Emmanuel Macron a demandé que les préfets passent au peigne fin le fichier des personnes radicalisées susceptibles d'être expulsées de France pour s'assurer qu'il n'y ait pas eu "d'oubli" dans l'examen des procédures, après l'attentat d'Arras qui a tué vendredi un enseignant, a annoncé lundi l'Élysée. Le chef de l'État souhaite aussi que ses ministres "incarnent un État impitoyable envers tous ceux qui portent la haine et des idéologies terroristes", a dit un conseiller à des journalistes.
Outre la circulaire aux préfets sur les radicalisés, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a aussi été invité à étudier une "approche spécialisée pour les jeunes hommes originaires du Caucase sur la tranche 16-25 ans", a-t-il ajouté. Né en Russie et originaire de la république fédérale d'Ingouchie, l'assaillant d'Arras, fiché S (pour "sûreté de l'État"), était suivi depuis peu par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Son père a été expulsé en 2018 pour radicalisation et son frère aîné est incarcéré pour sa participation à un projet d'attentat visant l'Élysée. En 2014, la famille de l'assaillant avait été visée par une procédure d'expulsion, finalement annulée.
Accélérer les procédures d'expulsions
Dans sa circulaire, le ministre de l'Intérieur ordonne à tous les préfets du pays de réunir sous 48 heures les groupes départementaux d'évaluation de la radicalisation créés en 2014 pour "réexaminer dans le détail" tous "les cas individuels", "notamment dès lors qu'il s'agit d'étrangers en situation irrégulière", a expliqué l'Élysée. Il s'agit de "s'assurer que toutes les personnes radicalisées qui sont expulsables l'ont bien été ou d'accélérer les procédures", et de "revérifier qu'il n'y a aucun oubli et qu'on est bien allés au maximum de la procédure".
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L'idée est notamment de voir s'il est possible d'obtenir un laisser-passer consulaire dans les cas où cela n'a pas été possible jusqu'ici, notamment s'agissant de la Russie où le dialogue en la matière, et donc les expulsions, sont de facto à l'arrêt depuis la guerre en Ukraine. S'agissant des jeunes hommes originaires du Caucase, l'Élysée part du constat que dans le cas de Samuel Paty, assassiné il y a trois ans, et de Dominique Bernard, tué vendredi, tous deux enseignants, l'assaillant était à chaque fois de cette région.
"On sait qu'il y a un rapport à la violence qui est particulier", "des formes de radicalisation qui sont très fortes", "une culture très radicale de la pratique de l'islam", a fait valoir le conseiller de l'Élysée. Le président a donc demandé un "suivi spécifique", pour réfléchir à des "mécanismes de dépistage ou d'accompagnement de ces jeunes", et "travailler sur le décrochage de la radicalisation" et la "prévention", selon son entourage qui rejette toute idée de "discrimination".
Des mesures qui existaient déjà
En réalité, tout cela n'est pas nouveau. Rien d'exceptionnel parce que tous ces dispositifs existent et existaient avant. Les groupes d'évaluations départementaux, par exemple, sont censés se réunir tous les quinze jours depuis leur création en 2014. Expulser des étrangers dangereux en situation régulière, c'est déjà possible avec la dégradation des titres de séjour. Surtout, Gérald Darmanin avait déjà formulé cette demande au préfet en 2021.
En fait, le gouvernement cherche à montrer qu'il agit. On peut légitimement se demander pourquoi tout cela n'a pas été fait avant, notamment dès le lendemain de l'attaque du Hamas en Israël, alors même que plusieurs sources sécuritaires alertaient sur le niveau de la menace terroriste qui augmentait en France.