presse. Jean-François Copé a déclenché un beau tollé en dénonçant le "racisme anti-blanc" qui sévirait dans les banlieues. Le secrétaire général de l’UMP s’est aussi placé en première ligne contre le droit de vote des étrangers.
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Mais François Fillon sait lui aussi que la base militante de l’UMP, décomplexée par la campagne présidentielle, s’est radicalisée. Pas question donc d’apparaître comme un tenant de la droite molle. Dans son projet, dont Le Monde publie des extraits mercredi, François Fillon promet ainsi la construction de 80.000 places de prison supplémentaires, et veut que le Parlement fixe les besoins en termes d’immigration. Il souhaite aussi "mettre fin à l'automaticité de l'acquisition de la nationalité pour les enfants nés en France de parents étrangers". Des positions très radicales pour un gaulliste social.
Sur les idées donc, chacun rivalise de propositions droitières. Même si avec le "racisme anti-blanc", thème cher à l’extrême droite, Jean-François Copé a frappé très fort.
Leur positionnement par rapport au FN. Là encore, la différence entre les deux rivaux est apparemment criante. En mars 2012, en pleine campagne présidentielle, François Fillon s’était opposé à Jean-François Copé - et Nicolas Sarkozy - sur la question du choix entre le FN et le PS au second tour des législatives. L’ex-Premier ministre avait appelé à voter "contre le Front national", quand le secrétaire général de l’UMP prônait un "ni-ni" des plus fermes.
"Mais Jean-François Copé est un ancien proche d’Alain Juppé, qui a toujours été ferme et intransigeant sur la question", relève Olivier Rouquan. "Et François Fillon, pendant la campagne présidentielle, a donné des signaux contradictoires", rappelle le politologue. Le déplacement de l’ex-Premier ministre en Lorraine, afin d’y soutenir Nadine Morano, dont l’appel appuyé aux électeurs du FN avait fait polémique, avait ainsi fait jaser.
Leurs soutiens. Pour chacun des deux candidats, les soutiens des personnalités sont pour le moins hétéroclites. Ainsi Christian Estrosi, qu’on ne peut pas taxer de centrisme outrancier, soutien François Fillon au côté notamment de Roselyne Bachelot et Laurent Wauquiez. Inversement, le très modéré Jean-Pierre Raffarin s’est rallié à la cause de Jean-François Copé, avec notamment Patrick Balkany et Nadine Morano.
Il faut alors regarder du côté de la Droite populaire, l’aile dure de l’UMP, pour se faire une idée plus précise. Et là, la balance penche nettement en faveur de Jean-François Copé. Le Lab d’Europe 1 a comptabilisé que sur les 22 parlementaires du mouvement, 13 s’étaient prononcés en faveur de Jean-François Copé, contre trois seulement, dont Eric Ciotti, pour François Fillon (les autres ne se sont pas prononcés). "Pour moi, c'est Jean-François Copé, parce que c'est le plus à droite", expliquait ainsi Alain Marsaud, député des Français de l'étranger et signataire de la motion de la Droite populaire pour le congrès du 18 novembre. >> A lire sur Le Lab : pour qui roule la Droite populaire
Conclusion, Copé est plus à droite… en ce moment. Au début de leur parcours, les deux hommes étaient les tenants d'une droite sociale. Mais Jean-François Copé, persuadé que l'UMP se gagnera très à droite, a pris le virage de la "droitisation", initié lors de la campagne présidentielle, plus vite que son adversaire. François Fillon l'a compris, et le Premier ministre essaye de combler son retard, tout en ménageant sa fibre sociale. Les deux stratégies sont donc différentes, mais, dans le fond, beaucoup de choses rapprochent les deux hommes. Qui ne manqueront pas, une fois la bataille digérée, d'afficher leur proximité.