C'est une victoire de façade. La cour d'appel de Versailles a confirmé, vendredi, l'exclusion de Jean-Marie Le Pen du Front national, déjà validée en novembre 2016 par le tribunal de grande instance. Mais elle a aussi maintenu son statut de président d'honneur, dont Marine Le Pen, présidente du parti frontiste, essayait de le déchoir depuis plus de deux ans. Suffisant pour que l'entourage du "Menhir" se gargarise d'une victoire. "Ils se prennent une tôle", lâche ainsi un de ses proches à Marianne.
"Un grand succès". Certes, le maintien de ce statut va de pair avec quelques droits. "Monsieur Jean-Marie Le Pen pourra de nouveau siéger à toutes les instances" du FN, rappellent ainsi les magistrats de la cour d'appel. Qui confirment aussi les sanctions financières (rétroactives) à l'encontre du parti : à raison de 5.000 euros chaque fois que le président d'honneur n'a pas été convoqué, la facture va être salée pour la direction frontiste, par ailleurs condamnée à verser 25.000 euros de dommages et intérêts. "J'espère que Madame Le Pen est solvable", s'amuse Lorrain de Saint Affrique, proche de Jean-Marie Le Pen, dans Le Figaro. Lui salue "un grand succès", tandis que Me Joachim, l'avocat du fondateur du FN, se dit "satisfait de cette décision".
Sursis. En réalité, Jean-Marie Le Pen vient d'obtenir un simple sursis. Car le titre de président d'honneur, créé sur mesure pour lui en 2011 lorsqu'il avait passé le flambeau à sa fille, va prochainement être supprimé. Le poste a en effet été rayé des nouveaux statuts du FN, qui seront soumis à l'approbation des militants lors du prochain congrès du parti, à Lille, les 10 et 11 mars. En juin 2015, lorsque les adhérents avaient voté lors d'un "Congrès postal", en réalité un scrutin électronique, ils n'avaient eu aucun mal à accepter des statuts sans président d'honneur. C'est ce vote que Jean-Marie Le Pen avait contesté et que la justice a jugé non conforme. Mais Marine Le Pen compte bien obtenir le même résultat avec un congrès physique.
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Pouvoir de nuisance. Reste le pouvoir de nuisance de Jean-Marie Le Pen. Celui qui s'apprête à publier ses Mémoires le 1er mars avait juré qu'il se rendrait à Lille lors du congrès du FN quel que soit l'arrêt de la cour d'appel, ne serait-ce que pour dédicacer son livre dans une librairie de la ville. Désormais, il considère avoir même le droit de participer à la grand-messe frontiste, et ne risque pas de s'en priver. Alors que le secrétaire général du FN, Steeve Briois, a annoncé vendredi que le parti interdirait l'accès à son congrès au "Menhir", la séquence s'annonce une nouvelle fois catastrophique pour l'image de la formation politique. D'aucuns imaginent déjà Jean-Marie Le Pen, bloqué par les services de sécurité, tempêter devant les grilles du Palais des congrès…
Taper le porte-monnaie. Le pouvoir de nuisance est aussi financier. Pour l'instant, le fondateur du Front national n'a pas réclamé les pénalités que lui doit le parti pour ne pas l'avoir invité à siéger lorsqu'il en avait le droit. "On fera valoir ce qui est dû en fonction du comportement du FN vis-à-vis de Jean-Marie Le Pen à l'occasion du congrès de Lille", indique l'entourage du patriarche à L'Express. Pour l'instant, tout porte donc à croire que le "Menhir" n'effacera pas les dettes. Le coup serait alors rude pour Marine Le Pen, qui voit déjà sa formation politique accumuler les ennuis de trésorerie. Entre mauvais scores aux législatives et fermetures de comptes bancaires, le FN n'a pas besoin d'une dépense imprévue.