On vous en parlait dès ce vendredi matin sur Europe 1, Emmanuel Macron s'est dit "très choqué" par le passage à tabac d'un producteur noir par des policiers. Des propos qu’il a tenu dès jeudi devant Gerald Darmanin, lors d’un entretien à l’Elysée. Selon nos informations, le président avait alors demandé à son ministre de l’Intérieur des "sanctions très claires" contre les policiers concernés.
Une forme de rappel à l’ordre car plus tôt dans la semaine, le chef de l’Etat lui avait déjà demandé des explications sur la gestion du maintien de l’ordre après la dispersion du camp de migrants à République, à Paris.
Article 24 : Castex met le feu aux poudres ...
Gerald Darmanin est déjà englué dans la polémique sur l’article 24 de la loi "Sécurité globale" (visant à encadrer la diffusion d'images des forces de l'ordre lors de manifestations), qu’il a lui-même poussé. Jean Castex a voulu calmer le jeu en nommant une commission indépendante sur ce sujet. Mais il a remis le feu à sa majorité. Cette commission vise à réécrire un texte déjà lui-même réécrit la semaine dernière par le Premier Ministre, alors même qu’une partie de la majorité souhaite supprimer purement et simplement cet article. En clair, cela ressemble à un enterrement de première classe.
Il faut dire que la pression est de plus en plus forte depuis l’annonce jeudi soir de cette commission. De nombreux parlementaires LREM en ont publiquement fustigé l’idée. Richard Ferrand, le président de l’Assemblée, proche parmi les proches du président, a lui même fait part de sa vive émotion, affirmant qu’une "telle commission constituerait une atteinte aux missions du parlement". Selon les informations d'Europe 1, en visite à l'Elysée jeudi soir, il a lui-même alerté Emmanuel Macron sur le sujet.
"Comme tous les parlementaires de tous les bancs, j'ai appris avec une forme d'incrédulité la mise en place de cette commission. On est en plein débat parlementaire sur un texte. Et je crois qu'il n'appartient pas aux commissions administratives de contourner les représentants du peuple. Et les parlementaires de la majorité veulent remplir leur mission de représentants du peuple", a également réagi sur Europe 1 Hugues Renson, vice-président (LREM) de l'Assemblée Nationale.
... et doit reculer
Face à cette levée de boucliers, le Premier ministre a été obligé de reculer vendredi après-midi. Matignon a finalement annoncé que cette commission ne sera pas chargée de réécrire le controversé article 24. "Je vous confirme donc qu'il n'entrera pas dans le périmètre de cette commission le soin de proposer une réécriture d'une disposition législative, mission qui ne saurait relever que du Parlement", a écrit Jean Castex à Richard Ferrand, dans une lettre consultée par Europe 1.
"Ces propositions n'ont pas vocation à être seulement juridiques et devront aussi plus largement porter sur les enjeux de procédure ou de formation, ainsi que sur les conditions de travail et d'intervention de la presse et des forces de l'ordre", précise le Premier ministre.
"On se sent piégé, inaudible"
Une réunion de crise est prévue lundi entre Darmanin et les députés marcheurs de la Commission des lois. Du côté de l'entourage du patron de l'Assemblée, on estime que "ce n'est pas une reculade de Castex, c'est Darmanin l'auteur du péché initial". Et même au sein du gouvernement, la séquence commence à créer de réelles fractures entre les soutiens de Darmanin et l’aile gauche.
"On se sent piégé, inaudible, on ne comprend pas pourquoi on a cette loi sur les bras", nous a confié un membre du gouvernement. En résumé, la macronie se déchire. Reste à savoir combien de temps Emmanuel Macron pourra rester réellement silencieux.