Quelques heures avant le silence : à minuit vendredi soir la campagne des législatives prendra officiellement fin, les responsables politiques profitant de ce dernier jour pour multiplier les prises de parole avant de retenir leur souffle face à un scrutin historique. L'extrême droite va-t-elle obtenir une majorité absolue pour la première fois en France ? La stratégie de désistement de ses opposants va-t-elle lui barrer la route ? Le camp présidentiel va-t-il sauver les meubles ?
Les informations à retenir :
- C'est la dernière journée de campagne avant le second tour des législatives
- "51 candidats ou militants ont été agressés" durant la campagne, selon Gérald Darmanin
- Selon un sondage Opinionway pour Europe 1, CNews et le JDD, le RN et leurs alliés pourraient obtenir une majorité relative, avec 205 à 230 sièges
- Le NFP pourrait obtenir entre 150 et 180 sièges, et Renaissance entre 125 et 155 sièges, selon le même sondage
Plus de 3,3 millions de procurations établies pour les élections législatives
Au 4 juillet, selon les chiffres du Ministère de l'Intérieur et des Outre-Mer, plus de 3,3 millions de procurations ont été établies depuis le 10 juin pour les élections législatives anticipées, soit 3,6 fois plus de procurations que pour les élections législatives de 2022. Rien que sur la journée du 4 juillet, 144.650 procurations ont été établies.
"51 candidats ou militants ont été agressés" durant la campagne, selon Darmanin
Quelque "51 candidats, suppléants ou militants" ont été "agressés physiquement" durant la campagne des élections législatives, a annoncé vendredi Gérald Darmanin sur BFMTV. Durant cette campagne menée dans "une France à vif", "plus d'une trentaine d'interpellations", de "profils extrêmement variés", ont été effectuées par les forces de l'ordre, a précisé le ministre de l'Intérieur.
S'il est encore "un peu tôt pour faire un profil-type" des agresseurs, Gérald Darmanin a évoqué la présence parmi eux de "gens spontanément énervés" ou de "militants politiques d'ultragauche ou d'ultradroite".
Vers une majorité relative pour le RN ?
"Il y a 16 millions d'abstentionnistes et c'est eux qui font la décision", a appelé jeudi soir le chef de file de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon. "Nous pouvons gagner", a-t-il martelé sur TF1 au nom de l'alliance de gauche du Nouveau Front populaire, avant d'avertir "que madame (Marine) Le Pen aussi peut gagner".
À ce stade de la campagne, les sondages prédisent davantage une majorité relative au RN et à ses alliés. Selon une nouvelle projection des sièges de la future Assemblée nationale par Opinionway réalisée pour Europe 1, CNews et Le Journal du Dimanche, le Rassemblement national et leurs alliés pourraient obtenir entre 205 à 230 sièges, soit une augmentation comprise entre 117 à 142 sièges par rapport à 2022. Le Nouveau Front Populaire pourrait obtenir entre 150 et 180 sièges à la chambre basse, soit une hausse de 19 à 31 sièges par rapport à 2022. La majorité présidentielle serait alors la grande perdante de ces élections législatives : Renaissance pourrait espérer entre 125 à 155 sièges.
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De son côté le président du Rassemblement national Jordan Bardella s'est dit "confiant". "Je pense que les Français veulent tourner la page de sept années de macronisme, de sept années de brutalité", a-t-il argué, appelant les électeurs à lui confier une majorité absolue. "Ou alors le pays est bloqué".
Dans un communiqué jeudi, le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) a lui fustigé le "populisme" et "le nationalisme", qui "n'ont jamais été dans l'Histoire un rempart contre l'antisémitisme", et appelé à ne voter ni pour le RN ni pour LFI.
Le barrage républicain agace les électeurs du RN
Dans la circonscription de Lens, le Rassemblement national a récolté 52 % des voix. Le candidat RN a été élu dès le premier tour. Mais ce qui inquiète surtout les sympathisants comme Chantal, c'est cette grande coalition au vol. "C'est ce parti qui a 33% (au niveau national), donc s'il est passé, c'est que les Français souhaitaient qu'il passe. Donc Monsieur Macron, Monsieur Attal, Monsieur Mélenchon, tout ça, laissez-nous tranquilles", s'exclame-t-elle au micro d'Europe 1.
"On est vraiment pas considérés, on est considérés comme des moins que rien", s'attriste un autre habitant de la région, qui estime que "les Français sont mécontents du système actuel".
"Aucune voix ne doit manquer"
Capitaine d'un contingent macroniste à qui les sondages prédisent une centaine de pertes, Gabriel Attal multipliera les apparitions dans les médias vendredi (France Bleu à midi, TF1 à 13H00 et France 2 à 20H00). "J'assume dans cette campagne de me jeter de toutes mes forces pour empêcher le Rassemblement national d'avoir une majorité absolue", a déclaré le chef du gouvernement, qui fera aussi campagne à Paris et dans les Hauts-de-Seine.
Alors que la participation a été très forte au premier tour, les dirigeants politiques de tous bords semblent vouloir éviter toute forme de relâchement dans l'électorat. "Ne cédez pas à tous ceux qui tentent de vous empêcher de gagner", a lancé Jordan Bardella à ses partisans, fustigeant la pratique du désistement contre le RN. "Il n'y a aucune raison de baisser notre degré de vigilance. Aucune voix ne doit manquer", a appelé la cheffe des Écologistes Marine Tondelier. "Je lance un appel pour qu'il n'y ait pas une seule voix qui manque dimanche", a abondé son homologue socialiste Olivier Faure.
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Saluant l'"effort" des retraits à gauche et chez les macronistes, l'ancien président François Hollande a lui aussi alerté contre un excès de confiance : "ça ne veut pas dire que, parce que des états-majors ou des candidats se sont eux-mêmes désistés, les électrices et les électeurs vont suivre les consignes". "Il n'y a rien d'indigne dans l'idée de voter contre (...) en acceptant de voter pour des gens dont on ne partage pas les idées simplement pour éviter une catastrophe", a aussi appelé Raphaël Glucksmann, qui ira vendredi à Marseille soutenir Pascaline Lécorché, candidate Place publique dans les Bouches-du-Rhône.
Selon un sondage Odoxa pour Le Figaro paru jeudi, 52% des Français désapprouvent la pratique du désistement, une légère majorité qui masque une véritable fracture selon les opinions politiques : 79% des électeurs du Nouveau Front populaire et 74% de ceux du camp présidentiel disent l'approuver, contre seulement 32% de ceux des Républicains et 15% des électeurs du Rassemblement national.