Les dépassements des frais de campagne de Nicolas Sarkozy en 2012 et l’affaire Bygmalion ont des similitudes, ce sont bel et bien deux affaires distinctes. Si, à chaque fois, ce sont les liens entre l’UMP et des responsables de la campagne de l’ancien président de la République qui sont visés, la justice a ouvert deux enquêtes différentes. Pour autant, les acteurs sont souvent les mêmes. Les quatre hommes mis récemment en examen pour la première affaire l’ont d’ailleurs déjà été pour la seconde. Ils ont pour autre point commun d’avoir fait partie, au moins pour trois d’entre eux - l’identité du quatrième, un expert-comptable, n’a pas été révélée -, de la garde très rapprochée de Nicolas Sarkozy lors de sa tentative de conserver le pouvoir en 2012. Présentation.
Guillaume Lambert, le préfet de l’ombre
L’homme est peu connu du grand public, il a pourtant été l’un des rouages essentiels de la machine Sarkozy pendant plusieurs années. A partir de 2009, il est chef de cabinet adjoint puis chef de cabinet (tout court) du Président Sarkozy. En 2012, il est nommé directeur de la campagne présidentielle du président sortant, et c’est à ce titre qu’il est mis en examen. Les juges le soupçonnent d’avoir été au moins au courant d’un système de facturations de certains frais de campagne réglées directement par l’UMP sans qu’elles n’apparaissent dans les comptes de campagne.
Cet homme de l’ombre a été mis sous le feu des projecteurs par Jérôme Lavrilleux, l’homme qui, lors d’une stupéfiante confession télévisée, a reconnu l’existence d’un système de fausses factures. "Personne n'a eu le courage de dire stop à Sarkozy. Je ne le voyais que lors des meetings. Le reste du temps, c'est (Guillaume) Lambert qui passait commande", avait déclaré au Point celui qui est aujourd’hui eurodéputé. Nommé sous-préfet en 2005 après une carrière dans le commissariat de la Marine, Guillaume Lambert a été fait préfet en mai 2012 par… Nicolas Sarkozy, juste avant son départ de l’Elysée. En poste en Lozère à partir de juillet 2013, il a été débarqué par François Hollande après sa mise en examen en avril dernier dans l’affaire Bygmalion.
Philippe Blanchetier, l’avocat
Pas facile d’être l’avocat tout à la fois de l’UMP et de Nicolas Sarkozy. Philippe Blanchetier en sait quelque chose, lui qui a, en un peu plus d’un an, subi deux mises en examen et un placement sous statut de témoin assisté, dans l’affaire des pénalités de campagne réglées par le parti en lieu et place de l’ancien chef de l’Etat. Cette dernière affaire est désormais résolue, avec un non-lieu général prononcé en septembre 2015, mais les tracas de l’avocat ne sont pas finis pour autant. "Me Blanchetier est intervenu comme avocat pour dire ce qui était légal. Il n'a jamais eu connaissance de ce qui était éventuellement illégal", a réagi son conseil Alexandre Varaut.
Nicolas Sarkozy n’est pas son seul client. Spécialisé dans les litiges électoraux, il a défendu Christian Estrosi, Bernard Debré, Georges Tron et même Valéry Giscard d’Estaing dans des affaires de ce type. Il a aussi été l’avocat de Brice Hortefeux, d’Eric Besson ou encore de Jean-François Copé dans diverses affaires. Une activité proche des milieux politiques qui explique peut-être sa nomination comme chevalier de la Légion d’Honneur en 2008 et comme Officier de l’ordre national du Mérite en 2012.
Philippe Briand, le trésorier exposé
S’il est un poste exposé dans une affaire de comptes falsifiés lors d’une campagne électorale, c’est bien celui de trésorier. Philippe Briand a occupé cette - finalement peu enviable - fonction. En tant que mandataire financier du candidat Sarkozy, l’homme avait la charge de tenir un compte retraçant scrupuleusement, justificatifs à l’appui, toutes les dépenses liées à la campagne. Alors, forcément, quand il y a soupçon d’irrégularités, il y a soupçon sur l’attitude dudit mandataire.
Largement méconnu de l’opinion, Philippe Briand est pourtant loin d’être un débutant en politique. Il est ainsi député d’Indre-et-Loire sans discontinuer depuis 1993 et maire de Saint-Cyr-sur-Loire depuis plus longtemps encore (1989). Il a même fait partie d’un gouvernement, puisqu’il avait été nommé le 31 mars 2004 secrétaire d’Etat chargé de l’Aménagement du Territoire par Jean-Pierre Raffarin. Mais Philippe Briand avait finalement démissionné le 14 avril 2004, soit 14 jours plus tard, incapable alors de trouver un remplaçant à la tête du réseau d’administration de biens Cyta immobilier, qu’il a fondé en 1990. L’homme avait quelques raisons d’avoir du mal à lâcher son entreprise. Elle lui valait de posséder, selon Challenges, 140 millions d’euros, en 2015. Une fortune qui fait de lui la 386e personnalité la plus riche de France.