Une abstention record sous la Ve République a marqué dimanche le premier tour des législatives, plus d'un électeur sur deux n'étant pas allé voter pour ce scrutin qui devrait donner au parti d'Emmanuel Macron une majorité écrasante à l'Assemblée nationale. Effet d'essoufflement un mois après la présidentielle, victoire annoncée de La République en Marche, désintérêt vis-à-vis de la politique : l'abstention de ce dimanche est la plus élevée depuis 1958, lors des premières législatives de la Vè République. Elle s'élève à 51,29%, selon les résultats définitifs du ministère de l'Intérieur.
Les trois infos à retenir
- Selon les chiffres définitifs du ministère de l'Intérieur, l'abstention s'élève à 51,29%
- Ce chiffre est très au-delà du taux de 42,78% du premier tour de 2012, déjà historiquement élevé
- Traditionnellement plus faible à l'élection présidentielle, l'abstention avait atteint 22,23% des inscrits au premier tour le 23 avril
Un record. Ce chiffre de 51,29% d'abstention est très au-delà du taux de 42,78% du premier tour de 2012, déjà historiquement élevé. Traditionnellement plus faible à l'élection présidentielle, l'abstention avait atteint 22,23% des inscrits au premier tour le 23 avril.
"Pas une véritable surprise". Selon Frédéric Dabi, directeur adjoint de l'Ifop, cette abstention record "n'est pas une véritable surprise" dans la mesure où l'on observe, "depuis 20 ans, une baisse régulière du taux de participation" aux législatives. Depuis l'entrée en vigueur en 2002 du quinquennat et du calendrier faisant se succéder présidentielle et législatives, "c'est un scrutin qui a perdu son autonomie. Les électeurs ont le sentiment que les jeux sont faits après la présidentielle, et se disent 'à quoi bon aller voter'", ajoute Frédéric Dabi. Un désintérêt qui a pu être amplifié cette année par la large victoire d'Emmanuel Macron, élu avec 66,10% des voix face à Marine Le Pen le 7 mai, grâce en partie au rejet du Front national mais pas toujours sur un vote d'adhésion.
"Le signe d'une immense fatigue démocratique". Son jeune mouvement se dirige vers une victoire écrasante et pourrait ravir avec son allié du MoDem 400 à 455 des 577 sièges de députés, à l'issue du second tour le 18 juin, selon les estimations. Le premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, éliminé et dont le parti s'est effondré dimanche, a vu dans cette abstention "le signe d'une immense fatigue démocratique". Pour le chef de file des Républicains aux législatives, François Baroin, elle témoigne "de la persistance des fractures de la société française".
Pour Jean-Daniel Lévy, de l'institut Harris interactive, "on est sur cette impression générale de la part des Français qu'une majorité va aller au président de la République. Dans ce contexte-là, ils n'ont pas forcément envie de voter, mais pas non plus de créer d'entrave". "Les Français ne sont pas complètement fans du président de la République. En même temps, il n'y a pas de force alternative qui suscite un engouement important", ajoute-t-il. L'institut Odoxa remarque lui aussi que "les gens en ont assez et s'intéressent moins à ces législatives qu'à la présidentielle. Ensuite, ils ne veulent pas empêcher Emmanuel Macron d'avoir sa majorité, même s'ils ne sont pas d'accord avec ses idées, et parce qu'ils pensent qu'il a déjà gagné".
Une seule triangulaire. Quoiqu'il en soit, la faible participation a eu pour effet mécanique une limitation du nombre de députés élus dès dimanche. Trois sortants été réélus - Paul Molac (REM, 4e Morbihan), Stéphane Demilly (UDI, 5ème Somme), Napole Polutele (DVG, Wallis et Futuna), et Sylvain Maillard a remporté un premier mandat (REM, 1ère Paris). Une triangulaire seule s'annonçait pour le 18 juin, dans la 1ère circonscription de l'Aube, opposant des candidats REM, LR et FN.
La participation détermine le nombre de candidats au second tour. Car pour être élu dès le premier tour, le candidat doit réunir à la fois la moitié des suffrages exprimés et le soutien d'au moins 25% des électeurs inscrits. Pour avoir le droit de se présenter au second tour, il faut avoir obtenu au premier un nombre de suffrages au moins égal à 12,5% du nombre d'inscrits dans la circonscription. Si un seul candidat atteint 12,5%, celui ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages après lui peut se maintenir au second tour. Si aucun ne remplit cette condition, les deux candidats arrivés en tête peuvent se maintenir.